Dynamiques d'entreprendre : entre séduction de l'autre et réalisation de soi
Crises économiques, volatilité des marchés, conflits en tous genres, nomadisation des interactions humaines, enjeux climatiques et décarbonation, avènement de l'Intelligence Artificielle... Choisissez votre sujet, le dénominateur commun est sans équivoque : le monde d'aujourd'hui est instable, fluctuant, incertain. Prenez l'adjectif qui vous conviendra le mieux, collez-le à l'élément de contexte qui vous intéresse le plus, l'agrégation fonctionnera.
Je m'abonneLa dynamique d'entreprendre, c'est jouer de cette instabilité, et avec elle, pour préfigurer le monde de demain, dans un environnement si mouvant. C'est mettre en mouvement un contexte qui l'est déjà, donc le faire autrement. Proposer une variante à une variante, en un sens. Or pour ce faire, il est essentiel de capter ce mouvement, de l'intérioriser... jusqu'à le devenir ?
Faire pour être - être pour faire
Les soft skills sont sur toutes les lèvres, le savoir être est devenu aussi important que le savoir-faire, voire plus. L'automatisation remplace peu à peu des dimensions dont on pensait encore il n'y a pas si longtemps qu'elles seraient toujours l'apanage de l'humain. Médecine de pointe, photographie, la technologie évolue si vite et devient si performante que la définition de la pertinence de l'humain passe non plus par sa capacité à faire mais par sa capacité à être.
Se mettre en mouvement, adopter une dynamique d'entreprendre nécessite un état d'esprit créateur et créatif. Définir des options, anticiper une problématique, prendre des risques. L'esprit d'aventurier devient non plus le pouls de quelques-uns, en marge du monde, mais la nécessaire vibration d'un présent ancré dans son époque. Apprendre à être plutôt qu'apprendre à faire, conjuguer la complexité du monde à l'envie toujours plus forte d'en décoder les enjeux, savoir être enthousiaste et curieux, tout faire pour échapper à ses propres rigidités de pensée ; autant de posture qui deviennent alors un leitmotiv commun à tous ces entrepreneurs.
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Mais savoir être, ça ne s'apprend pas. On peut apprendre à se comporter comme un entrepreneur (au sens large) mais pas apprendre à être un entrepreneur. Et c'est bien normal. Là où pendant de nombreuses années, l'uniformisation était devenue la condition sine qua non de réussite, la standardisation la panacée d'un modèle, cette ligne a bougé. LA place est désormais aux agitateurs du bocal, aux trouble-fêtes. Or pour qu'ils agissent, faut-il encore que la fête existe. Que le bocal les accueille. Le monde est construit de disparités, de perceptions différentes, et c'est cette diversité qui rend la dynamique d'entreprendre possible et les entrepreneurs pertinents. C'est le pas de côté qu'ils proposent, leur regard en biais vis-à-vis du cadre qui les rend singuliers. Dans le contexte d'une entreprise par exemple, la dynamique d'entreprendre peut-être révélée, pas inculquée. Ce qui change, c'est qu'il est désormais essentiel que tout le monde la comprenne. La dynamique d'entreprendre est devenue un code nécessaire à la bonne lecture du monde contemporain.
Faire pour soi, avec l'autre
Entreprendre, c'est une forme de séduction. Cela part d'un désir personnel, qui se révèle au contact de l'autre. C'est la réponse à une attente, et on est séduisant parce qu'on répond à une attente. C'est anticiper un désir, percevoir une alchimie, travailler à une recette pour l'atteindre, voire la reproduire. Or séduire c'est se mettre en danger, c'est accepter l'incertitude d'un élément qui ne nous appartient plus totalement, accueillir l'autre dans mon intimité pour lui ouvrir les portes de mon for intérieur.
C'est aussi une question de temps, de chronologie, de timing. Les anciens Grecs avaient un mot pour dire cela : le kairos, le moment opportun qu'il faut savoir percevoir, identifier et saisir. C'est faire des allers retours constants entre le besoin de l'autre et mon idée, donc c'est analyser en permanence le bon moment pour lui proposer la bonne solution, mais être toujours aux aguets pour détecter le moindre signal faible, la moindre opportunité. La dynamique d'entreprendre est en ce sens aussi un état d'alerte permanent qui suppose une hypervigilance. Une ultra-sensibilité à un environnement et à ses enjeux. Or l'Autre est une partie essentielle de cet environnement. Qu'il soit client, partenaire, collaborateurs, concurrent, prospect, il existe. Sa seule existence en fait un sujet d'attention, puisqu'elle confère une perception, une sensibilité, une attente différente de celle de son observateur. Être entrepreneur, c'est nécessairement regarder vers l'autre, avec l'autre ou par l'autre. L'altérité est une partie fondamentale de la dynamique d'entreprendre. « On passe une moitié de sa vie à attendre ceux qu'on aimera et l'autre moitié à quitter ceux qu'on aime », écrivait Victor Hugo. L'autre est toujours une entité par laquelle l'entrepreneur se positionne.
Nous vivons dans un contexte multidimensionnel, dans lequel tout va toujours plus vite, dans lequel la question appelle une réponse immédiate, dans lequel l'imaginaire a de moins en moins de place puisque le réel empiète constamment sur lui, se l'approprie même parfois. La dynamique d'entreprendre s'inscrit dans ce nouveau monde en lui proposant une alternative plus poussée encore, plus instable, plus perturbatrice. Après tout, moins fois moins égale plus. Donc déstabiliser un monde instable, ne serait-ce pas, en quelque sorte, lui conférer une forme de stabilité ? Le mouvement nous dépasse autant qu'il nous englobe, il faudra toujours des éléments perturbateurs pour conserver et absorber ce mouvement. « Il n'y a que deux façons de vivre sa vie : l'une en faisant comme si rien n'était un miracle, l'autre en faisant comme si tout était un miracle », disait Einstein (qui avait oublié d'être comme tout le monde). Je vous laisse deviner lequel des deux est habité d'une dynamique d'entreprendre ? N'oublions pas : la dynamique est une entreprise et l'entreprise, une dynamique.
Serge Masliah a commencé sa carrière au début des années 90 en tant que chef de produit chez Saari dont il a ouvert la filiale espagnole à Madrid. En 1997, il intègre Sage en tant que Directeur du Marketing Produit, puis devient Directeur de l'Administration avant de prendre la fonction de Directeur des Services. En 2004, il est nommé Directeur Général du Pôle Experts Comptables et se rapproche des entrepreneurs et des grands comptes en prenant en charge, sept ans plus tard, les marchés spécialisés et le département PME. En 2015, il est nommé EVP - Directeur Général de Sage France et, en 2017, il devient EVP - Directeur Général Europe du Sud. En 2019, il rejoint Kyriba en tant que DG pour l'Europe du Sud et accompagne fortement la croissance de l'éditeur, tant sur les comptes stratégiques qu'au travers du réseau de partenaires qu'il a mis en place.