Export : pourquoi les PME françaises sont à la traine ?
Si Internet permet de démocratiser l'export, force est de constater qu'en 2017, de nombreuses PME ne vendent toujours pas en dehors de nos frontières. Les freins et obstacles sont aussi nombreux que variés, malgré un système de soutien étoffé, mais éclaté et parfois méconnu.
Je m'abonne"Les PME exportatrices françaises sont clairement au-dessus du lot." Voilà le constat dressé par Dominique Amirault, président de la FEEF (Fédération des entreprises et entrepreneurs de France). Plus optimistes et dynamiques que les autres, elles sont également plus tournées vers les canaux digitaux. En effet, les PME exportatrices tricolores développent notamment leur chiffre d'affaires via l'e-commerce (dans 73 % des cas), le m-commerce (77 %) et les réseaux sociaux (53 %), selon l'étude sur les PME et l'export de FedEx.
Avoir pignon sur Web facilite l'export
"La corrélation entre la transformation digitale des entreprises et l'export est intéressante à souligner", précise Corinne Vadcar, senior trade analyst au sein de l'Institut Friedland de la CCI Paris Ile-de-France. Grâce à la digitalisation, les entreprises peuvent plus facilement mettre un pied à l'export et booster leurs échanges à l'international. Néanmoins, si ouvrir une boutique en ligne est à la portée de toute PME, ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. "Il est vrai qu'avec Internet les barrières tombent, facilitant l'accès à l'international. Mais d'autres obstacles restent à surmonter comme les coûts, l'adaptation de l'offre aux différents marchés, la logistique et la notoriété", confie Vulfran de Richoufftz, cofondateur de la start-up Panafrica. Par ailleurs, "qui dit plus de facilité, dit aussi plus de concurrence", reconnaît Corinne Vadcar (Institut Friedland).
La concurrence est effectivement la principale menace à l'export selon les PME françaises sondées par FedEx. C'est pourquoi, pour se démarquer, les entreprises comptent embaucher de nouveaux talents expérimentés, et investir dans de nouvelles technologies, dans le marketing/la publicité et dans la R&D.
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Enfin, les PME déplorent les lourdeurs des formalités administratives et les législations anti-business. "La compétitivité des entreprises est le frein majeur pour se développer à l'international, estime pour sa part Béatrice Brisson, responsable du service des affaires européennes et internationales de la CPME. L'an dernier, c'étaient bien les entreprises françaises qui enregistraient les plus faibles taux de marge. Par ailleurs, il existe un vrai frein culturel. Un travail pédagogique est nécessaire afin d'amener les PME à vendre en dehors de nos frontières."
Un soutien massif mais peu lisible
En France, seulement 124 100 entreprises exportaient leurs biens en 2016, selon la Direction générale du Trésor. Les PME constituent le gros de la troupe (95 % des exportateurs) mais elles ne pèsent pas lourd dans la balance commerciale, avec seulement 14 % des montants exportés. En comparaison, l'Allemagne compte 310 000 PME exportatrices et l'Italie 210 000, selon Business France.
Pourtant, les acteurs et dispositifs d'accompagnement et d'aide ne manquent pas en France. De Business France à CCI International, en passant par les conseillers du commerce extérieur, les CCI, les régions ou encore les Direccte, les portes où frapper sont nombreuses ! Sans compter tous les prestataires privés tels que les SAI (sociétés d'accompagnement à l'international), les SGE (sociétés de gestion export) et les SCI (sociétés de commerce international). "Le réseau international français est dense, admet Dominique Amirault (FEEF). Mais, il n'y a pas vraiment de coordination entre les différents acteurs."
Face à la multiplicité des aides et des acteurs, les dirigeants de PME sont parfois perdus. Le système français de soutien à l'export manque aussi parfois de visibilité et de lisibilité : si le VIE (volontariat international en entreprises) est bien identifié par les entreprises, d'autres types d'aides, à l'image du prêt de développement export, ont une notoriété encore trop relative, selon le rapport des entreprises à l'export de Business France. "La difficulté consiste à identifier les dispositifs qui nous correspondent. Il nous manque une vision globale", témoigne Vulfran de Richoufftz (Panafrica).
La simplification est en marche
Pourtant, des initiatives sont menées dans le but de simplifier et d'améliorer la perception de ces dispositifs. Par exemple, le gouvernement a mis en place un point d'entrée unique en ligne, France International, permettant aux entreprises d'accéder aux informations et offres de services utiles pour soutenir leurs démarches d'internationalisation.
Autre exemple, Business France, les CCI de France et les CCI françaises à l'international ont noué un partenariat visant à mettre en place un parcours simplifié de l'internationalisation des entreprises et à soutenir, d'ici 2018, la structuration et le positionnement à l'étranger de 3 000 PME à potentiel. "Cette initiative va dans le bon sens, mais il faut aller encore plus loin", préconise Vincent Aussilloux, chef du département économie & finance de France Stratégie. Des guichets uniques de l'export en région sont d'ailleurs à l'étude.
Enfin, peut également se poser la question de l'adéquation de l'offre aux besoins des entreprises. "Les PME ne sont pas des chasseuses de primes, assènent de concert Béatrice Brisson (CPME) et Dominique Amirault (FEEF). Elles ne se décident pas d'aller à l'export parce qu'elles peuvent bénéficier d'une aide, mais parce qu'une opportunité se présente ou que cela s'inscrit dans leur stratégie de croissance. Il faut leur donner les moyens de se développer à l'international, de consolider leur démarche via des dispositifs sur la durée." L'experte de la CPME pointe notamment du doigt le crédit d'impôt export : "Non renouvelable, assiette trop restreinte... Ce dispositif dédié aux PME ne leur est pourtant pas adapté !", conclut-elle.
86 % des PME tricolores exportent en Europe et principalement vers l'Allemagne, la Belgique et l'Espagne, selon l'étude sur les PME et l'export de FedEx. Le grand export concerne près de trois PME sur cinq. L'Amérique du Nord arrive en tête puis suivent l'Afrique et l'Asie. Les PME françaises se situent sur le podium des entreprises les plus actives en Europe en matière de commerce intra-européen, juste derrière... leurs rivales allemandes, mais loin devant les PME espagnoles et britanniques.