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Clause de non-concurrence : attention à la jurisprudence récente

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Clause de non-concurrence : attention à la jurisprudence récente

La clause de non-concurrence doit être justifiée par la nécessaire protection des intérêts de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace et assortie d'une contrepartie financière. Des décisions récentes apportent des précisions dont il faut tenir compte lors de la rédaction et de sa levée.

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Pour être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, la clause de non-concurrence ne doit pas nécessairement préciser les risques concurrentiels encourus.

La Cour de cassation a récemment précisé que même si la clause doit effectivement être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, elle n'avait pas pour autant à prévoir, pour être licite, les risques concurrentiels encourus par l'entreprise qui justifient la clause(1).

La clause de non-concurrence ne peut pas non plus viser le « monde entier ». La Cour considère qu'une telle clause n'est pas délimitée dans l'espace et qu'elle est donc nulle(2).

Il n'est pas possible de déroger contractuellement aux prescriptions de la Convention collective, dans un sens moins favorable au salarié. Si la convention collective applicable impose de lever la clause de non-concurrence par écrit, avec l'accord de l'intéressé, alors l'employeur doit obtenir l'accord du salarié pour lever la clause, nonobstant les dispositions du contrat prévoyant la faculté pour l'employeur de la lever unilatéralement.

La Cour ajoute également que le prononcé de la liquidation judiciaire ne libère pas de plein droit le salarié de son obligation de non concurrence(3) .

La clause de non-concurrence n'est pas une clause pénale, dont la contrepartie pourrait être réduite par le juge. Elle ne constitue pas une indemnité forfaitaire prévue en cas d'inexécution d'une obligation contractuelle(4).

Les modalités contractuelles propres à la levée de la clause de non-concurrence

Les modalités contractuelles propres à la levée de la clause de non-concurrence sont impératives. Dès lors que le contrat de travail prévoit que la clause de non-concurrence doit être levée par recommandé avec accusé de réception, il ne peut être suppléé à cette formalité par un simple email, quand bien même il est démontré que le salarié était informé de la levée de la clause(5).

Dans le cadre d'une rupture conventionnelle, l'employeur peut lever la clause de non-concurrence au plus tard à la date du départ effectif du salarié de l'entreprise. La Cour avait déjà eu l'occasion d'affirmer qu'en cas de dispense de préavis, la clause de non-concurrence doit être levée au plus tard lors de la notification du licenciement, nonobstant toutes dispositions conventionnelles ou contractuelles(6). La Cour réitère ce principe en matière de rupture conventionnelle. Ainsi, l'employeur qui souhaite lever la clause peut le faire jusqu'à la date de rupture fixée par la convention, nonobstant toutes stipulations ou dispositions contraires. En cas de renonciation tardive, la contrepartie ne peut être limitée à la période antérieure à la levée de la clause et est due au titre de toute la période pendant laquelle la clause aura été respectée par le salarié(7).

Un accord devant le Bureau de Conciliation et d'Orientation ne peut couvrir l'absence de levée de la clause lors de la rupture du contrat de travail. Dès lors que l'employeur n'a pas levé la clause à temps, l'indemnité de non-concurrence est due au titre de toute la période pendant laquelle la clause aura été respectée par le salarié, quand bien même les parties auraient en conciliation renoncé chacune à cette clause(8).

Les cas de l'opposition par l'employeur au paiement de la clause de non-concurrence

Si la clause a manifestement pour objet de consentir au salarié un avantage disproportionné, l'employeur peut s'opposer au paiement de la clause au motif que celle-ci ne serait pas valable. C'est en ce sens que s'est prononcée la Cour de cassation dans deux affaires récentes.

Dans la première affaire, le contrat de travail prévoyait une obligation de non-concurrence de 2 ans, assortie d'une indemnité mensuelle égale à la rémunération mensuelle brute alors même que l'employeur, seul opérateur national autorisé (FDJ), disposait de l'exclusivité de la distribution des produits sur le secteur géographique visé par la clause. Aucune concurrence n'étant possible sur le secteur visé, la Cour a jugé qu'une telle clause n'était pas valable(9).

Dans la seconde, le contrat prévoyait une obligation de non-concurrence de 2 ans, limitée à 2 départements, assortie d'une indemnité égale à 100% de la rémunération, payable en une fois et sans possibilité pour l'employeur de lever cette clause. La Cour, retenant que l'entreprise connaissait des difficultés économiques dont le rédacteur de la clause était parfaitement informé, a considéré qu'elle octroyait au salarié une compensation disproportionnée au regard des sujétions imposées et qu'elle était donc dépourvue de cause licite(10).

La contrepartie financière après la signature d'une transaction ?

Un salarié ne peut demander le paiement de la contrepartie financière après la signature d'une transaction ne prévoyant pas spécifiquement le règlement de cette contrepartie.

Dans un récent arrêt de la Cour de cassation, le salarié, dont la clause n'a pas été levée lors de son licenciement et qui en a respecté les conditions, conclut postérieurement à son départ une transaction par laquelle il reconnait être rempli de ses droits. Selon la Cour, il ne peut ensuite demander le paiement de la contrepartie financière dès lors que la transaction précise que « les parties déclarent être remplies de leur droits et mettre fin à tout différend né ou à naitre et renoncer à toute action relative à l'exécution ou à la rupture du contrat.»(11)

Il est donc vivement recommandé d'apporter une attention particulière aux conditions dont est assortie une clause de non-concurrence tant au moment de sa rédaction qu'au moment de sa levée.

Les auteurs :

Claire Fougea , Bryan Cave Leighton Paisner, travaille avec des entreprises françaises et étrangères sur des questions de droit social, liées à la transformation des organisations. Elle accompagne ses clients lors d'opérations de restructuration, de fusions-acquisitions, de consultations des instances représentatives du personnel, de négociations collectives et de départs de cadres et de dirigeants. Elle intervient également dans les domaines du contentieux social, individuel et collectif.

Les auteurs :

Margot Jouannet, Bryan Cave Leighton Paisner, concentre sa pratique sur le droit du travail et de l'emploi. Son expérience est principalement orientée vers le contentieux, où elle assiste les entreprises tant devant les tribunaux sociaux que devant le juge des référés ou le juge administratif. Elle conseille également ses clients sur des questions de ressources humaines au quotidien.




[1] Cass. Soc., 15 décembre 2021, n° 20-18144

[2] Cass. Soc., 8 Avril 2021, n° 19-22097

[3] Cass. Soc., 6 janvier 2021, n° 19-18312

[4] Cass. Soc., 13 octobre 2021, n° 20-12059

[5] Cass. Soc., 21 octobre 2020, n° 19-18399

[6] Cass. Soc.,13 Mars 2013, 11-21.150

[7] Cass. Soc., 26 janvier 2022, n° 20-15755

[8] Cass. Soc., 13 octobre 2021, n° 20-10718

[9] Cass. Soc., 17 février 2021, n° 19-15531

[10] Cass. Soc., 4 novembre 2020, n° 19-12279

[11] Cass. Soc., 17 février 2021, n° 19-20635

 
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