Et si vous misiez (vraiment) sur les étudiants pour développer votre business
Non, vos collaborations avec les étudiants ne se limitent pas aux seuls stages et contrats aidés. Des concours aux junior-entreprises, osez sortir des chemins battus pour bénéficier des lumières de ces têtes chercheuses.
Je m'abonneDu 12 au 14 novembre derniers, 1400 étudiants ont disposé de 48 heures pour résoudre une problématique opérationnelle formulée par différentes entreprises pour leurs projets marketing, R&D, technique... Deux jours durant lesquels 1 400 élèves issus de dix régions françaises et de dix pays dans le monde s'affronteront dans le cadre de l'opération "48 heures pour faire vivre des idées", une coopétition étudiante pluridisciplinaire créée par l'école d'ingénieurs ENSGSI de Nancy et copilotée avec l'Institut InnovENT-E.
Pour les étudiants, une opportunité de passer aux travaux pratiques grandeur nature. Pour les entreprises participantes, un moyen de challenger leurs produits et process avec de nouvelles idées et de soigner leur marque employeur. À l'instar de cette initiative, de nombreux concours étudiants existent à travers la France, avec un double objectif : trouver des solutions à l'un de vos problèmes tout en formant les jeunes générations aux réalités de terrain. Pour les identifier, rapprochez-vous des CCI, écoles et universités de votre région.
Business games
À la clé, le résultat peut être bluffant. Georges Viana, repreneur de la Biscuiterie Jeannette, fabricant de madeleines, en sait quelque chose. Son entreprise a été sélectionnée pour être l'étude de cas marketing du Challenge de la pub 2015 de l'IUT de Caen et du Havre (lire son témoignage).
Certaines entreprises vont même plus loin en organisant leurs propres "business games". Le fabricant de dentelles Solstiss a par exemple créé son prix étudiant annuel, récompensant un élève ayant conçu une collection avec sa production. Depuis deux ans, la start-up Reezocar (comparateur de voitures d'occasion) organise son challenge en ligne "Driving digital" (du 18 au 20 novembre), portant sur une de ses problématiques marketing.
Partenariats
Des collaborations plus personnalisées sont également possibles via des partenariats directs avec des grandes écoles et universités. C'est grâce à ce type de travaux que Jean-Pierre Barjon, dirigeant des Établissements Geyer Frères a pu concevoir le packaging de ces célèbres bouteilles de limonades artisanales Lorina, à l'occasion de la reprise de l'entreprise en 1996.
"Une promotion entière d'étudiants de l'école supérieure d'arts graphiques Penninghen a planché sur notre cas pendant trois mois. Nous sommes ressortis de cette expérience avec le format mental de notre marque", se souvient-il. Aujourd'hui, beaucoup de structures sont ouvertes à ce type de travaux appliqués telles que l'EFAP (communication), l'École d'ingénieurs Eseo d'Angers ou encore Polytechnique.
L'École de design de Nantes Atlantique, elle, a par exemple développé un programme d'accompagnement des entreprises dans leurs projets d'innovation. Des étudiants de master, encadrés par des enseignants, mènent ainsi des ateliers de workshop, des études prospectives et des travaux de veille.
"Attention, nous ne nous substituons pas à une agence de design. Nous intervenons en amont pour développer une approche créative ou aiguiller vers les bons interlocuteurs", avertit Jean-Luc Barassard, directeur du pôle Stratégie entreprises de l'école. Ce type de collaboration s'inscrit sur le moyen-terme (jusqu'à 3 ans) et est généralement payant. Comptez entre 5 000 et 16 000 euros pour l'École de design de Nantes.
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Junior-Entreprises
Afin d'optimiser le référencement de son site internet, Carl de Poncins, cofondateur de la start-up Theatre in Paris (surtitrage de pièces françaises), a préféré emprunter la voie des Junior-Entreprises. Hébergées au sein d'écoles et d'universités, ces associations rassemblent des étudiants proposant des prestations de service payantes dans leur domaine de spécialisation (communication, informatique, etc.). Pour trouver celle qui vous convient le mieux, vous pouvez poster votre appel à projets directement sur le site www.junior-entreprises.com.
Pour Carl de Poncins, cette alternative est "compétitive d'un point de vue financier, et donne accès à des profils très polyvalents". "Gardez bien en tête que même si ces étudiants ne compteront pas leurs heures, ils ont une expérience professionnelle limitée et des études à gérer par ailleurs. Vous devrez donc bien les cadrer dès le départ et assurer un suivi rapproché de leurs travaux", conseille Fabien Rault, responsable du programme Connecteur Étudiants, au sein de Paris&Co, qui co-organise chaque mois des rencontres entre Junior-Entreprises et start-up sur Paris.
Aussi ne sous-estimez jamais votre implication pédagogique dans ces collaborations. Au-delà de cet échange de bons procédés, l'enrichissement doit être réciproque pour demeurer gagnant-gagnant.
Le témoignage de Georges Viana, président de Jeannette 1850 SAS
"J'ai été scotché par la qualité du travail des étudiants"
"Biscuiterie Jeannette 1850". Reprenant les codes de l'écriture manuscrite d'antan, le nouveau logo des madeleines Jeannette se veut à la fois sobre et raffiné. Seuls les contours de la laitière normande, emblème de la marque, sont détourés à l'encre bordeaux, sur l'une des faces des boîtes blanches. Après des années de déroute, tel est le nouveau visage de la biscuiterie, dévoilé pour la première fois le 19 septembre dernier, lors de la Foire internationale de Caen. Cette nouvelle identité visuelle est inspirée des travaux d'étudiants.
En janvier dernier, pendant quinze jours, quatre groupes d'élèves de l'IUT de Caen et du Havre ont ainsi planché sur le positionnement marketing des Jeannette, dans le cadre du Challenge annuel de la pub, un concours inter établissements. "Je leur ai remis un brief de présentation, puis ai répondu à quelques questions. Je m'attendais à ce qu'ils me proposent une affiche et peut-être une ébauche de logo. Mais lors de la soutenance, j'ai été scotché par la qualité de leur travail. Ils ont réussi à construire un véritable plan de communication !", se souvient Georges Viana, le repreneur de la biscuiterie.
Bénéficiant d'un transfert gratuit de propriété intellectuelle, il s'est ainsi inspiré de ces propositions pour concevoir les packagings, établir le logo ou bâtir son argumentaire. "La vision de ces jeunes nous a aidés à redynamiser l'image de Jeannette." Maintenant que la production a repris (une tonne par jour d'ici à fin 2015), lui s'attelle désormais à respecter sa part du marché : envoyer des madeleines à ces jeunes têtes chercheuses.
Repères
SAS Jeannette 1850 : Biscuiterie / Colombelles (Calvados) / Georges Viana, 50 ans / SAS / Création en février 2015 / CA 2015 NS