CIR, CII, JEI... quelles mesures fiscales pour l'innovation ?
L'administration fiscale a mis en place trois dispositifs visant à aider les entreprises innovantes. Des mesures avantageuses qui permettent l'obtention, sous conditions, de crédits d'impôt ou d'exonérations de charges sociales et fiscales.
Je m'abonneLe Crédit Impôt Recherche (CIR)
Mesure générique de soutien aux activités de recherche et développement (R&D), le Crédit Impôt Recherche (CIR) est destiné aux entreprises qui engagent des dépenses de recherche fondamentale et de développement expérimental, sans restriction de taille ni de secteur.
Si elles sont éligibles, les entreprises peuvent déduire le CIR de leur Impôt sur les sociétés (IS). Jusqu'à 30% des dépenses de R&D peuvent être remboursés ou imputé sur l'impôt. Il sera important de bien caractériser si l'innovation produite est de l'ordre de la R&D. Elle ne doit pas reposer sur la simple nouveauté commerciale ou le développement de modules traditionnels.
Les déclarations ne font pas l'objet d'un contrôle fiscal automatique. Seules 4% des déclarations de CIR déposées sont contrôlées, mais plus de 20% font l'objet de demandes d'informations complémentaires par l'administration fiscale.
Travaux éligibles au CIR :
- Recherche fondamentale : travaux théoriques ou expérimentaux pour l'acquisition de nouvelles connaissances sans envisager d'application particulière. Exemple : analyse de propriétés, de structures, de phénomènes naturels...
- Recherche appliquée : travaux liés aux applications potentielles des résultats d'une recherche fondamentale. Par exemple, les travaux expérimentaux pour l'acquisition de connaissances nouvelles dans un but précis ou pour une application déterminée.
- Recherche expérimentale : travaux fondés sur des connaissances existantes ou obtenues par la recherche ou l'expérience pratique.
En résumé, l'innovation produite doit aller à la rencontre de difficultés scientifiques ou techniques pour mener à bien le projet et dissiper une incertitude En somme, une amélioration significative par rapport au savoir-faire et à l'état de l'art scientifique et technique.
Les dépenses éligibles au CIR :
- Le personnel : salaires bruts chargés des personnes affectées aux travaux de R&D. Rémunérations et charges des TNS. Et ce, au prorata du temps passé à des activités de R&D éligibles. Dépenses de fonctionnement forfaitisées à hauteur de 50% des dépenses ci-dessus (200% pour les jeunes docteurs).
- Le matériel : dotation aux amortissements des matériels utilisés pour la R&D. Au prorata de leur affectation à des activités éligibles. Dépenses de fonctionnement associées forfaitisées, à hauteur de 75% des amortissements éligibles.
- La sous-traitance : auprès d'organismes de recherche publics, établissements d'enseignements supérieurs, associations fondations pour la recherche. Auprès d'organismes privés ou d'experts : sous conditions d'agrément auprès du MESR. Plafonnement par rapport aux autres dépenses éligibles.
- Autres dépenses éligibles : la normalisation, la veille technologique, déduction des subventions et avances remboursables.
Les bonnes pratiques :
- Remplir le formulaire Cerfa 2069--SD à remettre en même temps que l'avis de solde d'IS.
- Bien valider l'éligibilité des projets retenus : les travaux à l'origine de brevets ou encore financés par Bpifrance ne sont pas automatiquement éligibles.
- Déterminer précisément l'assiette des dépenses éligibles.
- Rédiger un dossier de justification solide. Conserver diplômes et CV des personnels valorisés.
Crédit d'Impôt Innovation (CII)
Créé par la loi de Finance de 2013, le Crédit d'Impôt Innovation (CII) est applicable depuis le 1er janvier 2013. Il est ouvert aux PME au sens communautaire (pas plus de 250 salariés).
Les entreprises peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt de 20 % des dépenses nécessaires à la conception et/ou à la réalisation de prototypes ou d'installations pilotes d'un produit nouveau, au sens de la définition fiscale, dans la limite de 400 000 euros par an, remboursées ou imputées sur l'IS. Soit 80 000 euros de CII par an et par entreprise. Ce plafonnement des dépenses est global et concerne l'ensemble des dépenses engagées quel que soit le nombre de prototypes ou d'installations pilote réalisés.
Le CII possède les mêmes mécanismes que le CIR. Son calcul s'effectue par année civile et la déclaration est associée à un exercice fiscal. Contrairement au CIR, l'administration fiscale étudiera le marché et distinguer si l'innovation est plus performante que la concurrence.
Travaux éligibles au CII :
- Prototype : modèle original qui possède toutes les qualités techniques et toutes les caractéristiques de fonctionnement du nouveau produit ou procédé. Ce modèle n'a pas forcément son aspect ou sa forme finale mais il permet de dissiper les incertitudes concernant les améliorations du produit et d'en fixer les caractéristiques.
Lire aussi : Qu'est-ce qu'une jeune entreprise innovante ?
- L'installation pilote : ensemble d'équipements ou de dispositifs permettant de tester un produit ou un procédé à une échelle ou dans un environnement proche de la réalité industrielle. À l'achèvement de la phase expérimentale, l'installation pilote n'est plus considérée comme se rapportant à la réalisation d'opérations de recherche et développement puisqu'elle fonctionne comme une unité normale de production.
- Nouveau produit : bien corporel ou incorporel qui satisfait aux deux conditions suivantes : il n'est pas encore mis à disposition sur le marché ; ou il se distingue des produits existants ou précédents par des performances supérieures sur le plan technique, de l'écoconception, de l'ergonomie ou de ses fonctionnalités.
Les dépenses éligibles au CII :
- Dotations aux amortissements des immobilisations créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement aux opérations de conception de prototypes ou installations pilote de nouveaux produits.
- Personnel affecté à la réalisation des opérations de conception. En cas de temps partiel, les dépenses sont retenues au prorata du temps effectivement consacré à ces opérations.
- Dépenses de fonctionnement faites pour ces opérations. Elles sont prises pour un montant forfaitaire fixé à 75 % des dotations aux amortissements et à 50 % des dépenses de personnel.
- Frais de prise de brevets et de certificats d'obtention végétale ainsi que les frais de dépôt de dessins
- Frais de défense des brevets et dessins
- Dépenses externes : celles qui sont confiées à des entreprises ou bureaux d'études agréés.
Bonnes pratiques
La demande doit être effectuée au moins 6 mois avant la date limite de dépôt de la déclaration spéciale à partir d'une présentation écrite, précise et complète, de la situation de fait. Si le projet est pluriannuel, la demande doit être effectuée au moins 6 mois avant la date limite de dépôt de la 1ère déclaration spéciale relative à ce projet. Elle doit être adressée par pli recommandé avec accusé de réception au Service des impôts des entreprises (SIE) auquel est rattachée l'entreprise pour réaliser ses déclarations fiscales.
Jeune entreprise Innovante (JEI)
Créé par la Loi de finances 2004, le statut fiscal de Jeune Entreprise Innovante (JEI) permet aux jeunes PME françaises d'obtenir l'exonération totale ou partielle de certaines charges sociales et fiscales pour les aider à financer leur activité de Recherche et Développement (R&D). Chose importante, il y a une prorogation du dispositif jusqu'au 31 décembre 2019, votée par la Loi de Finances.
Toute entité juridique imposée à l'impôt sur les sociétés peut solliciter le statut JEI, pendant les 8 premières années à partir de son année de création, à condition d'engager des dépenses de R&D au moins égales à 15 % des dépenses totales par exercice, d'être détenue à plus de 50 % par des personnes physiques ou par des fonds d'investissement, d'être une PME de moins de 8 ans et d'être créée ex nihilo.
Il s'agit d'un statut à triple portée sur les 8 premières années d'existence de la société :
- Fiscale
- Sociale pour les personnels affectés à la R&D
- Autres avantages (IFA, CVAE, CFE..)
Conditions d'éligibilités au statut de JEI :
- Être une PME au sens Européen : moins de 250 salariés, moins de 50 millions d'euros de chiffre d'affaires ou moins de 4,3 millions d'euros de total de bilan.
- Avoir de moins de 8 ans d'existence : une entreprise peut solliciter le statut de JEI jusqu'au terme de la 7ème année qui suit celle de sa création.
- Être détenue à plus de 50% directement ou indirectement par des personnes physiques ou des fonds d'investissement
- Avoir été créée ex nihilo : pas de reprise d'activité antérieure (fonds de commerce actifs) ni de transfert de personnel
- Consacrer au minimum 15% de ses charges à des dépenses de R&D éligibles au sens du CIR, soit fiscalement déductibles
Avantages fiscaux et sociaux réservées aux JEI
Exonérations d'impôts :
- Exonération totale d'impôt sur les bénéfices (IS ou IR) pendant le premier exercice (ou la première période d'imposition bénéficiaire) puis d'une exonération de 50 % pour la période ou l'exercice suivant.
- Si l'entreprise perd son statut de Jeune Entreprise Innovante (JEI), elle ne redevient redevable d'impôt sur les bénéfices qu'au 1er janvier de l'année suivant celle au cours de laquelle elle ne remplit plus les conditions d'éligibilité.
- Non-paiement de la contribution économique territoriale (CET), ni la taxe foncière. Cette exonération est valable pendant une période de 7 ans maximum.
Exonérations des cotisations sociales patronales :
- Cette exonération concerne les cotisations sociales patronales payées sur les salaires des chercheurs, techniciens, gestionnaires de projet de R&D, juristes chargés de la protection industrielle et personnels chargés des tests pré-concurrentiels. Elle est également ouverte aux mandataires sociaux relevant du régime général de la sécurité sociale et participant au projet de R&D à titre principal.
L'exonération est assortie d'un double plafond : un plafond de rémunération mensuelle brute par personne (fixé à 4,5 Smic, soit 6743,10 euros en 2018) et un plafond annuel de cotisations éligibles par établissement (fixé à cinq fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit 198660 euros pour 2018).
Elle porte uniquement sur les cotisations patronales d'assurance maladie, maternité, invalidité, décès, vieillesse, et allocations familiales. Elle ne s'applique donc pas sur la retraite complémentaire, sur les cotisations supplémentaires mises à la charge de l'employeur, ni sur les cotisations accidents du travail ou maladies professionnelles.
L'exonération est applicable jusqu'au dernier jour de la septième année suivant celle de la création, soit pendant 8 ans au maximum. Elle a longtemps été dégressive mais elle est aujourd'hui uniquement totale.
Bonnes pratiques
- S'auto-déclarer Jeune Entreprise Innovante (JEI).
- Déposer une demande préalable de statut Jeune Entreprise Innovante (JEI) auprès de l'administration fiscale, au titre d'un ou plusieurs exercices fiscaux, en déposant un rescrit fiscal auprès de la Direction des services fiscaux dont elle dépend.
- Cette demande doit être transmise en recommandé avec accusé de réception auprès des services fiscaux dont l'entreprise dépend. Cette demande peut être effectuée à tout moment.
- L'administration doit rendre son avis dans les 3 mois qui suivent la demande de rescrit de l'entreprise. Si ce délai n'est pas respecté, l'avis de l'administration est réputé favorable. Dans ce cas, l'éligibilité au régime de la JEI ne peut pas être remise en cause pour les exercices mentionnés dans la demande de rescrit.
- Il est également recommandé de renouveler cette demande à chaque exercice fiscal d'application du dispositif pour s'assurer que la nature des projets de R&D, le montant des dépenses éligibles au JEI et la structure de l'entreprise répondent toujours aux critères d'éligibilité.
Outre des mesures fiscales à l'innovation, il existe des aides publiques proposés par Bpifrance. La Banque publique d'investissement propose un éventail de solutions à l'attention des PME, consultables à cette adresse.