Histoire d'entreprise : la chute de Vidéo Futur
Retour sur l'enseigne de location de DVD, qui a été le leader de son secteur d'activité en France avant de connaitre une descente aux enfers rapide et un rachat. Décryptage d'un succès fulgurant, d'une chute prévisible et de ses enseignements.
Je m'abonneVidéo Futur était le loueur de DVD numéro un en France au début des années 2000. Face à la montée fulgurante des plateformes de streaming, l'enseigne a dû fermer ses portes, laissant une clientèle et des employés passionnés sur le carreau. Retour vingt ans en arrière, au moment où les services de locations physiques prospéraient.
Une époque révolue : la location physique de DVD
Dans le paysage culturel des années 80 et 90, la notion de "sortie au vidéoclub" était aussi courante que celle de "sortie au cinéma". Le concept était novateur : plutôt que d'attendre des mois voire des années pour que les films sortis en salle soient diffusés à la télévision, les ménages pouvaient les louer et les regarder chez eux, à un coût modique. Dans ce contexte, le premier vidéo club de la chaîne a ouvert à Sartrouville (Yvelines) en 1982, créé par Gilles Darnois.
Vidéo Futur, avec ses cassettes VHS puis ses DVD, s'est inscrit dans cette mouvance. Les débuts de l'entreprise coïncidaient avec la popularisation des magnétoscopes dans les foyers. Ces appareils, autrefois coûteux et réservés à une élite, sont rapidement devenus accessibles au grand public, créant ainsi une demande croissante pour la location de films.
Le succès de Vidéo Futur résidait aussi dans sa capacité à offrir une expérience complète. Les clients venaient discuter avec le personnel des dernières sorties, lire les critiques affichées sur les murs. En somme, Vidéo Futur était bien plus qu'un simple lieu de location de films. C'était un espace social, un repère culturel, et pour beaucoup, un rituel du week-end.
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De plus, l'entreprise a su tirer parti des évolutions technologiques. Avec l'arrivée du DVD dans les années 90, Vidéo Futur a rapidement adapté son stock, offrant à ses clients une qualité d'image et de son supérieure à la VHS. Cette transition a également permis de proposer des films avec des bonus, des commentaires et d'autres fonctionnalités qui ajoutaient de la valeur à l'expérience de location. En 2002, l'entreprise comptait plus de 400 magasins, d'après un article de l'Express. Dans ce reportage, Franceinfo revient sur le phénomène des vidéoclubs :
La révolution du streaming : la transition manquée de Vidéo Futur
À la fin des années 90 et au début des années 2000, la technologie Internet a connu une croissance exponentielle. Les connexions à haut débit sont devenues plus accessibles, ouvrant la porte à de nouvelles façons de consommer du contenu. C'est dans ce contexte qu'est née la révolution du streaming.
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Face à la montée en puissance du streaming, Vidéo Futur a compris qu'une évolution était nécessaire pour rester pertinent. En réponse, l'entreprise a lancé plusieurs initiatives pour se digitaliser, notamment en essayant de mettre en place sa propre plateforme de streaming. En 2011, Video Futur a dévoilé une offre de cinéma par abonnement, permettant aux abonnées de recevoir par la poste les films seulement neuf mois après leur sortie en salle. L'offre comprenait des prix attractifs sur la plateforme de streaming de Vidéo Futur. Par ailleurs, sa plateforme a été relancée auprès du grand public en 2021. Composé de 15 000 programmes à son lancement, elle a pour but de mettre en avant les productions françaises.
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Mais la transition vers le numérique a été douloureuse. D'une part, la concurrence était déjà bien établie avec des acteurs majeurs ayant une longueur d'avance tant en termes de technologie que de contenu. D'autre part, Vidéo Futur devait gérer sa transition tout en essayant de préserver sa base de clients fidèles habitués à la location physique.
De plus, établir des partenariats avec des studios et des producteurs pour enrichir le catalogue de leur plateforme s'est avéré être un défi majeur. Les géants du streaming avaient déjà sécurisé des accords exclusifs, laissant peu d'options attrayantes pour Vidéo Futur. Plus besoin de se déplacer pour louer ou acheter un film, et fini les pénalités pour retours en retard. Netflix, à l'origine un service de location de DVD par correspondance, a été parmi les premiers à saisir cette opportunité.
Dans cette vidéo publicitaire publiée en 2010, les internautes découvrent le magasin Vidéo Futur de Toulouse.
Vidéo Futur : La fin d'une ère
Alors que Vidéo Futur luttait pour trouver sa place dans le paysage numérique, le marché du streaming devenait de plus en plus saturé. Des entreprises multinationales, dotées de ressources considérables, ont décidé d'entrer dans la course. Vidéo Futur a lancé son service de streaming, permettant aux utilisateurs d'accéder instantanément à des milliers de films et de séries TV payantes.
Cependant, cette transformation n'a pas suffi pour faire face aux géants du streaming. À la fin des années 2000, l'entreprise constatait une perte de 20 % de son chiffre d'affaires par an. En seulement quelques années, le nombre de vidéoclubs de Vidéo Futur a diminué de moitié. Ainsi, en 2008, l'enseigne a été racheté par Netgem, un fabricant de décodeur, transformant Vidéo Futur en une offre de box internet. Depuis 2017, la marque est devenue un fournisseur d'accès à internet.
La chute de Vidéo Futur marque la fin d'une institution. L'entreprise, autrefois un pilier de la culture populaire, a succombé aux changements rapides de l'industrie du divertissement. En 2023, il reste un dernier vidéoclub Vidéo Futur en France. Située à Savigny-sur-Orge (Essonne), la boutique compte encore 450 abonnés réguliers, selon un reportage de TF1.
Toutefois, cette histoire rappelle l'importance de l'adaptabilité et de l'innovation dans le monde des affaires. Les entreprises doivent constamment surveiller leur environnement, être prêtes à pivoter et à évoluer en fonction des besoins changeants des consommateurs.
Par ailleurs, Konbini permet aux internautes de redécouvrir les vidéoclubs. Le média réalise un format vidéo dans un vidéoclub à Paris, où des acteurs et des réalisateurs présentent leurs films préférés.
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