Les Atelières : histoire d'une PMI à bout de souffle en guerre contre le système
Créée en 2012 par des ex-Lejaby, la PMI Les Atelières a bien failli mettre la clé sous la porte en mars 2014. Après d'âpres discussions avec les banques, une rencontre avec le gouvernement et une souscription nationale, l'entreprise rhônalpine de lingerie de luxe sort enfin la tête de l'eau. Récit.
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Élue Jeune entreprise de l'année 2013 lors des derniers Trophées Chef d'entreprise magazine, la PMI Les Atelières fait figure d'emblème dans un secteur du textile français ravagé par les délocalisations. Fin 2012, Muriel Pernin, directrice d'une agence de communication s'est associée à des ex-ouvrières de la Maison de lingerie Lejaby pour fonder l'atelier de confection rhônalpin.
Son credo : la sous-traitance de lingerie de luxe made in France pour les grandes marques de l'habillement et du textile. Persuadée que c'est par la valorisation des savoir-faire d'exception qu'elle tirera son épingle du jeu, Muriel Pernin mise sur un management participatif et investit dans des plans de formation pour renforcer la polyvalence des 26 salariés de l'époque. Objectif : atteindre 1,1 m€ de chiffre d'affaires en 2013. [Lire l'article que nous leur avons consacré en 2013 : Les Atelières croient en la lingerie made in France].
Les Atelières aujourd'hui
Près d'un an plus tard, l'affaire a bien failli tourner à la catastrophe. Fin 2013, le verdict tombe : Les Atelières ne réalise que 400 000 euros de chiffre d'affaires. Pire, l'atelier, au bord de la liquidation judiciaire, enregistre 550 000 euros de pertes.
" Notre organisation initiale, à la croisée entre la production industrielle et confection sur mesure, n'était pas adaptée à la fabrication de petites séries comme les nôtres. Nous perdions du temps sur certaines opérations, nous peinions à tenir les délais, nous rongions nos marges. Aidés par un ingénieur de l'INSA de Lyon dans la construction de notre propre modèle de production, nous avons depuis retrouvé une bonne productivité mais pas assez pour rattraper notre retard, déplore la p-dg Muriel Pernin qui nuance : N'importe quel patron de start-up vous le dira, on ne devient pas rentable du jour au lendemain ! "
Après plusieurs refus de prêts des banques et de Bpifrance, ça en est trop pour la dirigeante qui pousse un ultime cri de révolte dans les médias début mars. L'affaire des Atelières remonte jusqu'au gouvernement. Les ministres du Redressement productif et à l'Économie sociale et solidaire eux-mêmes se saisissent du dossier et reçoivent personnellement la dirigeante.
Les banques et Bpifrance finissent par accepter de soutenir la PMI de 30 salariés à une condition : la recapitalisation préalable de ses fonds propres. Muriel Pernin ouvre une souscription publique nationale. Résultat, en deux semaines, l'entreprise est parvenue à collecter 657 150 euros auprès des Français et des investisseurs privés.
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Un sauvetage entériné par l'assemblée générale de la coopérative ce 21 mars 2014. " Les participations affluent encore. Si bien que nous devrions voter une deuxième recapitalisation en juin d'au moins 150 000 euros. C'était inespéré ! ", se réjouit la dirigeante. Et d'ajouter, pragmatique : " j'ai respecté ma part du contrat, aux banques de respecter la leur ". L'objectif : un prêt de 350 000 euros.
D'autant que, malgré les difficultés, les perspectives d'activité sont encourageantes pour 2014. De 18 000 pièces produites en 2013, l'atelier devrait en produire 35 000 cette année.
Plus sereine mais toujours aussi déterminée, Muriel Pernin se focalise désormais sur les prochains défis à relever. Parmi les projets, accompagner les jeunes créateurs à la recherche d'atelier et ouvrir une e-boutique commercialisant les produits de grandes marques confectionnés à Villeurbanne à côté de ceux des propres créations des Atelières. Ce qui devrait leur permettre de générer 900 000€ de CA en 2014 et d'atteindre l'équilibre d'ici à 2015. La coopérative est ainsi bien décidée à se tisser un avenir à la mesure de son ambition.
La vie de l'atelier expliqué en images :
Fiche repères
Activité :Fabrication de dessous
Ville : Villeurbanne (Rhône)
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Forme juridique : SA coopérative à conseil d'administration
Création : 2012
Dirigeante : Muriel Pernin, 51 ans
Effectif : 30 salariés
CA 2013 : 400 k €