Intervention du fournisseur sur les prix pratiqués par ses revendeurs : un droit très limité
Le fournisseur qui distribue ses produits à des revendeurs ne peut pas leur imposer de pratiquer un prix de revente fixe ou minimal. En revanche, il peut leur conseiller un prix de revente ou fixer un prix maximal. Explications.
Je m'abonneUn fournisseur peut être tenté d'imposer à ses distributeurs sa politique tarifaire pour la revente des produits qu'il leur a fournis. Il pourrait leur demander d'appliquer des prix à la revente lui paraissant appropriés, afin d'homogénéiser les prix quel que soit le revendeur et maintenir des prix à un certain niveau correspondant à l'image du produit. L'objectif peut également être, en limitant la concurrence entre revendeurs, de s'assurer de la rentabilité et donc de la pérennité de son réseau de distribution.
Inversement, le but pourrait être de faire pratiquer une politique de prix bas afin de maximiser les ventes. Cependant, le principe est que le distributeur qui achète les produits auprès d'un fournisseur pour les revendre à sa clientèle est libre de sa politique tarifaire. L'intervention du distributeur sur les prix pratiqués par les revendeurs doit donc être très limitée.
Imposer un prix fixe ou minimum à un distributeur est interdit
Un fournisseur ne peut imposer à l'acheteur de ses produits un prix fixe ou minimum à appliquer lors de leur revente. Il ne peut donc pas lui indiquer un prix, ni lui demander de ne pas vendre le produit en-dessous d'un certain prix. Dès lors, le fournisseur ne doit pas reprocher à un revendeur des prix trop bas ni lui demander de relever ses prix. Il ne peut pas davantage sanctionner un distributeur qui ne respecterait pas sa politique de prix en limitant ses approvisionnements ou en lui supprimant telle ou telle prime commerciale.
Obliger un revendeur à garder une marge commerciale minimale entre son prix d'achat et son prix de revente est interdit de la même façon. Le fournisseur ne peut et ne doit pas non plus donner suite à des demandes de revendeurs se plaignant qu'un de leurs concurrents leur ferait du tort avec des prix trop bas.
Il existe cependant une exception légale à l'interdiction pour un fournisseur de fixer un prix minimum de revente. En effet, la loi Lang de 1981 impose aux détaillants de vendre les livres entre 95 % et 100 % du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur, sauf dérogations (club de livres, livres édités ou importés depuis plus de deux ans,...).
Le fournisseur peut imposer en revanche un prix maximal à ses revendeurs
Le fournisseur est en droit d'imposer à ses revendeurs de ne pas aller au-delà d'un certain prix lors de la revente des produits. Il peut donc fixer un prix maximal de revente. Les revendeurs sont ainsi libres de vendre les produits à un prix moins élevé, mais ils ne peuvent pas les vendre au-delà du prix fixé par le fournisseur.
Un prix peut également être conseillé par le fournisseur
La pratique du prix conseillé est assez courante. Le fournisseur diffuse des prix conseillés afin d'aider ses revendeurs à positionner leur prix de vente. Dans ce cas, les revendeurs sont libres de pratiquer ou de ne pas pratiquer le prix conseillé ou indicatif. Lorsque des barèmes de prix conseillés sont diffusés par le fournisseur auprès de ses revendeurs, il est important de spécifier qu'il s'agit de prix conseillés ou indicatifs.
Lire aussi : Flotte auto : comment réduire la facture ?
Cependant, un prix conseillé ne doit pas être en réalité un prix imposé déguisé. En effet, la tentation peut être grande pour un fournisseur d'imposer sa politique tarifaire sous couvert de prix conseillé. Un prix minimal de revente imposé reste interdit quelle que soit qualification formelle. Il en irait ainsi si les revendeurs n'appliquant pas le prix conseillé par le fournisseur étaient sanctionnés (suppression de bonus, conditions d'achat défavorables accordées par le fournisseur, menaces du fournisseur d'arrêter les livraisons,...).
Quelles sanctions ?
La fixation d'un prix minimal de revente ou d'un taux de marge minimal est sanctionnée d'une amende pénale de 15 000 € maximum pour une personne physique et de 75 000 € maximum pour une personne morale (une société par exemple).
En outre, si une pratique de prix imposés est qualifiée d'entente anticoncurrentielle (accord entre un fournisseur et ses revendeurs afin de mettre en oeuvre une pratique de prix uniforme), une amende civile pouvant aller jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires des entreprises parties à l'entente pourrait être infligée par l'Autorité de la concurrence.
Enfin, le revendeur qui aurait été entravé dans son commerce par les directives de son fournisseur serait en droit de solliciter des dommages et intérêt à concurrence du dommage subi.
Pour en savoir plus
Xavier Henry & André Bricogne