Préfinancement du Cice: les premiers effets pervers apparaissent
De nombreuses PME dénoncent les conditions de préfinancement du Cice et les taux d'intérêts onéreux proposés par Oséo. Ce dispositif, qui est une avance de trésorerie immédiate mise en place par le gouvernement, a pourtant pour objectif d'offrir une bulle d'oxygène aux entreprises.
Je m'abonneDevant le succès rencontré par le préfinancement du Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (Cice) auprès des grandes entreprises, Oséo a ouvert ce dispositif à l'ensemble des structures, quelle que soit leur taille, à compter du 5 avril 2013. Deux mois à peine après la mise en place de cet outil, qui est en fait un avantage sur trésorerie sur votre Cice futur, les premiers effets pervers apparaissent.
Un premier défaut provient des taux d'intérêts proposés par Oséo. Selon Geoffroy Roux de Bézieux, candidat à la présidence du Medef, le dispositif est encore "peu souscrit par les petites entreprises, car les taux d'intérêt dépendent de la notation de la banque de France. En clair, si les sociétés qui font appel au préfinancement ont une mauvaise note, elles devront payer plus cher. Une démarche qui n'est pas illogique en soi. Cela pose problème dans la mesure où le dispositif a pour objectif de consolider la trésorerie des entreprises en difficulté".
L'exemple de Philippe Pellerin, dirigeant de Bericap France, une entreprise de 250 salariés spécialisée dans la conception de bouchons, est symptomatique. Il a rencontré début avril un conseiller d'Oséo et demandé un crédit de 200 000 euros pour renforcer sa trésorerie, faciliter ses lignes de crédit et payer ses fournisseurs à temps. "Oséo semblait désorienté et peu préparé à la mise en place du dispositif. L'organisme nous a annoncé un taux situé entre 3 et 5 % mais nous n'avons jamais eu de retour écrit de leur part", explique Philippe Pellerin. Une réponse plutôt mal perçue par le dirigeant. "Les prêts sont aujourd'hui historiquement bas. Ils ne devraient pas dépasser les 3 %", s'étonne-t-il. Face au manque d'information, Philippe Pellerin s'est donc tourné vers sa banque, qui lui a accordé pour sa demande de crédit, un taux de 3 %.
Des zones d'ombre autour du calcul
Des propos qui étonnent Éric Champenois, directeur gestion du financement court terme au sein d'Oséo, interrogé à l'occasion de la présentation du préfinancement du Cice le 28 mai. "Le taux d'intérêt pris en compte est le principal taux interbancaire en zone euro, à savoir l'Euribor. Il n'est donc pas possible d'obtenir des taux supérieurs à 4,12 %", explique-t-il. Les taux affectés s'appuient également sur "la taille et de la qualité des entreprises", précise-t-il.
Au regard des frais de dossiers qui s'élèvent à 150 euros, une petite structure dont la trésorerie est tendue n'aurait donc pas grand intérêt à faire appel au dispositif. "Si un dirigeant nous demande un financement à hauteur de 1 000 euros, on le décourage de le faire. La solution la moins coûteuse étant de se rapprocher de sa banque, qui peut proposer des taux d'intérêts plus attractifs", concède Éric Champenois (Oséo).
Deuxième difficulté pointée par le Medef : la complexité du préfinancement du Cice. "Si le dispositif se calcule en fonction de la masse salariale N-1, certains éléments, comme les heures supplémentaires, peuvent rendre l'estimation complexe pour l'année suivante. De nombreuses entreprises sont donc dans l'incertitude et ne peuvent calculer précisément le montant de leur crédit d'impôt", poursuit Geoffroy Roux de Bézieux. De plus, les délais d'octroi du crédit sous trois semaines annoncés par Oséo ne seraient pas respectés.
De nombreuses interrogations qui incitent les TPE et les PME à la vigilance ou, tout simplement, découragent les entreprises candidates. L'objectif du gouvernement de préfinancer deux milliards d'euros en 2013 pourrait ainsi ne pas être tenu.