Quelle segmentation pour ses comptes stratégiques ?
Ce n'est pas tout de vouloir mettre en place des comptes stratégiques, encore faut-il savoir les sélectionner. Lors de la conférence de l'Association des Key Account Managers (AKAM), le professeur Sisti, professeur de marketing et de vente à la Bocconi, a donné quelques indications.
Je m'abonneQuel compte peut être considéré comme un compte stratégique ? Cette épineuse question, toutes les entreprises souhaitant mettre en place un système de gestion des comptes stratégiques, ou key account management (KAM), doivent se la poser. En effet, la segmentation est indispensable pour déterminer quels comptes méritent d'être catégorisés comme stratégiques.
Pour le professeur Marco Sisti, de l'école de management de l'université italienne Bocconi, la segmentation des comptes stratégiques repose sur trois piliers : l'identification de la stratégie globale de l'entreprise, une connaissance accrue des données clients, notamment via le CRM, et l'utilisation d'outils d'analyse.
1. Lier la segmentation à la stratégie de l'entreprise
"De nombreuses entreprises sélectionnent les comptes stratégiques en fonction de critères classiques, tels que les revenus, la taille ou le potentiel. En réalité, les critères adéquats dépendent de nombreux facteurs, mais le point de départ, c'est la véritable stratégie de l'entreprise", explique le professeur.
Lire aussi : La Minute Du Boss : Anticiper les soldes de janvier 2025 après les ventes flash post Noel !
En effet, selon que l'entreprise vise une croissance forte, une amélioration de son image ou un positionnement précis sur son marché, les clients stratégiques ne seront pas les mêmes.
En fonction de cette stratégie, l'entreprise peut décider de confier aux KAM (key account managers) uniquement les entreprises d'un certain secteur géographique, par exemple si elle souhaite s'y implanter ; uniquement les entreprises d'une certaine industrie, ou alors ceux qui opèrent à travers un canal de distribution en particulier, ou qui s'adressent à un certain type de clients.
Il est également possible de confier aux KAM les comptes achetant une certaine catégorie de produits, ou une certaine marque. Et il est bien sûr possible de restreindre le nombre de comptes stratégiques en combinant plusieurs de ces critères.
2. Exploiter les données client
Les données recueillies sont évidemment utiles pour déterminer ses comptes stratégiques. Pour le professeur Sisti, si elles sont importantes, il ne faut pas se fier uniquement aux données internes à son entreprise. En d'autres termes, il faut aussi prendre en compte celles qui correspondent à la relation entre une entreprise et son client : volume de vente, taux de rentabilité, durée de la relation, conditions de vente, efforts commerciaux, satisfaction client. Ces données ne disent rien du profil client en lui-même, mais permettent simplement de savoir quelle a été la place du client dans la performance commerciale passée de l'entreprise.
Les données externes sont autant, si ce n'est plus, importantes pour bien segmenter ses comptes stratégiques. Elles permettent de cerner le profil de ses clients et prospects, ainsi que leur potentiel à plus long terme : taux de croissance, étendue géographique, attractivité des marchés sur lesquels ils opèrent, investissements stratégiques, positionnement concurrentiel, culture, politique d'achat, image... Ces caractéristiques sont souvent sous-estimées par les entreprises, mais permettent pourtant de comprendre si un client peut devenir un compte stratégique pour son entreprise.
3. Utiliser les bons outils d'analyse
Plusieurs outils aident aussi à classifier ses comptes en stratégiques ou non. L'un des plus connus est la matrice ABC, qui classifie les comptes selon la part de chiffre d'affaires qu'ils apportent à l'entreprise. Mais le professeur Sisti rappelle que celui-ci ne permet qu'une segmentation limitée : les 20% de comptes qui permettent de réaliser 80% de son chiffre d'affaires ne sont pas forcément tous stratégiques. En effet, cette analyse se base sur une performance présente ou passée, et ne dit rien de l'évolution future du compte.
Il est donc judicieux de recourir à des matrices plus sophistiquées, qui permettent une représentation de plusieurs indicateurs croisés. Analyser les performances passées d'un compte et son potentiel permet par exemple de faire la différence entre les comptes les plus stratégiques, les comptes stratégiques potentiels, et les comptes stratégiques qui risquent de décliner, afin de pouvoir adapter sa stratégie KAM en conséquence.