[Portrait] Jean-David Chamboredon, la trajectoire d'un Pigeon
Beaucoup ont découvert Jean-David Chamboredon fin 2012, lors de la fronde des Pigeons. Érigé, presque malgré lui, en héraut de la révolte de milliers d'entrepreneurs, le président du fonds d'investissement ISAI est en réalité, depuis des années, une figure de proue de la French tech parisienne.
Je m'abonneC'est par un vendredi d'automne que tout bascule. Nous sommes le 28 septembre 2012. Alors que les débats sur le projet de loi de finances 2013 agitent la classe politique, Jean-David Chamboredon, à la tête du fonds d'investissement ISAI, tire la sonnette d'alarme contre le projet de taxation des plus-values de cession sur le site de La Tribune. Blogueur et twitto aguerri, il est pourtant loin de se douter de l'effet de la grenade qu'il vient de dégoupiller.
Dans les heures qui suivent, sa tribune est massivement relayée sur les réseaux sociaux. Une caisse de résonance amplifiée par la création du mouvement des Pigeons dont il devient, malgré lui, le porte-parole, jusqu'à ce que le gouvernement finisse par reculer. Deux ans plus tard, il nous reçoit dans les locaux haussmanniens du fonds d'investissement dont il est le président, à deux pas de l'Arc de triomphe. Sa barbe poivre et sel de trois jours, ses baskets blanches et sa veste bleu marine froissée dénotent dans cet environnement classieux.
Ses premières fois
Son premier job d'investisseur
Ses premiers pas dans l'univers de l'investissement, il les fait dès 1999 chez Europatweb, la holding internet de Bernard Arnault, en tant que CTO (chief technology officer). «À la base, j'ai été chassé pour mon profil technique», précise Jean-David Chamboredon. L'explosion de la bulle internet passe par là mais, loin de le faire reculer, le conforte dans son intérêt pour le métier.
Sa première entreprise
"Différent, remarquable". Telle est la signification du mot "ISAI" en japonais. «Et c'est ce type d'entrepreneurs et de projets que nous recherchons depuis l'origine.» Une douzaine de start-up du Web ont été soutenues (Shopmium, Pubeco, InstantLuxe, etc.), sur pas moins de 1 500 dossiers déposés chaque année. Jean-David Chamboredon chapeaute une équipe de six collaborateurs.
De l'épisode des Pigeons, il tire aujourd'hui un constat en demi-teinte : «Certes, il y a eu la reconnaissance d'une aberration économique. La politique de l'offre adoptée depuis par le gouvernement va plutôt dans le bon sens. Après, il y a beaucoup de contradictions entre les discours et les actes. Le niveau de confiance nécessaire à un vrai rebond économique n'est pas au rendez-vous», analyse l'investisseur d'une voix grave et posée, un brin blasée. Rien n'a changé selon lui, et pourtant. Son existence a pris depuis un tout autre tournant. Sûr de lui, calme, pédagogue, le polytechnicien à la carrure de rugbyman et au débit d'une régularité presque sans faille se plie encore régulièrement à l'exercice minuté des plateaux télévisés.
De l'ombre à la lumière des projecteurs
Celui qui évoluait jusque-là dans l'ombre d'entrepreneurs du Web à succès tels que Fred Mazzella (Blablacar) ou Pierre Kosciusko-Morizet (PriceMinister), est passé du jour au lendemain sous les feux des projecteurs, jusque dans les coulisses du pouvoir. Et y est resté. «Aujourd'hui encore, il passe la moitié de son temps à Bercy, chez France Digitale (association qu'il a cofondée avant la fronde, NDLR) ou au Medef», commente Caroline, sa seconde épouse, encore effarée par le «véritable tsunami» qu'ont traversé son mari et sa famille fin 2012.
Investi, Jean-David Chamboredon ne l'est jamais à moitié. Décrit par ses proches comme un "work addict", celui qui a débuté bien loin de l'investissement - dans le conseil en informatique - ne décroche jamais. «Il est habité par son travail», dépeint son ami et associé Pierre Kosciusko-Morizet. «Soir et week-end, il ne coupe jamais son téléphone. Ce qui peut être considéré comme une qualité professionnelle est parfois contrariant dans le cadre privé», nuance sa femme, avec qui il a eu son deuxième enfant, - une fille aujourd'hui âgée de huit ans -, après un premier mariage. Seule exception à la règle, «le golf, quatre heures par semaine, durant lesquelles je ne pense à rien d'autre». Un rythme de vie boulimique dont le quinqua porte aujourd'hui la marque dans le cerne de ses yeux bleu azur.
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