[Tribune] Les nouveautés de la loi Macron en matière d'épargne salariale
Intéressement, Perco, actions gratuites... Qu'a changé la loi Macron en la matière pour les TPE et les PME ? L'éclairage de Danièle Nizery, associée de Baker Tilly France, réseau de cabinets d'expertise comptable, et du groupe de travail Social du réseau.
Je m'abonneIntéressement 2016 : rappel et précisions pratiques
Des éclairages sur les nouveautés applicables en 2016 ont été apportés par l'instruction interministérielle du 18 février 2016.
1) Pour les entreprises de moins de 50 salariés
Forfait social à taux réduit pour les premiers accords d'intéressement au sein des petites entreprises
L'entreprise de moins de 50 salariés qui met en place de manière volontaire un dispositif d'épargne salariale (intéressement ou participation) pour la première fois (ou du moins la première fois depuis 5 ans) bénéficie d'un forfait social réduit à 8 % au lieu de 20 % pendant une durée de 6 ans.
2) Pour les entreprises qui franchissent le seuil des 50 salariés
Mise en place de la participation en cas de préexistence d'un accord d'intéressement si une entreprise franchit le seuil de 50 salariés :
> Avant : la mise en place de l'accord de participation était différée jusqu'au terme de l'accord d'intéressement.
> Désormais : la mise en place de l'accord de participation est reportée jusqu'au troisième exercice clos après le franchissement du seuil de 50 salariés si l'accord d'intéressement est appliqué sans discontinuité pendant cette période.
A noter : l'appréciation du seuil de 50 salariés pour l'obligation de mettre en place la participation est aussi modifiée. L'obligation commence quand l'effectif de l'entreprise a atteint 50 salariés pendant 12 mois, consécutifs ou non, au cours des 3 dernières années (alignement sur l'appréciation du seuil relatif à l'obligation de mise en place d'un comité d'entreprise).
3) Pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille
La date limite de versement de la participation et de l'intéressement est harmonisée. L'employeur doit désormais verser les sommes au salarié au plus tard le dernier jour du 5e mois suivant la clôture de l'exercice (au lieu du dernier jour du 7e mois jusqu'à présent pour l'intéressement). A défaut, l'entreprise est redevable d'un intérêt de retard fixé à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées.
> A partir de quand ? Ces dates s'appliquent aux sommes versées au titre des exercices clos à compter du 8 août 2015. Par exemple, pour un exercice clos au 31 octobre 2015, le versement doit être réalisé avant le 31 mars 2016.
> Faut-il amender sur ce point les accords d'intéressement existants ? Oui mais uniquement à des fins de bonne information des salariés. Il n'y a pas de sanction si cela n'est pas fait. A défaut d'avenant, les dispositions de la Loi s'imposent de plein droit.
La loi Macron prévoit désormais que le silence du salarié en présence d'un PEE ou PEI au sein de l'entreprise vaut affectation au Plan d'épargne des sommes perçues. Or, jusqu'à présent, le silence du salarié n'entraînait pas le blocage mais à l'inverse le versement immédiat au salarié de la somme.
Mais un PEE n'est pas obligatoire. Le fléchage par défaut ne s'impose bien entendu que si un PEE existe dans l'entreprise.
Les accords d'intéressement existants doivent être amendés sur ce point, mais uniquement à des fins de bonne information des salariés, et sans sanction si cela n'est pas fait. A défaut d'avenant, les dispositions de la Loi s'imposent de plein droit. Cette disposition s'applique pour les sommes dues à compter du 1er janvier 2016.
Toutefois, pour atténuer les effets (blocage pendant 5 ans des sommes) d'une information insuffisante sur le sujet, une période transitoire a été instaurée pour l'intéressement attribué entre le 1er janvier 2016 et le 31 décembre 2017. Les salariés disposent exceptionnellement de la possibilité de demander le déblocage de cet intéressement dans les 3 mois suivant la notification de son affectation sur un plan d'épargne.
Les sommes redeviendront alors imposables et si un abondement a été versé, il sera bien entendu restitué à l'entreprise.
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Ces mesures concernent toutes les entreprises, quelle que soit leur taille.
- Abondement de l'employeur : la possibilité d'un abondement régulier, collectif et uniforme, par l'employeur dans les Perco (Plan d'épargne pour la retraite collective) par décision unilatérale et sans corrélation avec les versements des salariés est instituée. Ainsi, l'employeur peut même, en l'absence de versement du salarié, effectuer des versements sur le Perco.
- Augmentation du versement de jours de congés non pris dans le Perco : en l'absence de compte épargne temps (CET), le salarié peut dorénavant verser sur le Perco les sommes correspondant à 10 jours de repos non pris, au lieu de 5.
- Taux réduit de forfait social : le forfait social passe de 20% à 16% pour les sommes placées au Perco issues de l'intéressement, la participation, l'abondement de l'employeur sous réserve du respect de conditions relatives à l'affectation de ces sommes. Sont concernés les Perco dont les règlements prévoient que la gestion pilotée est l'option par défaut du Perco et dont la gestion pilotée est investie sur un fond comprenant au minimum 7 % de titres éligibles au PEA-PME. Il convient de se renseigner sur ce point auprès de son organisme gestionnaire des fonds.
- Suppression de la contribution patronale complémentaire de 8,2% dont l'employeur devait s'acquitter sur les versements au PERCO d'un montant supérieur à 2 300 € par an et par salarié.
Le dispositif des actions gratuites rendu plus attractif
La loi Macron remanie également profondément le régime juridique, fiscal et social des attributions gratuites d'actions afin de rendre le dispositif plus attractif.
Ces mesures concernent toutes les entreprises, quelle que soit leur taille.
Périodes d'acquisition et de conservation réduites
L'attribution d'actions gratuites se réalise en deux temps : le salarié dispose au départ d'une sorte de droit théorique, et, au bout d'un certain temps (la période d'acquisition), il devient vraiment propriétaire de l'action. S'ensuit une période pendant laquelle il doit conserver l'action.
La période d'acquisition minimum est désormais réduite de 2 à 1 an et la période de conservation devient facultative et laissée à la libre appréciation de l'assemblée générale, alors que celle-ci était jusqu'alors de 2 ans.
Toutefois, la durée cumulée de la période d'acquisition et la durée de conservation ne peut être inférieure à 2 ans, au lieu de 4 ans jusqu'à présent.
Exonération ou aménagement de la contribution patronale spécifique
Les PME sont désormais exonérées de la contribution patronale sur les attributions gratuites si :
> elles n'ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création,
> ces actions sont attribuées dans la limite, par salarié, du plafond annuel de la sécurité sociale (soit 38 040 € en 2016).
Pour les autres entreprises, cette contribution patronale est abaissée de 30 à 20 %, et son exigibilité est reportée. Elle ne devient exigible qu'un mois après la date d'acquisition des actions (au moment où le salarié en devient réellement détenteur), et non plus un mois après leur date d'attribution.
Suppression de la contribution salariale spécifique
Au plan social, le gain d'acquisition sera dorénavant soumis aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, et non plus sur les revenus d'activité, lors de la cession des titres acquis. Le total des prélèvements sociaux pour le bénéficiaire passe donc de 8 à 15,5%.
Parallèlement, la contribution salariale de 10 % applicable aux actions gratuites est supprimée.
A noter que les contributions salariales et patronales étaient dues jusqu'à présent dans des conditions très similaires pour le dispositif d'attribution d'actions gratuites et pour le dispositif " stock option ". Or, le régime fiscal et social des stocks options reste quant à lui inchangé.
L'ensemble de ces modifications s'applique aux actions gratuites distribuées par une assemblée générale extraordinaire postérieure à la publication de la loi, soit au 7 août 2015.
L'experte
Danièle Nizery est associée de Baker Tilly France, réseau de cabinets d'expertise comptable. Elle est spécialisée dans les domaines de la paie et des charges sociales, des contrats de travail, du droit et de l'environnement social des PME, de la gestion humaine, de l'audit social et de l'audit d'organisation, thèmes sur lesquels elle anime des formations. Elle a été, durant 13 ans, DRH de deux entreprises de respectivement 300 et 1000 personnes. Elle est diplômée de Sciences Po Paris. Tribune réalisée avec le groupe de travail Social de Baker Tilly France.