[Dossier] Apprendre de ses échecs : la meilleure manière de réussir ?
La France accueille désormais chaque année des FailCon, grands-messes d'entrepreneurs venus raconter leurs déboires et, bien souvent, leur rebond. Roxanne Varza, directrice de la Halle Freyssinet, a orchestré l'importation du concept en France. "L'objectif est d'encourager les dirigeants à parler des leçons qu'ils ont apprises et d'aider la future génération d'entrepreneurs à éviter de reproduire les mêmes erreurs", explique-t-elle, saluant le soutien de Fleur Pellerin, alors ministre déléguée aux PME et à l'Économie numérique, à cette initiative. "Cela a contribué à faire passer un vrai message à l'écosystème."
Autre signe de ce cheminement, l'indicateur 040 de la Banque de France, qui fichait publiquement les dirigeants contraints à la liquidation judiciaire, a été supprimé fin 2013.
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Bagage et expérience
Que l'on ait été confronté au dépôt de bilan ou à l'obligation de pivoter, que l'on ait dû abandonner un marché ou simplement revoir son business model, la première vertu de l'échec est évidemment pédagogique. Sur un plan collectif autant qu'individuel. En libérant la parole sur ce qu'on a vécu, on prévient les autres et on apprend soi-même, pour mieux (re)construire et avancer ensuite.
"L'échec est un apprentissage intellectuel et humain accéléré." Marc Rougier, Scoop.it
"Au moment de la liquidation de ma première entreprise, j'enseignais en école de commerce. J'ai pu faire de mon expérience un cas, en parler et la valoriser, puisque c'est grâce à ce cours que j'ai vraiment compris pourquoi j'avais échoué. J'ai appris de toutes mes erreurs et mis en place ce qu'il fallait pour ne pas les reproduire", raconte Sylvain Tillon, qui a depuis cofondé deux autres entreprises pérennes, Sydo et Tilkee. Après la phase de deuil, nécessaire et salvatrice, l'échec est donc bénéfique à condition de l'analyser avec lucidité. Sans se dédouaner en accusant le marché ou la conjoncture, mais en admettant aussi qu'on n'est pas toujours responsable de tout. Il permet alors de se recentrer sur ses véritables compétences, de repositionner son business, d'ajuster sa méthode, voire d'apprendre à abandonner.
Pour Guillaume Gibault, fondateur du Slip Français, "un échec bien supporté permet de grandir, de continuer en apprenant de ses erreurs. Cela consiste à expérimenter des choses et à mesurer ce qu'on ne fait pas bien pour le faire mieux ensuite". Il admet avoir tâtonné pour identifier le bon canal de distribution pour ses sous-vêtements made in France. En voulant minimiser les risques et "faire comme tout le monde, aller là où tout le monde allait, on a gaspillé du temps et de l'énergie avant de comprendre que c'était sur le Web qu'on était meilleur et vraiment différenciant".
Échouer vite ?
Si l'erreur doit s'appréhender comme une possibilité voire une probabilité, il convient donc de l'anticiper au maximum pour limiter la casse et ne pas se laisser entraîner trop loin. En ce sens, le fail fast à l'américaine encourage à intégrer l'erreur dans son mode opérationnel, à expérimenter son projet par des itérations successives pour éprouver rapidement les limites de son idée et réagir en fonction des résultats observés.
"Dans l'entrepreneuriat, il faut tester des hypothèses en permanence! Il n'y a pas de bonne réponse à la plupart de questions qu'on se pose. Mieux vaut donc se lancer, faire plein de petites itérations au lieu de gaspiller du temps et des ressources pour un produit qui fera un flop total", recommande Roxanne Varza, qui préconise plutôt d'ajuster sa proposition continuellement.
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