Qui peut travailler le dimanche ?
La sortie progressive de la crise sanitaire devrait entraîner une normalisation du travail le dimanche, déjà facilité durant le confinement. Les dirigeants doivent anticiper la reprise par de nouvelles stratégies d'organisation. Le travail dominical répond à ce besoin de flexibilité accru.
Je m'abonneLe travail dominical s'est développé depuis la pandémie de Covid-19, notamment pour les entreprises qui ont été autorisées à poursuivre leur activité. Pour celles qui n'avaient pu ouvrir que durant l'été 2020, la gestion de l'afflux des clients, le respect de nouvelles contraintes sanitaires et la gestion des pics de fréquentation avaient contraint la plupart d'entre elles à envisager l'ouverture le dimanche, au moins de manière ponctuelle. Mais dorénavant, cette pratique devrait s'ancrer plus durablement dans l'organisation de beaucoup d'entreprises, notamment pour les commerces, bars et restaurants, qui pourront de nouveau ouvrir prochainement.
En effet, malgré les nombreuses mesures mises en place par le gouvernement, comme le report du paiement des charges sociales ou le financement d'une partie de l'activité partielle, elles font aujourd'hui face à d'immenses difficultés de trésorerie, lorsqu'elles n'ont pas fait faillite. C'est pourquoi elles souhaitent, de manière générale, un assouplissement du cadre légal du temps de travail, dont le travail le dimanche, pour " rattraper " une partie de leur chiffre d'affaires.
Vers le début d'un changement de paradigme ?
La loi Macron de 2015 avait déjà ouvert la voie à ce débat, en instituant des dérogations plus souples et en l'élargissant à de nouvelles catégories de zones le travail le dimanche. La période du confinement a été l'occasion d'assouplir les possibilités de manière temporaire à travers diverses ordonnances et décrets mettant en place de nouvelles dérogations liées à la situation sanitaire mais qui n'ont pas vocation à perdurer. Les entreprises attendent désormais un assouplissement durable du gouvernement pour redémarrer leur activité.
Une mise en oeuvre qui reste à faciliter
Actuellement, le Code du travail prévoit que les salariés ne peuvent pas travailler plus de six jours par semaine. Le repos hebdomadaire est donné le dimanche. Cependant, pour les besoins de la vie économique, deux types de dérogations sont admises :
- celles de droit, ne nécessitant aucune autorisation administrative
- celles subordonnées à une autorisation administrative.
Chaque salarié ainsi privé du repos dominical doit bénéficier d'une rémunération au moins doublée et d'un repos compensateur équivalent en temps.
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Qui bénéficie des dérogations de plein droit ?
Les dérogations de plein droit concernent certains établissements, dont le fonctionnement ou l'ouverture sont rendus nécessaires par les contraintes de la production, de l'activité ou les besoins du public : il s'agit notamment des activités de tourisme, récréatives ou de transport. Les salariés concernés ne perçoivent, en principe, aucune majoration ou compensation salariale pour les heures effectuées le dimanche. Sont également concernés les commerces de détail alimentaires ou de détail implantés dans certaines zones géographiques.
Qui peut bénéficier de dérogations administratives ?
Les dérogations administratives à caractère individuel et temporaire sont accordées par le préfet, celles à caractère collectif sont accordées par le maire.
Dans le premier cas, l'accord pour le travail le dimanche n'est jamais définitif. L'employeur doit octroyer à ses salariés des contreparties, qui sont prévues par accord collectif ou décision unilatérale approuvée par référendum. Les salariés doivent bénéficier également d'un repos compensateur et d'une rémunération au moins égale au double de celle due pour une durée équivalente en semaine.
Dans le second cas, il s'agit des " dimanches du maire " : la dérogation doit être prise après consultation des organisations d'employeurs et de salariés intéressées. Chaque salarié ainsi privé du repos dominical doit bénéficier d'une rémunération au moins doublée et d'un repos compensateur équivalent en temps.
L'importance de la négociation collective pour une transition commune
Les dérogations actuellement permises par le Code du travail se révéleront rapidement insuffisantes pour permettre une véritable reprise économique. Les salariés ont été financièrement touchés par des mois d'activité partielle et sont prêts aujourd'hui pour un bon nombre d'entre eux à travailler le dimanche. Il est donc indispensable de réduire les limitations existantes. Néanmoins, le recours au travail du dimanche ne peut se faire sans négociations locales et nationales, prévoyant des contreparties, financières, organisationnelles ou en termes de conditions de travail.
Pour en savoir plus
Aurélie Kamali-Dolatabadi est avocat associée et dirige le département droit du travail du cabinet Courtois Lebel
Marion Narran-Finkelstein est avocate au sein du département droit du travail du cabinet Courtois Lebel