François Asselin : "Je veux avancer sur les seuils sociaux"
Que pensez-vous du projet de la loi Pacte dont l'un des buts consiste à redéfinir le rôle de l'entreprise dans la société ?
Plus de 80 % des Français ont une vision positive des PME et de leur chef d'entreprise. Ce n'est pas un amour béat car ils nous renvoient aussi une certaine obligation, celle de donner du sens au capital. Dans une PME, on sait qui est le patron et quel est le projet de l'entreprise.
C'est un point essentiel, car les jeunes générations sont en mode projet et recherchent du sens dans leur travail. Pour les motiver, il faut un cap clair. L'entreprise, ce n'est pas un lieu d'affrontement et de rapport de forces. C'est d'abord un lieu où l'on peut se réaliser. À nous, chefs d'entreprise, d'être à la hauteur.
Le droit à l'erreur est aussi une façon de revoir les rapports entre l'administration et les entreprises ?
La réglementation est tellement bavarde que pratiquement tous les chefs d'entreprise sont des hors-la-loi potentiels. Il est impossible de tout maîtriser pour un patron de PME. Le droit à l'erreur n'est pas un droit à frauder, mais il donne une chance aux dirigeants de revoir leur copie. On touche ici à la culture de notre pays entre l'administration et ses administrés. C'est une révolution copernicienne. Mais la vraie réforme consisterait à simplifier la réglementation.
Le gouvernement travaille sur une réforme de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Quel est votre regard sur ces réformes ?
Concernant l'apprentissage, nous souhaitons que le coeur de la réforme soit le financement du contrat d'apprentissage. Car le lien entre les centres de formation d'apprentis et les entreprises s'est effiloché et, désormais, il est plus productif pour un patron de CFA d'aller frapper à la porte de la région ou aux OPCA, plutôt que d'aller voir les PME de son secteur. Or, il ne faut pas oublier que les fonds n'appartiennent ni aux régions, ni à l'État, mais qu'ils proviennent des entreprises !
L'orientation n'est-elle pas le problème de fond ?
Tout à fait ! Aujourd'hui, on ne parlera jamais des filières professionnelles à un jeune qui a du potentiel. Si, malgré tout, il souhaite partir dans une filière professionnelle, il aura peut-être contre lui ses parents, voire le corps professoral qui pensera que c'est un gâchis. Après, pour être honnête, ce n'est pas totalement faux. Car en partant rapidement dans une filière professionnelle, pour atteindre le plus haut niveau de qualification, c'est un chemin long et complexe. Il faut une volonté de fer.
Pour réussir cette réforme, il ne faut pas que le choix du jeune en fin de troisième ou de terminale soit déterminant pour la suite. En clair, il faut pouvoir bifurquer facilement et à n'importe quel moment de la filière professionnelle à la filière académique, en fonction de ses capacités. C'est le schéma suisse, où l'on peut être médecin tout en commençant par l'apprentissage.
Que peut-on attendre de PME ! by CPME ?
L'événement aura lieu mardi 12 juin. Je voulais renouveler le concept sur le fond et la forme. C'est le carrefour de tout ce qui concerne la vie des dirigeants de PME et de leur entreprise. Il y aura donc des plénières et des business meetings avec des grandes entreprises. Les institutionnels, comme les ministres, viendront aussi à la rencontre des chefs d'entreprise. Enfin, il y aura de nombreux ateliers concrets et pratiques pour aider les dirigeants comme, par exemple, comment partir à l'export ou comment organiser la succession de sa société.
La France est devenue une vraie terre entrepreneuriale. Mais comment aider les start-up à grandir ?
Le sujet est vaste. Tout d'abord, il y a un problème de taille de marché. Une entreprise qui a de fortes ambitions doit forcément avoir une stratégie à l'export. Ensuite, certaines entreprises à très fort potentiel, appelées scale-up, ont du mal à grandir car nous avons des contraintes propres à la France.
Nous n'avons pas réglé nos problèmes de seuils sociaux. Il y a 2,4 fois plus d'entreprises de 49 salariés que d'entreprise de plus de 50. C'est une réalité car, en passant ce seuil, un chef d'entreprise change de métier. Et, bien souvent, il préférera rester petit.
Le financement est aussi problématique...
C'est vrai. Pour se développer, il faut des capacités d'innovation. Et pour cela, il faut de l'argent. Or, la pression fiscale sur les entreprises françaises est plus forte que sur celles des pays concurrents. Par exemple, il y a sept points de marge de différence entre une PME française et une PME allemande. Pour les financements externes, la culture française n'est pas l'ouverture du capital dans les PME, par peur de perdre du pouvoir.
Enfin, nous avons un souci sur la fiscalité de la transmission. En Allemagne, une entreprise patrimoniale cédée dans le giron familial n'est presque pas imposée. Ainsi, les sociétés perdurent dans le temps et ne s'arrêtent pas à la retraite du dirigeant. Il faut faire la même chose en France.
Bio
1993 : reprise de la PME familiale de charpente Asselin
1996 : signature de la première tranche du marché de l'Hermione, construction de la réplique de la frégate qui emmena le marquis de La Fayette aux États-Unis.
2000 : première affaire à l'export aux États-Unis
2015 : élection le 21 janvier à la présidence de la CPME
2015 : Parade de l'Hermione le 4 juillet dans la baie de New York
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