MENTOR : Clément Benoît : « Je n'ai jamais été très bon à l'école ni passionné par les études »
Clément Benoît, 40 ans, a toujours été un homme hyperactif avec une envie de faire les choses différemment et de ne jamais rentrer dans le moule. Cette énergie et cette créativité, il les a mises au service de l'entrepreneuriat pour faire bouger les lignes, changer le monde.
Je m'abonneClément a toujours eu cela dans le sang. À 10 ans, il imprimait une gazette qu'il vendait dans les rues de Paris. À 14 ans, il effectuait son premier stage en entreprise dans une société suédoise qui vendait des ramettes de papier par téléphone. Le jeune homme évoluera dans le monde de la technologie pendant une vingtaine d'années. Il crée sa première start-up à l'âge de 21 ans : « Je n'ai jamais été très bon à l'école ni passionné par les études », confie l'entrepreneur.
Sa première entreprise s'appelle Resto-In, plateforme en ligne de food delivery, précurseur d'UberEats et Deliveroo, mais un peu trop en avance sur le marché. « À l'époque, il fallait aller convaincre les restaurateurs de livrer des repas et ce n'était pas évident d'évangéliser le marché », admet-il. Il allait à l'université le matin, démarchait les restaurants l'après-midi et livrait le soir avec des amis.
Une entreprise qu'il a revendue en 2015 pour 50 M€. Piqué à l'entrepreneuriat, Clément Benoît enchaîne les créations. L'expérience Resto-In lui permet d'explorer l'univers de la livraison et les problématiques qui y sont associées. De son constat terrain, il crée Stuart, spécialisée dans la livraison du dernier kilomètre.
L'entreprise est un carton et se déploie dans plus de 120 villes en Europe avec des centaines de collaborateurs. Il crée ensuite Fit House, une application et des clubs proposant des cours de fitness collectifs. La société est née à New York. « Tout va beaucoup plus vite aux États-Unis ! Les gens sont plus ouverts indépendamment de leur statut social. Aucune porte n'est fermée, tout le monde vous reçoit, vous recommande, vous introduit... Il est aussi plus difficile de trouver sa place sur ce marché hypercompétitif », confie l'entrepreneur.
Depuis 2021, il est à nouveau en Europe dans le Food Delivery avec Clone, une entreprise qu'il a cofondée avec son associé, Alex Haggai. Clone est une foodtech qui permet aux marques locales de la restauration d'étendre leur présence sur l'ensemble du territoire en rendant disponible leur menu à la livraison uniquement sur les plateformes de livraison. Depuis sa création, l'entreprise a levé 105 millions d'euros et compte 250 collaborateurs en France, en Belgique, en Espagne et aux Pays Bas.
Money, Money, Money
Au cours de ses diverses expériences entrepreneuriales, Clément Benoît aura levé plusieurs centaines de millions d'euros. « Le projet doit être viable, innovant et posséder une valeur ajoutée pour toutes les parties engagées. D'autre part, il faut évaluer la capacité des fondateurs à porter le projet », avertit l'entrepreneur. « Si ces éléments sont réunis, et qu'en plus le porteur de projet est doué d'éloquence et bon vendeur, convaincre n'est plus un souci », rassure-t-il.
Les entrepreneurs le savent bien : lever des fonds est un coup d'accélérateur pour le développement d'une entreprise. Cela permet de croître plus vite, de se donner des objectifs plus élevés, d'accélérer le recrutement et de créer une locomotive sur un secteur. Lever des fonds, c'est aussi une rapide croissance. Il avertit : « Il est facile de sombrer dans le monde des start-up où tout doit toujours aller plus vite, cela étant dit, je suis entrepreneur depuis l'âge de 21 ans et je n'arrêterai jamais. »
Des échecs et des leçons. Ce n'est pas le tout d'avoir une bonne idée, il faut surtout un caractère et être prêt à essuyer les plâtres, les difficultés et les surmonter ! Et même dans la réussite, l'envie de jeter l'éponge arrive, il faut rester positif. C'est un "métier" qui s'apprend sur le terrain : comment recruter, monter un projet, comment le financer, etc. Parfois, même en faisant ce qu'il faut, les choses ne se déroulent pas comme prévu et l'échec fait aussi partie du voyage. Clément Benoît l'a expérimenté à ses dépens lors de l'aventure Fit House. Après une levée de fonds rapide de plus de 15 millions de dollars, le Covid et le confinement ont mis fin à l'aventure au bout de seulement deux ans. « C'était très difficile mentalement d'assumer un échec après deux exits consécutifs, la responsabilité d'avoir déplacé sa famille aux États-Unis, le fait de faire perdre de l'argent pour la première fois à des investisseurs, de fermer des bureaux... Mais aussi de devoir remercier les collaborateurs », se désole le chef d'entreprise. Des expériences qui lui ont permis de forger une nouvelle vision des choses.
Vision
Lorsqu'il revêt sa casquette d'investisseur, Clément Benoît choisit de miser davantage sur un homme que sur le projet en lui-même. « Une bonne décision se prend selon moi avec un mix d'intuition et de pragmatisme. Sentir qu'il faut aller dans une direction, avoir une vision et s'assurer que les étapes pour atteindre cette vision sont réalistes et atteignables. Il est important aussi de prendre en considération l'impact indirect de ses décisions sur des tiers : une décision peut paraître bonne à court terme, mais négative à long terme avec un impact indirect sur votre entourage », explique l'homme d'affaires qui a déjà investi dans une cinquantaine d'entreprises, dont Hugging Face ou Aircall. « Je leur partage mon retour d'expérience sur des situations qu'ils rencontrent pour la première fois. De leur côté, ils m'enrichissent d'une vision et d'une manière différente d'entreprendre », ajoute-t-il. S'agissant des échecs, pour Clément Benoît plusieurs leçons sont à tirer : « Rien n'est acquis, le futur est imprévisible et personne n'est invincible. Il faut être agile en permanence, se remettre en question à chaque instant tout en étant sûr de soi et mettre l'ego de côté. L'ego peut être un formidable allié mais aussi son pire ennemi », confie l'homme d'entreprise. Malgré cette mésaventure, l'entrepreneuriat reste pour Clément Benoît bien plus qu'un simple job. « Entreprendre, c'est une façon de se réaliser. C'est une manière de vivre qui fait partie entièrement de moi », conclut-il.
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