Geoffroy de Becdelièvre, p-dg de Marco Vasco : "Grandir vite sans conserver ses clients, ça ne sert à rien"
Marco Vasco, spécialiste du voyage sur mesure sur Internet, a réalisé 70 millions d'euros de CA en 2017 et va se faire racheter par le groupe Figaro. Geoffroy de Becdelièvre, son CEO, revient sur le développement de sa société.
Je m'abonneMarco Vasco a réalisé 70 millions d'euros de CA en 2017. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Nous répondons à une double problématique : faire des voyages sur mesure qui ressemblent à nos clients, tout en offrant une facilité d'interaction grâce à Internet. Quand nous avons démarré en 2008, il y avait des pure players très matures, comme Opodo, Booking ou Go Voyage, qui vendaient des prestations basiques.
Il y avait aussi de beaux acteurs off line, comme notre concurrent Voyageurs du Monde. Mais il fallait se rendre rue Sainte-Anne, à Paris, ce qui pouvait être compliqué. Il y avait donc une place à prendre et c'est ce que nous avons fait.
Avant de créer Marco Vasco, vous étiez chez KPMG. Qu'est-ce qui vous a poussé à devenir entrepreneur ?
Nous sommes souvent inspirés par une personne. Personnellement, c'est François Lemarchand, fondateur de Pier Import, puis de Nature et Découvertes. Il m'a transmis cette envie d'entreprendre. Il faisait le tour du monde pour trouver ses fournisseurs et c'était très exotique.
Il a d'ailleurs été le premier à investir dans ma société à hauteur de 30 000 euros. Et puis, ma première vie professionnelle chez KPMG m'a apporté une compétence cruciale à tout entrepreneur : savoir compter ! C'est un prérequis de base.
C'était tout de même un pari risqué. En 2008, peu d'entreprises pensaient qu'il était possible de vendre des prestations haut de gamme sur Internet...
C'est très juste, mais nous avons un bon modèle économique. Nous utilisons Internet pour trouver nos clients puis, pour les rassurer, nos conseillers voyage entrent rapidement en contact par téléphone. Il y a alors des échanges qui durent environ 10 jours jusqu'à la proposition finale. C'est d'autant plus important que notre panier moyen tourne autour de 10 000 euros.
Après, le client est de plus en plus expert. Quand il veut aller dans un pays, il a déjà lu énormément de blogs et de guides. Il possède de nombreuses informations sur ce qu'il faut faire, ainsi que les lieux à visiter. Et lorsqu'enfin il se rend dans une agence "classique", il en connaît souvent bien plus sur sa destination que les conseillers sur place. Cette proximité offre du contact physique, mais elle n'apporte pas de création de valeur. Or, ce que recherchent vraiment les clients, c'est du conseil et de la sérénité.
Pouvez-vous décrire Marco Vasco en quelques chiffres-clés ?
Tout d'abord, le plus important : nous comptons environ 300 collaborateurs et c'est grâce à eux que l'entreprise fonctionne. Nous avons fait voyager plus de 100 000 personnes avec un taux de satisfaction proche de 95 %. En outre, notre taux de fidélisation est de 45 %, ce qui est énorme quand on sait qu'un client part, en moyenne, tous les deux ans au bout du monde. Enfin, et c'est peut-être le moins important, nous avons réalisé 70 millions d'euros de CA en 2017.
Vous avez aussi connu des taux de croissance incroyables...
Notre CA a doublé tous les ans depuis notre création. Mais grandir vite sans conserver ses clients, ça ne sert à rien. D'ailleurs, cela a peut-être été l'une de nos erreurs, car nous étions trop focalisés sur notre objectif de croissance. En mûrissant, nous avons compris que le plus important, c'est de conserver les personnes que nous avons déjà fait voyager.
Nous avons désormais un bon équilibre entre la captation de nouveaux clients et leur fidélisation. D'ailleurs, l'intéressement de tous nos collaborateurs, quel que soit leur service, porte sur la satisfaction de nos clients. L'indicateur-clé, c'est le NPS pour "Net Promoter Score" qui, pour nous, reflète vraiment la satisfaction des personnes qui voyagent avec nous.
Vous êtes positionnés sur un marché de niche qui n'est pas extensible à l'infini. La fidélisation n'est-elle pas forcément le nerf de la guerre ?
L'enjeu n'est pas sur le potentiel de croissance, même si notre marché ne concerne que 500 000 Français. Il est tout simplement économique. Le coût d'acquisition d'un nouveau client sur le digital est de plus en plus élevé. Dans notre secteur, il tourne autour de 400 euros. La fidélisation, quant à elle, permet de maîtriser ses coûts marketing, car elle est quatre fois moins chère. Ce sont des ratios cruciaux pour l'entreprise.
C'est aussi pour cela que nous développons de plus en plus le parrainage. Nos clients sont entourés de personnes qui leur ressemblent et qui sont, par conséquent, de potentiels prospects. Nous appelons ça le R & R pour "Repeat and Recommended". Et c'est un KPI que nous suivons de près.
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