Budget 2024 : fin des cadeaux fiscaux pour les entreprises
Suppression progressive de la CVAE, crédit d'impôt industrie verte, modification du régime de la franchise en base de TVA... Tour d'horizon des principales mesures du projet de loi de finances 2024 qui pourraient impacter les entreprises.
Je m'abonneLa croissance devrait être faible en 2023 (+ 1,0 %), mais s'améliorer en 2024 (+ 1,4 %). Le gouvernement, contraint par le nécessaire retour à la maîtrise des comptes publics, fait toutefois le choix de la stabilité dans son budget 2024, plutôt que des cadeaux fiscaux aux entreprises. « Nous devons répondre à un triple défi, a souligné Bruno Le Maire, ministre de l'Economie et des Finances, mercredi 27 septembre 2023 lors de la présentation du Projet de loi de finances 2024. La crise inflationniste la plus grave depuis les années 1970, l'impératif catégorique de désendetter le pays, et la nécessité d'investir dans les missions régaliennes, l'écologie et l'éducation. »
Le PLF 2024 acte la fin de la baisse massive des impôts. La diminution de la CVAE (Cotisation sur la Valeur Ajoutée des Entreprises) promise lors du précédent quinquennat va se poursuivre mais à un rythme plus lent qu'acté l'année dernière. Le taux de cet impôt local s'élèverait en 2024 à 0,28 % contre 0,375 % en 2023. La disparition serait progressive, avec des taux minimums de CVAE de 0,19% et 0,09% pour 2025 et 2026.
Pour mémoire, la loi de finances 2023 avait réduit de moitié le taux de la CVAE, en actant sa suppression totale à compter du 1er janvier 2024. Finalement, et en ligne avec les annonces gouvernementales, le PLF 2024 prévoit d'échelonner sur 4 ans la suppression de la CVAE pour une suppression totale en 2027. « Le PLF prévoit par ailleurs la suppression du montant forfaitaire minimum de 63 euros de la CVAE. 300 000 entreprises seraient concernées par ce petit cadeau fiscal », note Alice de Massiac, avocate associée au sein du cabinet Deloitte Société d'Avocats.
Cette disparition progressive de la CVAE a pour conséquence de diminuer les dotations des chambres de commerce et d'industrie (CCI). Le PLF prévoit en effet un versement de 500 millions d'euros à CCI France l'an prochain, contre 525 millions cette année. Le tout s'inscrivant dans une «trajectoire de baisse progressive échelonnée jusqu'en 2027». Une mesure qui ne passe pas du côté des CCI. « Les TPE-PME voient les crises se succéder d'année en année, avec des perspectives inflationnistes et de croissance molle. Et elles n'ont jamais eu autant besoin d'accompagnement, au moment où elles s'engagent dans le grand défi des transitions écologiques et numériques », a déclaré Alain Di Crescenzo, président de CCI France.
Encourager l'innovation verte
L'État veut encourager les investissements dans l'innovation verte des entreprises, notamment grâce aux financements massifs de France 2030. Ces investissements seront complétés par la mise en place d'un "crédit d'impôt investissement industries vertes" (C3IV), destiné aux entreprises qui investissent jusqu'en 2025 dans les industries du photovoltaïque, de l'éolien des batteries électriques et des pompes à chaleur. «Ce crédit d'impôt représentant 20% de leurs investissements (jusqu'à 60 % pour les petites entreprises dans certaines zones) dans des technologies de demain sera subordonné au fait que l'entreprise s'engage à maintenir les emplois en France. Les sociétés qui veulent relocaliser une activité basée à l'étranger ne pourront bénéficier de ce dispositif», commente Alice de Massiac.
Une autre mesure phare de ce PLF a été introduite par l'article 10 du projet de loi de finances pour 2024. Il transpose la directive du 18 février 2020 sur la franchise en base de TVA pour les PME à partir du 1er janvier 2025. Le principal changement consiste en la possibilité pour les entreprises établies dans un État membre de l'Union européenne (UE) de bénéficier du régime de la franchise pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services réalisées, non seulement dans leur État d'établissement mais également dans les autres États membres, à condition de ne pas dépasser un plafond annuel de chiffre d'affaires dans l'UE de 100 000 euros.
De possibles amendements
Le PLF offre par ailleurs la possibilité pour l'Administration de remettre en cause dans un délai de 6 ans le prix de cession entre deux sociétés du même groupe des actifs incorporels difficiles à évaluer. « Aujourd'hui, lorsqu'on cède un actif incorporel difficile à évaluer à défaut de comparables disponibles, qui a du potentiel mais sur lequel on ne dispose pas de recul, l'administration peut remettre en cause le prix retenu sur la base des éléments disponibles au jour de la transaction. Demain, elle pourrait remettre en cause le prix de cession de cet actif considérant qu'il a été surévalué sur la base de résultats postérieurs à l'exercice au cours duquel a eu lieu la transaction, et ce dans un délai de 6 ans », détaille Alice de Massiac.
Reste à voir comment ce projet de loi sera accueilli par les oppositions. Une fois adopté en Conseil des ministres, le projet est discuté au Parlement à compter d'octobre et voté au plus tard le 31 décembre. « Le débat promet comme l'année passée d'être riche. De nombreux amendements devraient d'ailleurs être portés au cours de l'examen, comme le sujet de la flat tax de 30% qui pourrait être augmentée ou le rachat d'actions par les entreprises », estime Alice de Massiac.
Le gouvernement serait prêt à accepter des amendements dans le projet de loi de Finances (PLF) 2024, destinés à « avancer » sur le sujet des rachats d'actions, selon le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave. «Tous les groupes politiques m'ont interpellé sur la question des rachats d'actions, c'est-à-dire quand une entreprise utilise ses bénéfices pour racheter ses actions : ça peut être une pratique courante, mais aussi parfois une manière d'enlever du bénéfice qui aurait pu être redistribué aux salariés», a estimé fin septembre le ministre.