Information ou contrefaçon : pas de confusion !
Le partage de l'information contribue quotidiennement à l'amélioration des connaissances. Attention toutefois à ne pas confondre bien commun et respect de la propriété.
Je m'abonneLa copie autorisée de contenus de presse doit répondre à des exigences bien établies, et sous certaines conditions préalables de preuve.
L'exception de courte citation
Le code de la propriété intellectuelle prévoit en effet que, lorsqu'une oeuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire les courtes citations justifiées par un caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d'information.
Cette exception reste encadrée selon plusieurs conditions cumulatives :
- ne pas dénaturer l'oeuvre principale
- faire état de manière claire du de la source : auteur et le cas échéant éditeur
- limiter la courte citation justifiée par son caractère informatif par exemple avec l'utilisation de guillemets
Quelles sanctions ?
En matière journalistique, la tolérance imposée par le partage de connaissances se limite à cette exception et tout contrevenant s'expose à des peines pécuniaires lourdes, des publications de la condamnation prononcée, et à engager sa responsabilité civile.
L'originalité des contenus
L'étendue de protection d'un article de presse dépend toutefois de la nécessité de prouver l'originalité de l'oeuvre.
A ce sujet, l'appréciation de la jurisprudence est plutôt extensive. Peuvent ainsi être protégés par le droit d'auteur : l'article lui-même, ainsi que les compilations d'articles, les brèves si elles ne se limitent pas à une donnée brute de l'information, une charte graphique spécifique ou encore un ensemble de mots clefs s'ils ne sont pas des termes techniques utilisés couramment dans un domaine précis.
A titre d'exemple en matière de presse professionnelle financière, il a été jugé que l'emploi de certains mots tels que indicateur, paramètre, tendance, cycle, hausse, consolidation etc ... constituent des termes génériques et usuels relevant du domaine financier. Leur reprise même systématique par un éditeur concurrent au sein d'articles portant sur les mêmes thèmes et présentant une typologie commune ne saurait être fautive.
Pas d'exception de traduction
L'originalité couvre ainsi toute oeuvre, quel que soit son support de diffusion, web, papier, audio, radio, blog, réseaux sociaux, contre toute exploitation indue qu'elle soit dans la même langue ou traduite sur des sites web étrangers.
La technique de transclusion
Plus engageant encore, il peut être de la responsabilité de celui qui orchestre la diffusion des oeuvres de veiller à s'adresser au public pour lequel le maître d'oeuvre détient les droits.
En effet, très récemment (le 9 mars 2021), une bibliothèque numérique qui met en réseau des catalogues d'oeuvres écrites et graphiques, sous forme de vignette, s'est vue condamnée par la CJUE pour ne pas avoir mis en place des mesures techniques efficaces empêchant l'incorporation de ces vignettes par lien cliquable ou incorporé (technique de la transclusion ou " framing ") au sein des pages internet de tiers.
La titularité des contenus
L'originalité n'est pas suffisante, encore faut-il pouvoir démontrer de façon certaine son antériorité et sa qualité d'auteur, ou de titulaire des droits pour les éditeurs.
Sur ce point, la technologie au service des auteurs et éditeurs est vaste. Il peut en effet s'agir de la sauvegarde régulière des pages web et/ou sites internet par des procédés classiques tels que les constats d'huissier en ligne, ou des plateformes de dépôt légal. La plupart de ces procédés utilisent la technologie blockchain bien que l'horodatage blockchain ne soit pas encore totalement intégré dans le droit français comme preuve irréfragable.
C'est quoi le NFT
Les NFT qui bouleversent la côte des artistes avec des ventes à prix record atteints tout récemment pour des oeuvres numériques horodatées par un Non Fungible Token.
Rappelons que ces certificats d'authenticité au moyen d'un enregistrement de la transaction sur un réseau décentralisé sont effectivement vérifiables, inviolables, uniques et non fongibles.
En revanche, il ne s'agit aujourd'hui que d'une norme technique privée engageant uniquement les cocontractants, et sans valeur légale pour les tiers sauf à les engager également par une communication contractuelle avec chacun d'eux.
Enfin, si cette transaction donne droit à la propriété d'une copie de l'oeuvre, elle ne donne pas droit à la création en elle-même. Pour les articles de presse couverts par le droit d'auteur, l'exploitation non autorisée de la copie restera donc une atteinte au droit de l'auteur et de sa société d'édition.
Pour en savoir plus
Caroline Jouven est Avocat associé en charge de la Propriété Intellectuelle au Cabinet Fidal Paris.
Elle intervient pour accompagner les entreprises dans la sécurisation, la protection et la valorisation de la création, de l'innovation, et des actifs de Propriété Intellectuelle