DossierBusiness du sexe en France, un fantasme économique avant tout

4 - Réussir et innover... difficile mais pas impossible

Les nouveaux acteurs du business du sexe choisissent de le révolutionner, notamment en mettant l'accent sur la qualité ou de nouveaux services. Difficile, certes, mais possible.

"Cultiver et exporter l'amour à la française" - Patrick Pruvot, fondateur de la chaîne de magasins Passage du Désir

"OEuvrer au développement durable du couple, voilà notre mission chez Passage du désir" La base line de Patrick Pruvot, fondateur des magasins éponymes, est lancée. La genèse de son entreprise remonte à 2003, année de son divorce. Contraint de déménager, il se retrouve rue Saint-Denis, dans le 1er arrondissement de Paris, connu pour être celui des sex-shops dans la capitale. "Je me suis rendu compte que l'image de ces boutiques n'avait pas changé. Elles ne sont pas accueillantes, voire glauques, et cela faisait un peu commerce de la frustration."

L'entrepreneur se dit alors qu'il y a quelque chose à révolutionner. Il se renseigne, mais un droit d'entrée pour ouvrir une boutique dans un quartier bien placé avoisine les 500 000 euros. N'ayant pas cette somme, il met son idée entre parenthèses. En 2006, nouveau déménagement au... Passage du Désir, dans le 10e arrondissement parisien. "Après la pendaison de crémaillère, mes amis m'ont dit que le nom de ma rue était génial. Par curiosité, j'ai cherché à l'INPI s'il était pris et ce n'était pas le cas. Ce fut le déclic pour me lancer." Après un an de persévérance pour trouver des fonds, il inaugure sa première boutique en 2007.

Vitrine ouverte, facing attrayant des produits, service clients soigné, produits de qualité et moins chers qu'en sex-shop, le tout centré sur la valeur "bien-être", Passage du désir est un "love-store" éthique, qui entend démocratiser cet univers. La PME distribue à travers trois canaux : le magasin physique, la livraison à domicile et le click and collect. Aussi un tiers des produits vendus sont conçus par la PME. Douze ans après, huit magasins existent à Paris pour un chiffre d'affaires de près de 9 millions d'euros en 2018. "À l'instar de la gastronomie française, mon prochain objectif est d'exporter l'amour à la française à l'international", conclut l'entrepreneur.

Difficile mais pas impossible

Monopole des sociétés américaines, disruptage des acteurs traditionnels avec l'arrivée du Web, préjugés moraux persistants, difficultés bancaires et d'investissement, le tableau du business adultes en France est assez terne. Ce qui entraîne une question simple : peut-on encore entreprendre et réussir dans ce domaine ? Les réponses sont multiples et sans doute complémentaires. Les deux leaders français du porno, Dorcel SA et Jacquie&Michel, s'accordent à dire que, sans marque forte, sans investissements conséquents et sans une ­diversification de leurs services en dehors de leur activité traditionnelle - merchandising, vidéos à la demande, sex live cam, boutiques en ligne de sextoys et innovations (comme les films en 3D, par exemple) -, impossible d'espérer survivre.