Leadership : 3 grands enseignements tirés des séries télévisées
Les séries TV, une source d'inspiration pour les managers ? C'est le parti pris par les auteurs du livre De MacGyver à Mad Men, quand les séries TV enseignent le management. Experts et chefs d'entreprise ont ainsi décortiqué 13 séries pour identifier les bons ingrédients des recettes managériales.
Je m'abonne1. Savoir s'entourer, l'une des principales qualités d'un leader
Dans la série Les Soprano, Tony Soprano, leader d'une organisation mafieuse, s'est entouré de lieutenants tous italo-américains, issus du sérail et proche du clan familial. Une stratégie censée lui garantir la loyauté de ses sbires. Ce qui n'est bien évidemment pas le cas et n'amène pas toujours Tony Soprano à prendre les meilleures décisions.
"S'entourer de profils "incestueux", dans le moule et n'ayant jamais connu d'autres aventures professionnelles que celles du métier qu'ils exercent, n'est pas toujours une bonne idée, indique Benoît Meyronin, professeur à Grenoble École de Management et associé fondateur de l'Académie du Service, PME de 30 personnes. La diversité des expériences et des points de vue constitue la richesse d'une entreprise." Les dirigeants doivent oser se confronter à des regards neufs et recruter des profils différents pour réinventer leur entreprise et l'adapter à un monde en perpétuel changement.
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Fuir la confrontation des idées, voire la contestation si elle est argumentée, est stérile. Prenons l'exemple de Dr House, dans la série éponyme. Il ne cherche pas à s'entourer de beni-oui-oui. Au contraire, il souhaite être challengé par son équipe car de cette saine émulation naissent les bonnes solutions. "À l'heure des jeunes générations connectées qui ne se reconnaissent pas dans des organisations hiérarchiques cloisonnées, ce management permet d'intégrer et de bénéficier de jeunes talents", assure Monika Siejka, enseignante-chercheuse à l'UVSQ-Paris Saclay.
Enfin, si le recrutement de clones est un travers plutôt spécifique aux grands groupes, l'écueil dans certaines PME est de ne faire confiance qu'à la famille. "Entre autres, se pose alors la question de la légitimité, soulève Benoît Meyronin. Embaucher ses enfants en vue de la relève, par exemple, n'est pas une mauvaise pratique en soi. Mais, il faut veiller à ce qu'ils vivent d'autres expériences professionnelles avant d'intégrer l'entreprise familiale. Et ne pas hésiter à ce qu'ils fassent leurs classes à différents postes de la société. La capacité d'ouverture des dirigeants est fondamentale pour faire vivre dans la durée une entreprise familiale."
2. Partager le pouvoir, source de légitimité pour le leader
Dans la série The walking dead, Rick Grimes, leader d'un groupe de survivants, est un leader légitime et respecté. "L'un de ses objectifs est de créer l'unité et de favoriser l'esprit d'équipe plutôt que l'individualisme, écrit Oihab Allal-Cherif, professeur à Kedge Business School. Il forme d'autres leaders et leur délègue régulièrement des missions importantes sans se sentir menacé. Il assume la responsabilité des échecs et se remet régulièrement en question, tout en valorisant le collectif lors des victoires. Il sait quand il est important de prendre en compte les avis des autres et d'aller contre sa propre volonté ou son intérêt."
Bref, tout l'inverse de Tony Soprano, qui représente l'archétype du leader omniscient et omniprésent. Ce management à l'ancienne ne passe pas, en particulier auprès des nouvelles générations, en quête de transparence et de sens. S'affirmer en tant que leader passe notamment par un processus décisionnel clair et incontestable pour ses équipes, c'est-à-dire un processus qui définit précisément par qui et comment sont prises les décisions, selon Benoît Meyronin (Académie du Service) : "L'idéal est de ne rien imposer mais de coconstruire ses décisions avec ses N-1. Le temps passé à obtenir un consensus n'est jamais perdu : l'adhésion des salariés facilitera la mise en oeuvre. Les dirigeants doivent avoir le courage de partager le pouvoir et l'information, d'être transparents et de reconnaître qu'ils ne détiennent pas toutes les réponses."
Le culte du secret, en vigueur dans certaines entreprises, est contre-productif. "L'information n'est plus un indice du pouvoir mais la clé du partage, même si prudence et pédagogie restent requises : tout ne peut pas être dit et les collaborateurs peuvent comprendre que certains sujets demandent de la discrétion", ajoute Benoît Meyronin.
3. Oser laisser libre court à son intelligence émotionnelle, le secret du leader ?
"L'intelligence émotionnelle dont Rick Grimes fait preuve le conforte dans sa position de leader, écrit Oihab Allal-Cherif (Kedge Business School). L'émotion partagée et l'action commune créent de la solidarité et de la cohésion, ainsi qu'un attachement fort et une reconnaissance envers le leader. Le parcours de Rick Grimes démontre que les dimensions morale, émotionnelle et relationnelle du leadership sont plus déterminantes que les connaissances et les compétences."
Signes de faiblesse, freins à l'efficacité professionnelle, jugées déplacées ou perturbatrices, les émotions ont longtemps été persona non grata dans les entreprises. Pourtant, l'auto-censure émotionnelle est une norme à bannir. "Il faut casser le mythe : l'entreprise n'est pas le royaume de la sainte rationalité, défend Benoît Meyronin (Académie du Service). Certains dirigeants ont du mal à être dans le registre de l'émotivité. Or, un leader doit pouvoir être lui-même en entreprise. Il ne se fragilise pas en parlant de ce qu'il ressent. D'autant que les émotions, quand elles sont sincères, ont bien des vertus."
Mais attention car les émotions sont contagieuses. Si l'enthousiasme met en mouvement, le stress peut paralyser. Les émotions doivent être apprivoisées afin d'enrichir votre leadership. Le colérique Tony Soprano n'est donc pas un modèle à suivre ! "Exprimer ses émotions oui, les manifester non, souligne Benoît Meyronin. À froid, avec du recul, il est possible d'échanger et de débattre sur ce que l'on a ressenti. C'est un comportement sain."
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Dans tous les cas, un dirigeant se doit d'être exemplaire et de veiller à ce que ses collaborateurs le soient aussi. Ni le leadership, ni le management ne peuvent s'enseigner. "Cela se vit, s'expérimente, se construit, se discute, se nourrit... Finalement, les séries télévisées constituent de ce point de vue un formidable levier pour ouvrir des discussions, débattre et challenger les positions respectives autour de ces questions !" conclut Benoît Meyronin
De MacGyver à Mad Men, quand les séries TV enseignent le management est un ouvrage collectif codirigé par Benoît Aubert, directeur de l'ICD (Groupe IGS), et Benoît Meyronin, professeur à Grenoble Ecole de Management et associé fondateur de l'Académie du Service. Il est paru chez Dunod en août 2017.
Tarif : 19 € TTC.
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