Insufflez un esprit Scop dans votre entreprise

En ce mois de novembre 2014 placé sous le signe de l'économie sociale et solidaire (ESS), pourquoi ne pas, vous aussi, insuffler un esprit Scop dans votre entreprise ? Les Scop, ces sociétés coopératives et participatives, sont soumises, comme les autres, à l'impératif de profitabilité. Mais elles bénéficient d'une gouvernance démocratique et d'une répartition des résultats prioritairement affectée à la pérennité des emplois et du projet d'entreprise. Surtout - détail important - les salariés sont les associés majoritaires. Résultat : les Scop bénéficient d'équipes impliquées, motivées, responsables et performantes, qui boostent les résultats de l'entreprise, valorisent son image et attirent les talents.

Cet état d'esprit est-il transposable dans une entreprise classique ? "Dans une Scop, décrit Patricia Lexcellent, déléguée générale de la Confédération générale des Scop, les salariés sont associés aux décisions stratégiques. Dans une entreprise lambda, pour s'approcher de ce modèle, il faut apporter une information complète et claire aux salariés sur la situation de l'entreprise, afin de nourrir une réflexion commune sur son avenir. Une démarche qui aura pour conséquence une forte mobilisation des salariés, qui comprendront mieux les enjeux et les options possibles. C'est le coeur de l'esprit Scop."

Un management agile

Au-delà de cette implication dans les décisions, Pascal Christin, consultant formateur pour CSP Formation, coach et formateur en management, considère qu'il faut donner le pouvoir à tous les salariés pour que la confiance et l'éthique s'installent. "Il s'agit vraiment de faire un saut quantique dans les entreprises. Depuis Taylor, au début du XXe siècle, l'entreprise est managée selon un système pyramidal. Dans une Scop, le dirigeant est choisi par ses salariés."

Pour lui, qui a été, formé au management agile et qui s'intéresse à l'holacratie - une organisation comparable aux cellules d'un organisme, qui sont à la fois autonomes et dépendantes de cet organisme qu'elles contribuent à édifier -, le maître mot est la confiance : "Je fais confiance à mon équipe, je la responsabilise et je la laisse agir. Une synergie s'installe, les salariés, considérés, vont s'impliquer."

Concrètement, le dirigeant doit se dire qu'il n'a pas les pleins pouvoirs. "Dans la plupart des entreprises, reprend l'expert, les dirigeants font semblant de consulter leurs salariés, mais les dés sont pipés, et les salariés ne sont pas dupes. Alors que si j'écoute mes collaborateurs et que je les implique vraiment, la frustration disparaît au profit d'une meilleure qualité de travail. Les gens ne sont pas des idiots et ne vont pas se mettre à faire n'importe quoi, sinon l'entreprise meurt, et ils le savent bien."

Faire (vraiment) confiance

Pour introduire ou réintroduire la confiance, vous pouvez commencer par monter un groupe de travail en disant aux participants qu'il sera tenu compte de leurs décisions pour le projet en question. Et, bien sûr, les mettre en oeuvre. Une stratégie qui doit ensuite être déclinée sur toute l'entreprise. "L'humain doit être au coeur des préoccupations. C'est lui qui fait fonctionner l'entreprise", reprend Pascal Christin.

Une vision largement partagée par Gérard Baracska, conseiller et coach de dirigeants et de managers, pour qui la confiance est également au coeur du sujet. "On ne peut rien faire dans une entreprise sans la confiance. L'autorité par la pression est contre-productive. Il s'agit de mettre les salariés en confiance en utilisant leurs compétences, en leur confiant des responsabilités, en les associant à des projets, en reconnaissant le travail, bref, en nourrissant les forces, qui vont se démultiplier..."

L'expert pointe également le manque de compétences de nombre de managers attachés à leur rôle de chef, mais pas seulement : "L'entreprise exerce une responsabilité dans sa façon de demander aux cadres de conduire leurs équipes." Pour insuffler l'esprit Scop dans votre entreprise, il faut donc changer, radicalement, et faire taire ses peurs. "Les salariés, c'est le trésor de l'entreprise, insiste Gérard Baracska. Et tout le monde cherche à donner du sens à sa vie..."

Salariés actionnaires, transmission facilitée

Parmi les autres fondamentaux transposables de la Scop, le partage du profit. Une participation aux résultats peut être mise en place dans une entreprise classique.

"La notion d'ancrage territoriale est importante dans le cas d'une Scop", souligne Patricia Lexcellent. Dans les Scic (Société coopérative d'intérêt collectif), l'une des deux formes de la Scop, collectivités locales ou utilisateurs sont même intégrés dans la gouvernance. L'adhésion à une dynamique locale que partagent bon nombre de PME, mais qui mérite d'être poussée plus loin pour muscler l'innovation : en créant une association d'utilisateurs, par exemple, qui serait source de suggestions pour améliorer le produit ou le service, ou en créant un partenariat avec les collectivités à travers une politique RSE locale...

Enfin, dans une Scop, l'actionnariat salarié constitue un véritable atout pour la pérennité de l'entreprise. "Dans une entreprise classique, il est possible d'ouvrir un accès à l'actionnariat salarié. C'est quelque chose qui se voit plus dans les structures de taille importante mais qui serait un vrai gage de pérennité dans les PME. Et qui permettrait d'accompagner la transmission quand la famille ne prend pas le relais", conclut la déléguée générale de la CG Scop.