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États-Unis : terre d'accueil des entrepreneurs

Publié par Céline Tridon le - mis à jour à
États-Unis : terre d'accueil des entrepreneurs

Entreprendre outre-Atlantique est une réalité pour nombre de "frenchies" qui ont choisi de poser leurs valises aux Etats-Unis. Un pays synonyme de business, mais qui doit savoir être appréhendé.

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"Quand nous avions voulu nous lancer, nous avions senti que nous ne serions pas soutenus en France." Triste constat que celui d'Alexandre Robicquet, co-fondateur de la start-up de streaming personnalisé, Crossing Minds. Pour cette entreprise qui délivre une technologie pointue, si l'Hexagone n'a pas su ouvrir ses bras à son innovation, la Silicon Valley s'est elle annoncée comme une évidence. Alexandre Robicquet et ses associés établissent alors leur QG en 2017, année de création de Crossing Minds, à San Francisco. Aujourd'hui, le jeune dirigeant envisage d'ouvrir sa start-up à l'international... et de conquérir la France.

"Ces dernières années, de nombreux efforts ont été fournis en faveur de la french tech, et donc de l'innovation en général ", concède l'entrepreneur. Cerise sur le pancake, il songe même à ouvrir un bureau en France pour y recruter des talents tricolores, triés sur le volet. Car la petite entreprise souffre de la présence de géants comme Google : "D'un point de vue recrutement, nous ne faisons pas le poids. Notre turn-over est trop important car une telle entreprise accapare tous les talents ", commente Alexandre Robicquet. Comme lui, ils sont plus d'un jeune diplômé à avoir fait le choix du pays de l'oncle Sam pour monter leur entreprise.

Visa réduit

Vincent Deruelle, co-fondateur et COO du réseau de dirigeants expatriés French Founders, qui comptabilise plus de 4 000 membres à travers la planète, explique que les États-Unis attirent car le pays est synonyme de... cash. "Les États-Unis demeurent une destination prioritaire quand on veut scaler sa compagnie. C'est un marché dynamique, de consommation importante, occidental et dont la culture n'est pas trop éloignée de celle de l'Europe", justifie-t-il. Sans compter que dans ce pays du "self-made-man", l'entrepreneuriat est très accessible... du moins sur le papier.

Les visas E1 et E2, sésames précieux pour entreprendre aux États-Unis, ont récemment été réduits comme peau de chagrin sous l'administration Trump. De cinq ans auparavant, ils ne sont plus que de 25 mois. De quoi créer une incertitude. "Cela suppose de réussir son installation en à peine deux ans, ce n'est pas sans risque", met en garde Vincent Deruelle.

Pour Pierre Trippitelli, du cabinet new-yorkais de conseil en ressources humaines Perpetual, les entrepreneurs mettent davantage de chances de leur côté s'ils savent se préparer et s'entourer. "Un entrepreneur français qui démarche les États-Unis doit faire confiance à une équipe américaine. S'il ne s'entoure que de compatriotes, il risque l'échec. Un Français aura besoin de plusieurs années pour créer un réseau similaire à celui d'un Américain !", estime-t-il.

Lire la suite en page 2 : Fantasme


Fantasme

Partir aux "US" suppose aussi de savoir faire fi de ses idéaux. "L'autre versant du marché américain est qu'il est très fantasmé, ajoute Vincent Deruelle. Parce qu'on comprend facilement la langue, parce qu'on regarde les mêmes séries télévisées, on pense qu'on pourra l'adresser facilement. Ce n'est le cas dans la réalité."

En effet, un succès en Europe ne constitue pas une garantie à la même réussite du produit ou du service en question une fois déployé aux États-Unis. Le pays possède ses spécificités de consommation, que ce soit en B to C ou B to B. "Le B to C est régi par la surconsommation et l'accès au crédit : la consommation y est donc beaucoup plus impulsive qu'en Europe. En B to B, les processus sont très courts : matching avec le client immédiat, présentations d'à peine 10 minutes du business, processus de tests rapides... tout se fait sur l'instantané, au détriment de la fidélité", développe Vincent Deruelle.

Enfin, il faut garder en tête que la culture managériale est elle aussi très différente. "Là où les Français ne veulent pas être cantonnés à une fonction et prônent le multi-tâche, leurs homologues américains auront une attitude inverse. Ils se concentrent sur une tâche, avec des process dédiés. Leur cahier des charges doit être très clair", compare Pierre Trippitelli. L'expert rappelle que les Américains, peu avares en enthousiasme, disent volontiers "oui" et "génial" à tout. Il faut donc savoir lire à travers les lignes ! C'est la raison pour laquelle il peut s'avérer particulièrement difficile pour un Français de recruter un Américain, tous les candidats excellant en entretien. "Il faut identifier les bons "behavior" (comme la loyauté) et savoir titiller la personne sur les bons sujets", confirme Pierre Trippitelli. En somme, il s'agit de faire usage de ce doute méthodique, si cher aux Français.

Témoignage

"Nous sommes à New York pour fidéliser nos clients"

Fabien Grenier, CEO de DataDome

Pour lutter contre les robots malveillants qui circulent parmi le trafic web mondial, DataDome a développé une solution sécurité spécifique, en mode SaaS. Cette intelligence artificielle est capable de détecter, de catégoriser et de répondre en temps réel à des notices automatisées. De grands noms du e-commerce l'ont adoptée, comme Fnac.com ou La Redoute. Mais DataDome réalise 30 % de son chiffre d'affaires à l'étranger, et cherche notamment à se focaliser sur les Etats-Unis, là où sont concentrés la plupart de ses clients internationaux. C'est pourquoi la start-up a ouvert à New York sa filiale, DataDome Solutions. "Le bureau américain a du sens pour faciliter l'engagement et la fidélisation de nos clients. C'est essentiel pour assurer la qualité", complète Fabien Grenier, co-fondateur de DataDome.

Au début, pour composer ses effectifs outre-Atlantique, l'entreprise fait appel à des contacts de confiance, deux "Français américanisés", qui ont déjà vécu sur place. "Ainsi, ils connaissent cette culture. On a toujours le sentiment d'en être très proche, alors que ce n'est pas du tout le même rapport dans le business, assure Fabien Grenier. Par exemple, il est difficile de connaitre leur degré d'intérêt réel pour le produit car ils qualifient tout "d'extraordinaire"."

Fabien Grenier n'exclut pas de s'installer lui aussi définitivement aux Etats-Unis, à moins qu'il ne choisisse l'Asie, deuxième destination-cible dans le cahier de route de DataDome...

 
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