Covid-19 : comment réunir le CSE ?
Acteur incontournable de la gestion de crise, le CSE est plus que jamais sollicité par l'employeur. Afin de concilier les impératifs de sécurité en période de pandémie et les prérogatives des élus, le gouvernement a pris des mesures exceptionnelles en encourageant notamment la visioconférence.
Je m'abonnePendant cette période, le CSE dont la mission est de promouvoir la santé, la sécurité et l'amélioration des conditions de travail est au coeur du dispositif de prévention des risques. Quelle que soit la taille de l'entreprise, il apparaît indispensable qu'il soit consulté sur les mesures mises en place au sein de l'entreprise pour prévenir le risque de contamination et notamment sur la mise à jour du Document Unique d'Evaluation des Risques ; ce qui a été rappelé de manière vigoureuse par la Cour d'appel de Versailles dans sa décision du 24 avril 2020 dans l'affaire " Amazon " (1).
Dans les entreprises de plus de 50 salariés, le CSE est soumis à des consultations spécifiques sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise (durée du travail, conditions d'emploi, aménagements importants modifiant les conditions de santé et de sécurité, etc.). En cette période, il est en particulier consulté sur le recours à l'activité partielle et sur les dérogations aux règles relatives à la durée du travail et aux repos.
Visioconférence, conférence téléphonique ou à défaut messagerie instantanée
Afin d'éviter les réunions physiques des représentants du personnel, le gouvernement a pris des mesures exceptionnelles par une ordonnance du 1er avril 2020, complétée par décret du 10 avril 2020, autorisant le recours à la visioconférence ou à la conférence téléphonique pour l'ensemble des réunions du CSE (ou du CSE central) après que l'employeur en a informé leurs membres(2).
A titre subsidiaire seulement, lorsqu'il n'est pas possible de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique ou lorsqu'un accord d'entreprise le prévoit, les réunions peuvent se tenir par messagerie instantanée.
Le gouvernement a donc simplifié et élargi le dispositif de droit commun qui autorise le CSE (ou le CSE central) à tenir ses réunions par visioconférence sous réserve d'un accord entre l'employeur ou les membres élus, ou à défaut, dans la limite de 3 fois par an(3).
Ce recours exceptionnel aux nouvelles technologies est autorisé pour les toutes instances représentatives (comité de groupe, comité d'entreprise européen) et pourrait être - à notre sens - appliqué à la Commission santé, sécurité, conditions de travail du CSE.
L'état d'urgence sanitaire entré en vigueur sur l'ensemble du territoire national le 24 mars 2020 avec la publication de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 est prolongé jusqu'au 10 juillet 2020 par la loi du 11 mai 2020. Initialement le gouvernement avait indiqué dans le projet la date du 24 juillet.
Les moyens techniques utilisés doivent présenter un certain nombre de garanties
Cet assouplissement législatif ne dispense pas pour autant l'employeur de veiller aux garanties liées à l'utilisation des dispositifs techniques, conformément aux dispositions de droit commun(4). Ainsi ces derniers doivent garantir(5) :
- l'identification des membres du comité et leur participation effective en assurant la retransmission continue et simultanée du son et/ou de l'image des délibérations selon qu'il s'agit de la visioconférence ou d'une conférence téléphonique, et la communication instantanée des messages écrits lorsque la réunion est tenue par messagerie instantanée ;
- l'anonymat en cas de vote à bulletin secret. Le système de vote doit pouvoir assurer la confidentialité des données transmises ainsi que sécuriser les moyens d'authentification, d'émargement, d'enregistrement et de dépouillement des votes.
Enfin, les réunions des instances représentatives doivent scrupuleusement respecter les étapes suivantes(6) :
- L'engagement des délibérations est subordonné à la vérification que l'ensemble des membres a accès à des moyens techniques répondant aux conditions susvisées ;
- Les débats sont clos par un message du président à l'instance, qui ne peut intervenir avant l'heure limite fixée pour la clôture de la délibération ;
- En cas de vote, ce dernier a lieu de manière simultanée : les participants disposent d'une durée identique pour voter à compter de l'ouverture des opérations et au terme du délai imparti, le président à l'instance en adresse les résultats à l'ensemble de ses membres.
Plus que jamais, cette pandémie aura fait entrer les relations de travail et le dialogue social dans l'ère du 2.0 !
Pour en savoir plus
Stéphanie Zurawski est avocat au Barreau de Paris. Elle assiste des entreprises et des groupes français et étrangers dans tous les secteurs du droit social. Elle a notamment développé une expertise en contentieux collectifs à forts enjeux financiers, restructurations et transferts d'entreprises. Elle est membre du réseau Avosial.
(1) Cour d'appel de Versailles, 14e Chambre, n°20/01993, Amazon Logistique France SAS/ Union Syndicale Solidaires et autres
(2) Article 6 de l'ordonnance n°2020-389 du 1er avril 2020 et décret 2020-419 du 10 avril 2020
(3) Article L. 2315-4 du Code du travail
(4) Article D. 2315-1 du Code du travail
(5) Articles 1et 2 du décret 2020-419 du 10 avril 2020
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(6) Article 2 du décret 2020-419 du 10 avril 2020