Cumul mandat social et contrat de travail : enjeux et modalités
Parce qu'ils ont le plus souvent la qualité de mandataires sociaux, les dirigeants de sociétés n'entrent pas dans le champ d'application du droit du travail. Ils peuvent néanmoins trouver un véritable intérêt à cumuler emploi technique et fonctions de mandataire.
Je m'abonneLe cumul mandat social - contrat de travail, procure certains avantages aux dirigeants de sociétés.
Pour des raisons financières évidentes, l'affiliation au régime d'assurance chômage constitue l'un des enjeux les plus importants de ce cumul. Des garde-fous ont toutefois été prévus et le dirigeant de société doit, pour pouvoir se prévaloir d'une situation régulière de cumul, respecter certaines conditions bien définies.
L'affiliation au régime d'assurance chômage : le principal enjeu
Les dirigeants de sociétés, lorsqu'ils sont mandataires, peuvent être assimilés sur certains aspects aux salariés de l'entreprise. Ainsi peuvent-ils, sous certaines conditions, bénéficier de l'épargne salariale et être affiliés au régime général de Sécurité Sociale.
Quel que soit leur statut, les mandataires sociaux sont en revanche toujours exclus du régime d'assurance chômage. Ce régime est en effet réservé aux collaborateurs ayant le statut de salariés, liés à l'entreprise par un lien de subordination.
Dans cette hypothèse, la solution pour le mandataire social est de s'affilier à un régime privé d'assurance contre la perte d'emploi, dont les cotisations sont très élevées.
Toutefois, lorsque le mandataire social est aussi salarié de l'entreprise, il peut bénéficier de l'affiliation au régime d'assurance chômage. C'est tout l'enjeu du cumul contrat de travail - mandat social.
Les autres avantages du cumul contrat de travail - mandat social
Outre l'affiliation au régime d'assurance chômage, le cumul permet au dirigeant de bénéficier des règles protectrices du droit du travail (salaire minimum, congés payés, etc.).
Par ailleurs, les statuts de dirigeant et de salarié étant distincts, la cessation du mandat social n'entraîne pas la rupture du contrat de travail, et inversement.
L'exigence d'un cumul régulier
Pour bénéficier des dispositions protectrices offertes au salarié, encore faut-il que le cumul soit régulier. A cet effet, trois conditions cumulatives doivent être remplies :
- Le dirigeant doit exercer des fonctions techniques distinctes de celles exercées au titre du mandat social ;
- Ces fonctions doivent faire l'objet d'une rémunération distincte de celle prévue le cas échéant, pour le mandat social ;
- Le dirigeant doit être placé, au titre de ses fonctions techniques, dans un état de subordination à l'égard de la société.
En pratique, l'existence d'un lien de subordination est exclue dans les situations suivantes :
- dans les SARL, pour le gérant associé unique, le gérant associé égalitaire ou majoritaire ou le gérant appartenant à une gérance égalitaire ou majoritaire ;
- dans les SAS, pour le Président associé unique et le Président et les Directeurs Généraux égalitaires ou majoritaires.
Cumul régulier : quelle procédure ?
Lorsque le contrat de travail est conclu après le mandat social, il est assimilé à une convention dite " réglementée ", ce qui implique, selon la forme de la société, une autorisation préalable ou une ratification du contrat par la collectivité des associés.
Lorsque le contrat de travail est conclu avant le mandat social, cette procédure n'a pas à être suivie. En revanche, elle devra être mise en oeuvre pour toutes les modifications ultérieures du contrat.
Cumul irrégulier : quelles conséquences ?
Dès lors que les trois conditions obligatoires ne sont pas remplies, le cumul est irrégulier.
Si le contrat de travail est antérieur au mandat social, il doit être rompu ou bien il est suspendu pendant la durée du mandat social.
En revanche, si le contrat de travail en cause est postérieur au mandat social, il risque la requalification en contrat nul, les parties étant à l'origine d'une fraude à la loi. Le cas échéant, le dirigeant est tenu de rembourser les salaires perçus au titre du contrat de travail nul et ne peut pas bénéficier du statut protecteur de salarié.
En cas de doute : utiliser la procédure de " rescrit Pôle Emploi "
Pour déterminer si un cumul est régulier au regard de l'assurance chômage, le dirigeant peut désormais demander au Pôle Emploi, depuis le 27 décembre 2018, de se prononcer en introduisant une demande de rescrit. Une telle procédure aura notamment son intérêt pour solliciter le remboursement des cotisations chômage déjà versées au titre d'un cumul irrégulier.
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Anne Leleu-Eté
Anna Picot