Alors que l'instabilité politique frappe durement l'économie française, les entrepreneurs et dirigeants de PME font face à une conjoncture inquiétante. Bernard Cohen-Hadad, président de la CPME Paris Île-de-France et du think tank Étienne Marcel, partage son analyse sur les défis actuels, les attentes vis-à-vis du gouvernement et les pistes pour renforcer la résilience des entreprises.
Comment les entrepreneurs perçoivent-ils l'instabilité politique actuelle ? B.C-H. « Nous vivons une période de grande incertitude. L'absence de stabilité gouvernementale et les politiques de type "stop and go" génèrent de la défiance. Les consommateurs réduisent leurs dépenses ou épargnent massivement, ce qui impacte directement les entreprises. Quant aux entrepreneurs, ils hésitent à embaucher ou à investir dans ce climat d'instabilité. Cela fragilise aussi les exportations : de nombreuses entreprises redoutent de nouvelles barrières commerciales ou fiscales. »
Quels secteurs sont les plus touchés par cette situation ? « Certains secteurs souffrent particulièrement, comme le bâtiment, l'hôtellerie-restauration, le commerce de proximité et les services. Ces activités, qui sont au coeur de notre économie locale, peinent à trouver des perspectives dans ce contexte. À l'inverse, les entreprises opérant sur le web, notamment celles qui importent des produits manufacturés, semblent mieux s'en sortir. »
Observez-vous un ralentissement des investissements ? « Oui, clairement. L'incertitude fiscale et économique pousse de nombreuses entreprises à reporter leurs décisions d'investissement. Elles préfèrent attendre d'y voir plus clair, notamment sur des sujets comme les taxes de transmission ou les dispositions fiscales à venir. Même les petits investisseurs, qui mobilisent des montants plus modestes, hésitent. Cette crainte généralisée d'un rattrapage fiscal contribue au blocage. »
Quelles sont les propositions de la CPME pour soutenir les entreprises ? « Nous plaidons pour le maintien d'une politique économique favorable à l'offre. Cela implique de poursuivre la baisse des impôts de production, de stabiliser l'impôt sur les sociétés - où la France reste moins compétitive que l'Allemagne - et de soutenir l'apprentissage, y compris dans les entreprises de plus de 250 salariés. Nous demandons également une simplification des dispositifs de partage de la valeur et le maintien des exonérations sur les heures supplémentaires. Ces mesures sont essentielles pour libérer l'activité économique et préserver la compétitivité des entreprises. »
Voyez-vous une lueur d'espoir dans ce contexte difficile ? « Oui, un point encourageant : le gouvernement a récemment affirmé qu'il ne ciblerait pas les entreprises dans ses ajustements budgétaires. C'est un signal positif dans un environnement budgétaire tendu. Cependant, il est crucial de renforcer l'attractivité et la productivité des entreprises, notamment en répondant aux enjeux du numérique et de l'économie circulaire. »
Quel message souhaitez-vous adresser aux dirigeants d'entreprise ? « Depuis 2008, nous avons affronté de nombreuses crises : financières, sanitaires, énergétiques, numériques... Mon message est simple : ne restez pas seuls. Si vous rencontrez des difficultés, tournez-vous vers vos organisations professionnelles ou vos pairs. C'est par la solidarité que nous trouverons des solutions et surmonterons cette période difficile. Malgré les obstacles, il y a toujours des opportunités à saisir. Les entrepreneurs français ont toujours montré une grande résilience, et je suis convaincu qu'ils continueront à le faire. »
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