Inspirez-vous du mode start-up
Fluides, agiles et réactives, les start-up bousculent les codes et les habitudes de l'économie traditionnelle, par leur mode de fonctionnement et leur facilité à appréhender les nouveaux usages du quotidien. Découvrez les bases du mode start-up et impulsez le changement dans votre organisation.
Je m'abonneVous pensez que les start-up sont de jeunes entreprises ancrées dans l'ère digitale et pleines d'ambition, qui visent l'hypercroissance tout en révolutionnant les usages et le fonctionnement de l'économie ? Vous avez raison. Vous croyez que vous pouvez suivre un chemin parallèle sans vous soucier de la transformation des pratiques entrepreneuriales qui se joue sous vos yeux ? Vous n'avez pas tout à fait tort, car si d'aucuns érigent le style et la culture de la Silicon Valley en modèle absolu, de nombreuses PME tricolores n'ont pas attendu l'explosion des GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) pour réussir et, surtout, pour durer. Pourtant, dans une époque en pleine quête de sens et de renouveau, vous ne pouvez ignorer l'apport considérable de ces modèles d'entreprise.
En matière de management, d'appréhension de l'innovation, de culture du risque ou encore de marketing, les méthodes start-up ont totalement rebattu les cartes ces dix dernières années. Avec ces nouveaux entrants, vous partagez un facteur commun : votre ADN d'entrepreneur, qui ne demande qu'à être mieux exploité ! Pour cela, pas question de rebâtir entièrement vos méthodes et votre organisation, mais plutôt d'adapter ce qui peut l'être, en vous mettant au diapason d'une économie qui évolue. Voici quelques-unes des recettes qui ont fait leurs preuves, dans ces entreprises naissantes qui osent penser le changement.
Source : étude 2015 "ADN d'un entrepreneur", Hiscox
Misez sur l'innovation
Pour une entreprise déjà assise sur une activité existante, développée grâce à une connaissance fine de son marché, se diversifier et élargir son périmètre est un vrai pari sur l'avenir. Bien plus risqué que pour une start-up qui part de zéro et qui a tout à inventer. "Nous sommes conscients d'être obligés d'innover pour survivre, là où des entreprises établies vont penser, à tort, qu'elles ne sont pas menacées par la possible ubérisation de leur secteur. C'est cette prise de conscience qui doit se faire", encourage Romain David, cofondateur de la plateforme collaborative Wisembly, qui permet d'animer et de dynamiser les réunions d'entreprise. Car c'est bien cette nécessité de se repenser sans cesse qui a conduit nombre de start-up à tenter des choses beaucoup plus grandes qu'elles, en déboulant sur un nouveau segment comme un chien dans un jeu de quilles. "Au départ des transformations de marché auxquelles nous avons pu assister dernièrement, il y a toujours la capacité d'un dirigeant à cerner les frustrations de la clientèle ou à imaginer des produits et services pour des clients qui n'existaient pas", estime Frédéric Iselin, professeur affilié à HEC Paris et ancien directeur du Centre d'entrepreneuriat et d'innovation. Et de citer l'exemple de la première compagnie aérienne à avoir proposé une offre low-cost à une cible qui se déplaçait jusque-là en train ou en voiture.
Anticiper, voire provoquer le basculement d'un marché, être à l'écoute permanente de ses clients et de ses prospects pour tenter de solutionner leurs futurs usages, c'est cette intuition qu'il faut travailler et exploiter au quotidien. Pour cela, dédier un budget et une partie de vos ressources à l'innovation est vivement recommandé, pour faire émerger des solutions novatrices répondant à une attente peu ou pas encore adressée.
Développez vite
Les start-up, empreintes d'une forte culture du "test and learn", n'attendent pas d'être sûres de leur idée pour se jeter à l'eau. Elles préfèrent affiner d'après les retours utilisateurs, en développant des versions du produit ou du service toujours meilleures et mieux adaptées. "Nous sommes souvent partis d'une idée simple que nous avons testée rapidement et qui est devenue un produit", confirme Paul Benoit, à la tête de Qarnot Computing, qui commercialise un radiateur-ordinateur embarquant de la puissance informatique comme source de chaleur.
Cette méthode du "lean start-up" ("lean" signifiant "maigre" ou "dégraissé") implique que les projets d'innovation imaginés par vos équipes doivent être proposés à votre cible en version quasi-prototypale, afin de valider le concept puis de le soumettre à des améliorations successives en fonction des observations rapportées. "Les start-up se comportent comme des agents libres qui essaient jusqu'à trouver. Elles cherchent, testent et déploient des modèles à grande échelle, sans investir trop d'argent dans cette première phase", résume Olivier Mougenot, directeur de l'accélération et de l'investissement au Numa, laboratoire d'innovations en entreprise et incubateur de start-up.
Source : Panorama EY des start-up 2015.
Un des avantages à réduire les cycles de décision et de production ? Cela vous coûtera toujours moins si vous vous trompez : mieux vaut un échec rapide sur une version minimale qu'après une longue étude et de nombreux tests autour d'une idée qui fait finalement pschitt... ou est sortie par la concurrence dans un délai plus court. Si vous avez vu juste en revanche, il faut avoir prévu un modèle "scalable", soit la possibilité de le déployer à grande échelle, sans que cela n'impacte trop votre besoin en ressources humaines ou matérielles. En d'autres termes, pouvoir faire face à la croissance de votre volume d'activité occasionnée par une forte demande tout en conservant, voire en augmentant, votre marge de rentabilité.
Managez différemment
La force de votre entreprise repose moins sur votre produit phare que sur les collaborateurs qui vous épaulent au quotidien. Et si les start-up ont autant le vent en poupe, c'est parce qu'elles s'appuient sur des ressources fiables, motivées et mobilisées autour d'un projet commun. La bonne nouvelle, c'est que cet état d'esprit est plus facile à adopter dans une PME, proche par sa taille et souvent par son histoire d'une start-up, que dans un grand groupe plus rigide et impersonnel. "Il faut parfois casser les codes du recrutement, être capable de choisir moins sur les diplômes que sur les expériences personnelles et professionnelles, regarder les profils atypiques d'intrapreneurs, tels qu'une personne ayant déjà dirigé sa propre société", conseille Gaëlle Ottan de 1001startups.fr. Frédéric Iselin (HEC) va dans le même sens : "Il faut avoir la capacité d'embaucher quelqu'un qui soit meilleur que soi dans certains domaines. Et encourager l'échec, car une équipe qui échoue est une équipe qui a essayé quelque chose."
Pour impliquer réellement vos ressources à vos côtés, rien de tel, donc, que de leur offrir un cadre de travail stimulant en leur accordant confiance et autonomie. "Gommer les signes extérieurs de hiérarchie, être dans un fonctionnement plus horizontal laisse la liberté aux équipes d'être davantage pourvoyeuses d'idées, remarque Pierre Vacherand, directeur technique d'Apalia, intégrateur système et éditeur de logiciels. Les usages collaboratifs, la recherche et la valorisation de l'intelligence collective, la transparence sur les échecs comme sur les succès de la société sont autant de pistes payantes."
Apprenez de l'écosystème
Au coeur de la culture d'entreprise d'une start-up, on retrouve une propension certaine à la remise en question. Elle passe par une écoute très attentive de son propre marché (et même au-delà), avec une veille concurrentielle et sectorielle poussée qui permet de ne pas se laisser distancer, mais aussi et surtout par une immersion continue dans un monde d'idées en perpétuel changement. Venus d'abord de la sphère technologique, la déferlante de logiciels libres et le développement de projets en open source sont les supports de cette libéralisation des échanges de pratiques et de points de vue, qui tend à irriguer l'ensemble de l'économie. L'autoformation contribue largement à cette veille éducative, comme le relève Olivier Mougenot : "Qu'ils soient ingénieurs ou du marketing, ils sont en veille constante, ils écoutent, se nourrissent de méthodes, d'outils, d'idées inédites. Ce mouvement permanent est une de leurs grandes forces." Les entreprises accompagnées par le Numa échangent d'ailleurs avec des start-up lors de sessions d'open innovation, pour leur permettre de mieux comprendre cette approche. Mais, explique Frédéric Iselin (HEC), "les managers manquent encore de grilles d'analyse, de capacité à évaluer une nouvelle idée, de méthodes et d'outils".
Source : Panorama EY des start-up 2015
Parfois, une mise à niveau peut se révéler nécessaire, par exemple en s'adressant à une business school ou en participant à un programme de mentorat entrepreneurial. De votre côté, favorisez les synergies, n'hésitez pas à participer à des conférences, à prendre part à des groupements d'entrepreneurs de votre secteur, à pratiquer l'échange informel d'idées, et ce avec vos partenaires comme avec vos concurrents. "Collaborer avec d'autres entreprises est un levier de réussite non négligeable. Il ne faut pas hésiter à parler avec des entrepreneurs, même s'ils n'ont pas le même domaine d'activité. C'est en essayant de comprendre ce qui se fait ailleurs qu'on multiplie les chances de bien faire fonctionner son entreprise", estime Arsalain El Kessir, dirigeant de BoursedesCredits.com et membre du réseau Citizen Entrepreneurs, avec lequel il a participé au G20 des Jeunes Entrepreneurs à Istanbul en septembre dernier.
Parlez et faites parler
Alors qu'elles n'ont que très peu de moyens à consacrer à leur communication, les jeunes pousses défrayent la chronique. D'abord en soignant leur storytelling, en distillant anecdotes et éléments (histoire de l'entreprise et de ses fondateurs, volonté de changer le monde ou d'apporter sa pierre à l'édifice des nouveaux modes de consommation, savoir-faire artisanal) qui sauront embarquer leurs interlocuteurs. Et le fait qu'elles soient dirigées par des digital natives, familiers du marketing viral, n'y est pas étranger. L'une des méthodes employées, le "growth hacking", consiste à lier marketing et développement de l'activité par l'acquisition d'utilisateurs en ligne. Incitation à s'abonner à un service gratuit, suggestion d'en parler autour de soi, parrainage de ses connaissances, invitations à revenir... De simple visiteur, on devient client, puis prescripteur de votre service.
De manière plus générale, il est important que vos clients suivent votre évolution : alimenter un blog ou proposer une lettre d'information en partageant des contenus non marchands et à valeur ajoutée valorise votre expertise, tout en vous permettant de garder le contact avec votre communauté. Retrouvez-la aussi sur les réseaux sociaux, où votre présence est indispensable pour gérer votre notoriété en ligne. Partagez des informations sur votre entreprise mais voyez aussi plus large, en évoquant par exemple l'actualité de votre marché. Autre axe de développement par la communication qui favorise l'engagement : les collaborations et les partenariats entre marques. Marlette, leader de la préparation bio pour pains et gâteaux, excelle dans l'art de valoriser des marques amies, qui le lui rendent bien. "Quand Faguo me donne des paires de chaussures à faire gagner à mes clients sur Facebook, cela dynamise ma base et, dans le même temps, les followers de Faguo découvrent Marlette. Nous ne sommes pas concurrents et avons une cible commune, c'est donc un moyen efficace de partager nos fichiers", explique Scarlette Joubert, cofondatrice de la marque.
Source : étude 2015 Capgemini consulting et eCap Partner
Financez autrement
Théoriquement, votre business model est diamétralement opposé à celui d'une start-up, qui recherche une croissance à plusieurs chiffres sur une courte période, quand vous poursuivez des objectifs de stabilité et de profitabilité. Du coup, les investisseurs qui souhaitent faire un coup en finançant un projet leur offrant des perspectives de sortie florissantes ne sont pas dans votre viseur. Et pourtant, c'est un cliché de croire que les business angels et les fonds privés ne misent que sur le potentiel de croissance d'une innovation de rupture. Pour eux, la sécurité prime souvent. Olivier Mougenot (Numa) : "Un investisseur va chercher à être rassuré sur la capacité de l'équipe à réaliser le produit, celle du dirigeant à travailler avec son directeur technique... Les PME qui arrivent à développer un produit destiné à un marché plus large ont cela de rassurant pour des investisseurs. Sans compter l'expertise et le réseau dont elles disposent dans leur industrie, qui facilitent énormément l'évaluation qu'elles en ont."
Pour Gaëlle Ottan, il ne faut pas hésiter : "Si une PME monte un projet innovant, elle doit chercher un financement pour accélérer ce projet et non pas son activité globale. Elle a alors toutes les chances de convaincre : elle a des clients, des actifs que ne possède pas une jeune start-up, une expertise démontrable." Mais cela signifie céder une partie du capital ou monter une filiale pour cette innovation. Pour accéder à ce type de financement, vous devez être prêts à changer votre manière d'envisager la répartition du capital et à une dilution de vos parts sociales.
Autre piste : Bpifrance, qui propose aux entreprises innovantes des avances remboursables ou des prêts à taux zéro. Ou encore les campagnes de financement participatif, qui ont le mérite de vous laisser les rênes tout en accélérant la communication autour de votre projet.