VENDRE, C'EST SIMPLE COMME UN COUP DE FIL
Technique fondamentale de la prospection, le phoning répond à des règles précises, souvent méconnues des commerciaux qui rechignent à décrocher leur combiné. Nos conseils.
Je m'abonneNous ne sommes pas intéressés par votre offre», «Personne n'est disponible pour vous parler», «Envoyez votre plaquette». Ces formules de rejet sont le lot quotidien du vendeur qui prospecte au téléphone. Elles minent son moral et ses performances. «Résultat, il consacre le moins de temps et d'énergie possible à ce canal, privilégiant des activités plus valorisantes et rentables à ses yeux comme le rendez-vous en face à face», analyse Sandrine Carrajero, directrice adjointe d'Everest Trajectoire, un spécialiste des prestations call. Essuyer refus sur refus n'est pourtant pas une fatalité. La première chose à faire est de considérer cette technique comme une démarche commerciale à part entière. Régie par des règles propres, elle suppose de mettre en oeuvre une méthode adaptée.
Quelques minutes pour convaincre. Jamais vos commerciaux ne se rendraient en entretien sans s'être préparés. Pourquoi, sous prétexte qu'ils sont «cachés» derrière un combiné, loin du regard de leur interlocuteur, se le permettraient-ils? Cela n'a pas de sens. Comme leur démonstration ne passe que par la voix, ils devraient même consacrer plus de temps à la préparation d'un appel qu'à celle d'un rendez-vous physique. En effet, ils ne bénéficient que de quelques minutes pour convaincre. Et ne peuvent compter sur le langage non verbal (sourire, acquiescement, regard) pour leur faciliter la tâche. « Or, bien souvent, les commerciaux ont tendance à s'y mettre, entre deux dossiers à traiter», regrette Jérôme Caroyol, gérant associé d'Emoveo, cabinet conseil en stratégie marketing et commerciale. Aussi, veillez à leur imposer des sessions de deux à quatre heures de phoning dans la semaine. Vous pouvez aussi leur fixer des objectifs quantitatifs trimestriels de recrutement. Sinon, ils reporteront toujours à plus tard une activité qui les rebute. «Durant ces créneaux prédéfinis, les commerciaux doivent adopter un ton de voix dynamique, sourire (la personne au bout du fil V'entend») et limiter les bruits ambiants, en s'isolant si possible », conseille l'expert. Pour ce dernier, mieux vaut également réserver la prospection téléphonique à un certain type de commercial, dans la mesure du possible. Le profil idéal: un «chasseur» (et non pas un «éleveur»), capable de répondre du tac au tac et fin connaisseur de vos produits. La perle rare saura en outre parfaitement écouter. Une évidence? Pas si sûr.
Une écoute active. Bon nombre de vendeurs confondent rapidité et précipitation. «Par peur de ne pas avoir le temps d'avancer l'argument qui fera mouche, ils récitent un discours bien rodé et manquent par là même des occasions de rebonds offertes par leur interlocuteur», explique Sandrine Carrajero (Everest Trajectoire). Le vendeur doit, en effet, adapter ses propos en fonction des questions et des objections qu'il entend. Autrement dit, il doit se détacher de son script. Placé sous ses yeux, à côté d'une fiche de parade aux objections, ce document structuré lui permet d'avoir un écrit sur lequel se reposer pour combattre son stress. Pour autant, il n'est pas gravé dans le marbre.
Pour décrocher un rendez-vous, les formules du genre «J'ai une offre exceptionnelle à vous proposer» sont à proscrire au profit d'accroches bien plus ciblées telles que «J'ai appris que vous comptiez changer de locaux. Nous proposons justement un service de déménagement adapté aux PME dont j'aimerais vous parler en face à face». «Naturellement, la pertinence de la raison invoquée de l'appel suppose en amont un travail de veille», souligne Jérôme Carayol (Emoveo). Il s'agit d'étudier notamment la presse spécialisée, les publications sectorielles et, bien sûr, le cas échéant, le site internet de l'entreprise sollicitée. Un ciblage précis des prospects conditionne la réussite de la campagne. Seul un fichier qualifié (composé notamment des coordonnées complètes du décideur, d'informations sur son activité et ses besoins) vous assurera de bons résultats.
Plusieurs options s'offrent à vous pour collecter ces précieuses informations. Vous pouvez confier cette mission à vos commerciaux. Ou encore recourir à un assistant commercial ou à un prestataire (lire notre encadré p. 63) qui «tapera dans le dur» et transmettra ensuite la base de données nouvellement complétée à votre force de vente. Histoire de faciliter leur tâche et de leur faire gagner du temps.
Internet en renfort. Nulle place n'est laissée à l'improvisation. Des outils spécifiques sont d'ailleurs les bienvenus pour soutenir l'argumentation. Le commercial peut tout à fait envoyer un e-mail quelques jours avant son appel téléphonique avec, en pièce jointe, une présentation de l'entreprise et de ses produits. Cela, dans le but de rendre plus aisée l'entrée en matière, le jour de l'appel. Il peut, aussi, durant la conversation, inviter ses interlocuteurs à se connecter sur leur site afin de visionner une démonstration de produits en ligne. Ces supports dynamisent l'échange et compensent, en partie, l'absence physique du vendeur.
CONSEILS
Cinq astuces pour franchir un barrage téléphonique
Vos appels sont systématiquement filtrés par des assistantes? voici quelques pistes pour contourner l'obstacle.
1 ADOPTEZ UN TON CONVAINCANT
En appelant l'interlocuteur souhaité par son nom et prénom sur un ton décidé, vous laissez entendre à sa secrétaire que vous connaissez déjà le prospect.
2 FAITES DE L'ASSISTANTE VOTRES ALLIÉE
Si vous lui demandez conseil, voire plaisantez avec elle, vous la valorisez et en faites une alliée potentielle, qui sera en tout cas plus encline à plaider votre cause auprès de son chef.
3 RECOMMANDEZ-VOUS D'UN CONTACT COMMUN
Vous avez un client, ou un fournisseur, auquel l'entreprise que vous sollicitez fait également appel? Dites que vous appelez de sa part, après lui avoir demandé son aval.
4 OSEZ L'ALIBI TECHNIQUE
A la question «Quel est l'objet de votre appel?» répondez en utilisant du jargon technique, inventé ou non, qui n'incitera pas la secrétaire à en demander davantage.
5 TENTEZ UN NUMÉRO AU HAZARD
Remplacez les deux derniers chiffres du numéro du standard. Jouez la surprise et demandez à être basculé sur le bon poste.
ZOOM
Besoin d'aide? faites appel à un call center
Vous considérez que vos commerciaux ont mieux à faire que de passer des milliers de coups de fil par mois en quête de nouveaux clients? Appelez un centre d'appels à la rescousse! en fonction de vos besoins, ce prestataire peut mobiliser d'une à plusieurs dizaines de téléprospecteurs. Leur mission consiste soit à qualifier un fichier préexistant que vous leur fournissez, soit à décrocher des rendez-vous physiques pour vos commerciaux. Certains acteurs intègrent des équipes spécialisées par secteurs d'activité. mais vous ne pourrez tout de même pas faire l'économie d'un briefing complet de ces commerciaux externalisés. Il s'agit de leur présenter votre entreprise et votre clientèle, de les former à vos produits et, plus globalement, de travailler en étroite collaboration avec eux. Concrètement, cela passe par la rédaction, avec eux, d'un script précis qui sera amené à évoluer au fil du temps en fonction de leurs résultats. en outre, chaque semaine, vous devrez faire un point avec leur manager afin d'évaluer la tenue des objectifs. en fin de processus, vos vendeurs «maison» héritent de la crème: des pistes de business à transformer en contrats. Il existe deux formules de facturation. Soit le prestataire se rémunère entre un et deux euros pour chaque appel passé, quel que soit le résultat de l'argumentation. Soit vous payez uniquement les rendez-vous décrochés. Dans ce cas, comptez alors entre 60 et 150 euros par contact.
TEMOIGNAGE
Nous sommes sûrs d'appeler la bonne entreprise, au bon moment
PATRICK LAMBREGHTS, gérant de Lapro Environnement
Il y a encore cinq ans, Patrick Lambreghts, gérant de Lapro environnement, recrutait un intérimaire pour prospecter au téléphone les entreprises susceptibles d'être intéressées par ses produits. Durant trois mois, ce collaborateur proposait à l'achat ou à la location du matériel de désamiantage à plusieurs centaines de sociétés du bâtiment. «Formé au catalogue par mes soins, il était plus efficace dans la démonstration qu'un téléopérateur externe, indique le dirigeant, mais sa tâche restait ardue car nous prospections au hasard. » Aujourd'hui, les choses ont bien changé. Les cinq commerciaux de la Pme ont vu leur tâche considérablement simplifiée avec la mise en place des certifications. Les organismes Afaq-Ascert et Qualibat les délivrent, sous conditions, aux entreprises désireuses de mener des travaux de désamiantage. La liste de celles qui les ont obtenues est disponible sur le site internet des organismes certificateurs. Du pain béni pour Lapro environnement! Une à deux fois par mois, les hommes de Patrick Lambreghts repèrent de nouveaux noms qu'ils contactent aussitôt par téléphone afin de décrocher un rendez-vous. «Nous sommes sûrs d'appeler la bonne entreprise, au bon moment», se félicite le quinquagénaire. outre ces prospects «bouillants», les commerciaux passent aussi un coup de fil aux sociétés qui ont fait l'objet, quelques jours plus tôt, d'un fax-mailing. Trois à quatre fois par an, le fichier de prospects que la Pme s'est constitué, au fil des ans, est sollicité à l'occasion d'une promotion ou d'un lancement de produit. Les quelques dizaines d'appels sont ensuite mentionnées dans le logiciel de relation clients (Crm) et mis à la disposition de l'ensemble de l'équipe. Ainsi, chaque acte de prospection est remis dans son contexte commercial et analysé.
LAPRO ENVIRONNEMENT - Repères
ACTIVITE: Commercialisation de matériel de désamiantage
VILLE: Goussainville (val-d'oise)
FORME JURIDIQUE: SA
DIRIGEANT: Patrick Lambreghts, 51 ans
ANNÉE DE CREATION: 1996
EFFECTIF: 15 salariés
CA 2009: 4,8 MEuros