4 étapes pour faire de vos seniors de bons mentors pour vos juniors
Alors que le départ massif à la retraite de seniors va totalement bouleverser le marché du travail d'ici à 2020, la transmission des compétences dans les entreprises constitue un enjeu-clé de compétitivité. Face à ce problème, une solution est possible : la formation de vos juniors par vos seniors.
Je m'abonne"D'ici à 2020, on estime que 5 millions de seniors actifs partiront à la retraite et 6 millions de jeunes arriveront sur le marché du travail. Au total, ces bouleversements vont concerner 20 % de la population active, avance Françoise Martin Sainteve, directrice Innovation et Développement au sein du groupe de formation professionnelle IGS. Cette situation, il faut que les entreprises l'anticipent dès aujourd'hui, en particulier pour la transmission des compétences rares." Qui plus est dans les petites entreprises qui disposent de ressources humaines et financières beaucoup plus limitées que les grands groupes et qui pourraient être durement touchées par la perte de savoir-faire clés pour leur business.
Sécurisation de la continuité de l'activité, fidélisation des plus jeunes, valorisation des savoirs et savoir-faire des seniors, renforcement de la marque employeur, amélioration de la communication informelle entre générations... Le tutorat (transmission de savoir-faire) et le mentorat (transmission des savoir-faire et accompagnement des juniors dans leur intégration) présentent de nombreuses opportunités pour votre société tout comme pour vos salariés. D'autant plus depuis l'entrée en vigueur de la loi sur le contrat de génération, qui soutient financièrement la mise en place de binômes juniors-seniors* dans les entreprises françaises.
Déployer ce type de dispositif, le temps de quelques mois voire plusieurs années, ne s'improvise pas. Cela suppose la mise en place d'une bonne préparation de vos salariés mentors et de quelques préalables.
Étape 1 : Priorisez les compétences menacées
À commencer par établir un diagnostic précis des compétences essentielles qui sont menacées par le départ de vos collaborateurs. "Avant de mettre en place ce type de processus, il faut déjà identifier les différents savoir-faire présents au sein de votre entreprise", conseille Elea Canipelle, directrice de la division Sur mesure et Université d'entreprise du groupe IGS. L'experte distingue ainsi trois catégories de compétences selon leur niveau d'importance et de rareté au sein de la société :
1 / Les compétences critiques dont l'acquisition nécessite plusieurs années d'expérience, que peu de salariés maîtrisent et dont la mobilisation présente un coût non négligeable pour l'entreprise.
2 / Les compétences clés qui sont fondamentales pour la bonne marche de votre société mais qui sont déjà maîtrisées par un nombre conséquent de salariés.
3 / Les compétences " socle ", ou savoir-faire " de base " qui constituent l'essence de votre activité et l'ADN de votre entreprise.
"Identifier ces différentes catégories de savoir-faire va vous permettre de prioriser votre plan d'actions pour sécuriser leur transmission et repérer les relais humains dont vous disposerez en interne pour former les plus jeunes", détaille Elea Canipelle.
Étape 2 : Définissez un plan d'action
Que vous dirigiez une TPE de 10 salariés ou une PME de 200 collaborateurs, la mise en oeuvre de la transmission des savoir-faire de vos seniors à vos juniors ne prendra pas la même forme. D'où l'importance de formaliser un plan d'action clair et budgété. Voici quelques questions primordiales à vous poser avant d'engager quoi que ce soit :
- Ce plan d'action concerne-t-il l'ensemble des services ou seulement quelques-uns ?
- Sous quelle forme allez-vous accompagner vos seniors dans leur rôle de tuteur/mentor (formation individuelle, e-learning, ateliers de groupes, coaching...) ?
- Allez-vous externaliser cet accompagnement ?
- Prévoyez-vous de mettre en place une prime spécifique ?
- Sur combien de temps comptez-vous déployer le dispositif ?
- Sur quels critères allez-vous évaluer la bonne transmission de ces compétences ?
- Allez-vous mettre en place des actions de suivi de sa mise en oeuvre ?
- Comment allez-vous communiquer sur le dispositif en interne ?
Étape 3 : Formez vos tuteurs volontaires
Cette mission de mentorat suppose un investissement humain important. Pour qu'elle réussisse, elle doit avant tout être fondée sur la base du volontariat. Car, un senior compétent ne fait pas nécessairement un bon mentor, et ce encore moins lorsqu'il n'en a pas envie. "Chacun a des capacités à transmettre mais elles se manifestent différemment d'une personne à une autre. Pour cela, il est essentiel que vos seniors aient une appétence forte pour devenir mentor", confirme Elea Canipelle.
Selon cette responsable d'IGS, il est impératif que les volontaires suivent une formation qui interviendra sur deux volets : l'un comportemental (ex : développement de l'écoute active, travail sur la communication informelle...), l'autre pédagogique (ex : identification des compétences acquises et manquantes du junior, construction d'un processus pédagogique...).
Étape 4 : Déployez le processus
Une fois que vos seniors volontaires sont opérationnels, le moment est venu de déployer le dispositif. Former un junior à un métier et à une culture d'entreprise prend du temps. Veillez donc à prendre en compte cette charge de travail supplémentaire dans l'attribution des tâches et des délais que vous fixez à vos salariés mentors.
De même, faites en sorte que le mentor comme le mentoré disposent d'un autre interlocuteur de référence (ex : DRH, chef de service...) vers qui se tourner dans le cas où la relation deviendrait conflictuelle et qu'il faudrait éventuellement modifier les binômes.
"Dans le même esprit, n'hésitez pas à organiser des actions de suivi tout au long du processus comme la tenue d'ateliers trimestriels de co-développement entre mentors pour éviter l'isolement de chacun et favoriser l'échange de bonnes pratiques", conseille Elea Canipelle.
Enfin, s'il est impératif d'investir dans l'accompagnement des plus anciens pour assurer cette transmission, ne perdez jamais de vue que votre objectif final n'est pas tant de transformer vos seniors en bons mentors, que de former la nouvelle génération à vos défis pour l'avenir, et ce, bien au-delà des quelques mois d'intégration.
* Sans obligation de mise en place d'une relation mentorale ou tutorale au sein des binômes.