[Dossier] Croissance externe : un coup d'accélérateur pour votre PME
Donner du sens
Les objectifs des stratégies de croissance externe sont communément admis : diversification de l'activité, acquisition de nouvelles compétences, maîtrise d'une technologie, prospection de nouveaux marchés y compris à l'international, etc. Ils guident le choix de la cible. L'étude de Xerfi distingue quatre types d'opérations : la croissance externe horizontale (dans un même secteur d'activité), la croissance verticale (les PME appartiennent à la même filière mais leur activité diffère), la croissance externe dite de diversification liée (les deux PME présentent des complémentarités) et, enfin, la croissance externe dite de diversification non liée (regroupement d'entreprises appartenant à des secteurs différents).
Quelle que soit sa forme, l'exercice demeure complexe. Dans "Acquérir pour bondir" (2015) , Bpifrance Le Lab répertorie cinq grandes difficultés qui se dressent face à une PME désireuse de se lancer : faire le bon diagnostic, identifier la cible, ne pas se tromper de cible, conclure le deal et réussir l'intégration. Autant dire que le "build up" répond à une méthodologie bien cadrée. Or, les chefs d'entreprise sont des hommes pressés qui, le nez dans le guidon, ne prennent pas toujours le temps suffisant pour mûrir leur réflexion.
Approcher le marché caché
Plusieurs outils permettent d'identifier quelques cibles. Parmi les plateformes dédiées à la cession de TPE et PME, Bpifrance propose une Bourse de la transmission (56 236 affaires à reprendre à date), la place de marché Fusacq diffuse environ deux mille offres de PME (avec des entreprises qui réalisent en moyenne 1,8 million d'euros et emploient seize salariés) et cinquante mille offres de TPE sur Place des Commerces. Les réseaux consulaires fournissent également des contacts.
La recherche peut s'avérer rapidement chronophage. C'est pourquoi les acquéreurs font appel à des spécialistes. Lorsqu'il décide de mener sa première opération de croissance externe, Thierry Petit-Perrin, président d'Hisi, un fournisseur de cloud privé d'une soixantaine de salariés, cherche d'abord seul : "Les services de la CCI me font perdre du temps en me proposant des entreprises qui ne correspondent pas à nos besoins", affirme-t-il. Il contacte alors Françoise Louvel, gérante de Discern Partners. "Elle propose un service clés en mains, de l'identification du besoin à celle de la cible, puis à la conduite des premiers rendez-vous et à une première analyse", témoigne-t-il.
Discern Partners cible des entités sur le marché "caché", c'est-à-dire auprès de dirigeants d'entreprise qui n'ont pas encore décidé de vendre leur entreprise. "J'approche ces dirigeants directement en leur expliquant pourquoi mon client les cible, puis je les relance et, s'ils acceptent, j'organise une première rencontre", commente Françoise Louvel. D'autres conseils utilisent, peu ou prou, la même méthode. Alexis Barbé, gérant de Capessor, développe également un service d'approche directe. "L'identification de la cible passe par une recherche documentaire. Nous scrutons les exposants aux salons professionnels, nous enquêtons sur leur présence sur les marchés en local ou à l'international, puis nous calons un plan d'action", détaille Alexis Barbé.
"Souvent, l'opération naît d'une opportunité, les dirigeants se connaissent et entament les discussions", observe Alexis de Bertren, associé fondateur de DBLE, spécialisé dans l'accompagnement à la reprise et à la croissance externe. "Nous sommes en veille sur notre marché pour repérer d'éventuelles acquisitions ou des partenariats", confirme Antoun Sfeir, président d'ePressPack, start-up de trente-cinq salariés spécialiste de la digitalisation des relations média, qui a racheté PressKing fin 2014. Il arrive enfin que le cédant contacte lui-même un acquéreur potentiel. "Le groupe Sage nous a proposé la reprise de sa division e-commerce, une activité qui nous permet d'avoir accès à un réseau de revendeurs", se félicite Marc Schillaci, p-dg d'Oxatis, un éditeur de logiciel d'e-commerce.
Évaluer les synergies potentielles
Le rachat d'une entreprise reste néanmoins un exercice délicat. Alexandre Pham, coprésident d'Alphyr, entreprise de cent vingt salariés qui a racheté un réseau d'agences d'intérim spécialisé dans le domaine médical, compétence dont son propre réseau ne disposait pas, confesse volontiers qu'il n'y serait peut-être pas allé s'il n'avait pas vécu des expériences similaires en tant que salarié. "Le pari est risqué mais j'avais appris la méthode, je maîtrisais le vocabulaire, j'en connaissais les étapes, et je savais comment on valorise une société, quels points sont à négocier. Ces connaissances m'ont rassuré", dévoile-t-il.
Pendant la phase de négociation, les parties trouvent un terrain d'entente ou passent à autre chose. "Nous avons réussi à instaurer un climat de confiance avec les cédants, qui étaient d'ailleurs soucieux que la transition se passe bien. Du coup, lors de la négociation, chaque partie a fait un pas vers l'autre et trouvé rapidement un compromis pertinent, au niveau du prix et des conditions de la cession", témoigne Alexandre Pham. Le prix est fixé en amont, traditionnellement "suivant une combinaison de méthodes éprouvées", précise Thierry Denjean, président de Denjean & Associés, société d'expertise comptable, d'audit et de conseil dédiée aux PME de croissance. Par exemple, un mixte entre la méthode des discounted cash-flows (DCF) qui évalue les flux futurs de trésorerie pour déterminer la valeur de l'entreprise, la méthode de l'actif net réévalué et celle de la rentabilité des résultats futurs.
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