Code du Travail : 9 mesures que le gouvernement veut faire passer
Présenté mercredi 28 juin 2017 en Conseil des ministres, le projet de loi d'habilitation autorisera le gouvernement à prendre des ordonnances pour simplifier le Code du travail. Au menu: accords d'entreprise, licenciement, télétravail, travail dominical et prélèvement à la source.
Je m'abonneLa ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a présenté mercredi 28 juin 2017 en Conseil des ministres le projet de loi d'habilitation qui permettra au gouvernement de prendre des ordonnances afin de réécrire le Code du travail.
Plutôt ambitieux, ce projet de loi prévoit une série de neuf mesures qui pourraient chambouler la vie des TPE et des PME.
1. Articuler les accords d'entreprise et les accords de branche
Le gouvernement souhaite éclaircir l'articulation entre l'accord de branche et l'accord d'entreprise. L'objectif est de renforcer le rôle de la branche dans sa fonction de régulation économique et sociale et de proposer davantage de capacité d'initiative à l'accord d'entreprise dans les autres domaines.
Les domaines de négociation seraient répartis en trois blocs. Le premier bloc serait constitué des domaines dans lesquels les accords de branche priment de manière impérative sur les accords d'entreprise. La branche prendrait ainsi la main sur les minima conventionnels, les classifications, la mutualisation des financements paritaires, la mutualisation des fonds de financement du paritarisme, de la formation professionnelle, des fonds de prévoyance, la complémentaire santé et les compléments d'indemnité journalière, la gestion et la qualité de l'emploi. La branche pourrait aussi s'emparer de la durée minimale du temps partiel et les compléments d'heures, de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, de la nouvelle régulation des contrats courts (CDD et CTT).
Mais également des conditions de recours au contrat à durée indéterminée de chantier. "En l'absence d'accord de branche spécifique, c'est la loi actuelle qui continuera de s'appliquer dans l'entreprise mais le Gouvernement souhaite que les branches se saisissent de la question", précise le ministère du Travail.
Le deuxième bloc serait constitué des domaines pour lesquels la branche peut décider, sans y être obligée, de faire primer son accord sur les accords d'entreprise. Les domaines concernent la prévention des risques professionnels et de la pénibilité, le handicap, ainsi que les conditions et les moyens d'exercice d'un mandat syndical, la reconnaissance des compétences acquises et les évolutions de carrière.
Le troisième bloc comprendrait des domaines non listés dans les deux précédents blocs. Dans ces domaines est accordée une primauté à l'accord d'entreprise. Cela signifie que lorsqu'il existe à la fois un accord d'entreprise majoritaire et un accord de branche sur la même thématique, c'est l'accord d'entreprise qui prime. Néanmoins, lorsqu'il n'existe pas d'accord d'entreprise, c'est l'accord de branche qui s'applique.
2. Simplifier le dialogue social
Le gouvernement entreprend de fusionner en une seule instance les délégués du personnel, le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et définir les conditions de mise en place, la composition, les attributions et le fonctionnement de cette instance.
L'ordonnance vise également à mettre en place une nouvelle organisation du dialogue social dans l'entreprise, et à faire progresser les prérogatives des représentants du personnel. Elle souhaite également permettre aux salariés d'apporter des ressources au syndicat de leur choix, en renforçant la formation des représentants des salariés.
Le rôle des commissions paritaires régionales interprofessionnelles pourrait par ailleurs être renforcé. Créées par la loi Rebsamen et définitivement mises en place le 1er juillet 2017, ces commissions ont pour but de représenter les nombreux salariés des TPE qui ne le sont pas aujourd'hui dans les entreprises de moins de 11 salariés
3. Limiter les indemnités prud'homales
Le projet de loi prévoit de favoriser la conciliation prud'homale. La barémisation des dommages et intérêts, notamment en fonction de l'ancienneté, - et non des indemnités de licenciement - permettra par ailleurs une plus grande équité et redonnera confiance aux employeurs et aux investisseurs, notamment dans les TPE et PME.
4. Encadrer les licenciements économiques
Il est également prévu de modifier les dispositions relatives au licenciement pour motif économique en définissant le périmètre d'appréciation de la cause économique. Des dispositions seront prises afin de prévenir ou tirer les conséquences de la création artificielle ou comptable de difficultés économiques à l'intérieur d'un groupe à la seule fin de procéder à des suppressions d'emploi. Le texte précise aussi les conditions dans lesquelles l'employeur satisfait à son obligation de reclassement.
Le gouvernement souhaite par ailleurs réduire les délais de recours en cas de rupture du contrat de travail, clarifier les obligations de l'employeur en matière de reclassement pour inaptitude et sécuriser les modalités de contestation de l'avis d'inaptitude.
5. Favoriser le télétravail
Le télétravail sera favorisé par des règles plus claires pour permettre une plus grande sécurité pour les salariés comme leur employeur.
6. Étendre le travail dominical
Le délai accordé aux commerces situés dans les zones touristiques et commerciales sera prolongé.
7. Lutter contre le travail détaché
Le projet de loi prévoit de modifier la législation applicable et les obligations qui incombent aux employeurs en matière de détachement des travailleurs, en l'adaptant aux spécificités et contraintes de certaines catégories de travailleurs transfrontaliers.
8. Revoir le compte pénibilité
Sans aucune surprise, puisque Edouard Philippe l'avait annoncé début juin, le gouvernement souhaite modifier les règles de prise en compte de la pénibilité au travail, en adaptant les obligations de déclaration des risques professionnels, les conditions d'appréciation de l'exposition à certains de ces facteurs, les modes de prévention, les modalités de compensation de la pénibilité ainsi que les modalités de financement des dispositifs correspondants.
9. Décaler le prélèvement à la source d'un an
Le projet de loi a enfin pour objet, conformément à l'annonce faite par le Premier ministre mercredi 7 juin 2017, d'habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires pour décaler d'un an, soit au 1er janvier 2019, l'entrée en vigueur du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu.
La série de concertations, qui a débuté avec les partenaires sociaux le 9 juin, va se poursuivre. Du 26 juin au 7 juillet sont ainsi programmées des réunions sur le thème de la simplification et du renforcement du dialogue économique et social et de ses acteurs. Viendront ensuite, du 10 au 21 juillet, les discussions autour de la sécurisation des relations de travail. Le texte devrait être examiné et voté au Parlement durant l'été. Après les ultimes concertations et leur examen en Conseil des ministres, les ordonnances seront publiées d'ici la fin de l'été.