"Je gère l'Olympique lyonnais comme une entreprise"
Comment, en tant que chef d'entreprise, avez-vous vécu, au moment de l'inauguration du stade et donc à l'aboutissement d'un projet d'une très grande envergure, les instabilités liées à votre changement d'entraîneur (Hubert Fournier a été remplacé au pied levé par Bruno Génésio) et aux difficultés rencontrées par votre équipe suite à ses résultats?
J'évolue dans un métier à spirales, positives quand tout vous réussit... mais aussi négatives lorsque les choses commencent à aller mal. Je devais donc casser cette spirale négative. Ce qui implique déjà de composer avec l'environnement médiatique, en se munissant d'un compte Twitter efficace qui fasse contrepoids. Il faut aussi puiser dans son expérience pour trouver en interne les solutions.
Notre chance, dans ce cas précis, c'était de prendre ce type de décisions avant une opportunité et un risque. Nous avons écrit, avec ce nouveau stade, une nouvelle page et, depuis, les résultats se sont améliorés. Nous sommes revenus à la sixième place du championnat à cette heure.
Mais j'ai l'habitude. Tandis que dans une entreprise traditionnelle une crise peut arriver dans le pire des cas tous les trois à cinq ans, dans le foot c'est toutes les semaines !
Vous dites qu'un club de foot se gère comme une entreprise. Quand vous avez récupéré l'OL, le club était criblé de dettes. Comment l'avez-vous transformé en un acteur incontournable du football français puis européen? Plus généralement, comment fait-on d'une entreprise en difficulté un leader de son marché?
Il faut admettre qu'aucun secteur n'échappe aux règles du marché, y compris le football professionnel. J'ai déposé une plainte contre l'État français à Bruxelles pour être introduit en Bourse, car les autres clubs européens avec qui l'OL était en concurrence pouvaient le faire.
Et même si, à l'époque, le club était une association, j'ai tout de suite essayé de trouver des parallèles avec le monde que je connaissais le mieux, celui de l'entreprise. Ce faisant, j'ai peut-être un peu anticipé le mouvement en France, mais je n'ai fait que suivre une évolution inéluctable.
Aux États-Unis, les clubs étaient déjà organisés comme des entreprises avec, notamment, des franchises. Puis le sport européen, et notamment le football, a suivi les mêmes règles. Aujourd'hui, on le constate encore : aucune profession, même dans des secteurs protégés, n'échappe aux règles de l'européanisation et de la mondialisation.
Quelles sont les stratégies éprouvées chez Cegid que vous avez pu appliquer à l'OL?
Courir sur un terrain et développer des algorithmes ou des webservices dans le Cloud peut paraître différent... Et pourtant, les deux activités recherchent la performance, obéissent aux règles du marché et doivent être construites autour d'un modèle durable. D'ailleurs, les deux se rapprochent de plus en plus. En 1987, l'OL était une association. Aujourd'hui, le football professionnel est structuré en entreprises qui sont toutes des SA.
Lorsque j'ai lancé Cegid, non pas dans un garage mais dans une cave, notre métier consistait à écrire des programmes. Il est maintenant totalement différent. Et en passant de la licence au SaaS, nous nous sommes assuré des revenus récurrents.
C'est exactement le même objectif avec le Stade des Lumières. Le club devient une société d'investissement dans lequel il y a plusieurs équipes, l'une masculine, l'autre féminine, mais aussi une infrastructure permettant d'être moins dépendant des résultats et de créer une valeur ajoutée inédite. Nous avons rompu avec une longue tradition, celle des stades construits par l'État et les collectivités territoriales à des coûts très supérieurs aux règles du marché. La conséquence était alors que nous faisions toujours moins bien que les autres qui, eux, évoluaient dans un secteur concurrentiel normal avec des financements privés.
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