REMUNERATION DES COMMERCIAUX: LE COCKTAIL GAGNANT
L'argent est l'un des leviers les plus efficaces pour motiver un commercial. C'est pourquoi sa rémunération, constituée d'une part fixe et d'une partie variable, doit faire l'objet d'une attention toute particulière. A la clé: motivation ou démotivation.
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C'est un exercice difficile. La rémunération de vos vendeurs, véritables poumons de l'entreprise, est un sujet délicat. Il s'agit de trouver le juste équilibre entre fixe et variable. Un salaire fixe trop élevé peut transformer vos commerciaux « en fonctionnaires de la vente », s'amusait à décrire François Le Roy, directeur délégué aux opérations chez Ricoh France, constructeur d'imprimantes, lors d'une formation sur la rémunération des commerciaux coorganisée en octobre 2010 par Chef d'entreprise magazine. A l'inverse, un fixe trop faible peut amener un commercial à aller se vendre ailleurs. « Notamment en période de crise, quand son variable est directement impacté par une situation économique difficile », prévient Bernard Marty, consultant chez Hay Group, une société de conseil, et professeur de politiques de rémunération à HEC.
S'il n'est pas question de supprimer toute partie variable de la rémunération des commerciaux, il convient, dans un premier temps, de définir son importance dans la rémunération globale de vos vendeurs. La plupart du temps, il suffit de s'inspirer des pratiques de votre branche ou secteur d'activité. Pour cela, analysez les offres d'emploi de vos concurrents ou rejoignez des réseaux patronaux pour échanger avec vos pairs. « En B to B, la part variable est souvent comprise entre 20 et 25 % du salaire total. En B to C, elle est plus élevée et peut atteindre 80 % de la rémunération d'un vendeur », analyse Thierry Magin, associé gérant de MCR Consultants, société de conseil dans les politiques de rétribution.
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À SAVOIR
Les principaux modes de calcul du variable
- Le commissionnement
L'entreprise reverse au commercial un pourcentage du chiffre d'affaires, ou de la marge qu'il réalise et ce, de façon linéaire. c'est le principe du «plus je vends, plus je gagne». Le commercial touche souvent un salaire fixe faible et sa rémunération variable s'applique dès le premier euro réalisé.
- Les primes sur objectifs
Le commercial est rétribué en fonction du taux d'atteinte des objectifs fixés en début d'année. s'il devait réaliser un chiffre d'affaires de 100 000 euros et a vendu pour 200 000 euros, il aura réalisé 200 % de son objectif. L'entreprise lui versera alors une prime en conséquence. il est également possible de définir des objectifs qualitatifs tels que la prospection de nouveaux clients.
- Le classement
Les commerciaux sont classés, du premier au dernier. La rémunération varie suivant leur position. cependant, il n'est pas toujours évident de trouver des critères justes de classement.
Passer à une rémunération sur objectifs. Une fois la balance fixe/ variable définie, vous devrez choisir le mode de calcul. Généralement, dans les petites structures, c'est le commissionnement au premier euro réalisé qui est privilégié (lire l'encadré ci-contre). En clair, plus les commerciaux vendent, plus leur variable augmente. Cependant, cette pratique n'est pas optimale pour une PME. « Il est conseillé de passer du commissionnement à la prime sur objectifs », affirme Bernard Marty (Hay Group) . La raison? Vous pourrez ainsi donner à vos vendeurs des objectifs qualitatifs et plus uniquement quantitatifs, tels que la prospection de nouveaux clients, ou bien la participation à l'argumentaire commercial pour le lancement d'un nouveau produit. Naturellement, ces objectifs doivent être quantifiables. Par exemple, vous pouvez décider d'octroyer une prime aux commerciaux qui réalisent au moins un tiers de leur chiffre d'affaires auprès de nouveaux clients. Une façon de les inciter à prospecter, une tâche généralement peu appréciée. A noter que vous pouvez également opter pour un système mixte, associant commissionnement et primes sur objectifs. Ici, un variable mensuel est versé sur le chiffre d'affaires - ou la marge - généré par le commercial, tandis que des primes trimestrielles, voire semestrielles, sont attribuées en fonction de l'atteinte d'objectifs qualitatifs définis en début d'année. « C'est d'ailleurs un système répandu dans les entreprises de taille intermédiaire », constate Thierry Magin (MCR Consultants).
Reste un point important: en choisissant de verser des primes sur des objectifs qualitatifs, vous devrez définir un mode de calcul qui ne soit pas du «tout ou rien», au risque de démotiver votre force de vente (voir le graphique ci-dessus).
Cependant, ce système de rémunération implique un haut niveau de compétences de la part de vos managers.
Bernard Marty, consultant chez Hay Group
Un système de rémunération variable doit rester clair et compréhensible pour tous vos commerciaux.
L'importance du rôle des managers. Même s'ils sont habitués à fixer des objectifs quantifiables, ils pourront rencontrer des problèmes pour définir des critères d'évaluation à la fois objectifs et qualitatifs. D'autant plus qu'ils peuvent être différents d'une entreprise à une autre. Pour Thierry Magin (MCR Consultants), le manager doit se poser la question suivante: Quelles qualités doit avoir un bon commercial? En y répondant, il saura quels critères il devra prendre en compte pour la mise au point du programme de rémunération. Reste un point essentiel: « Un système de rémunération variable peut être complexe, en prenant en compte de nombreux critères. Mais il doit rester clair et compréhensible pour tous vos commerciaux », prévient Bernard Marty (Hay Group) . Dans un autre registre, n'hésitez pas à donner plus de pouvoir à vos managers. Notamment dans la pondération des primes accordées. L'idée: prendre en compte le contexte économique. Car un commercial qui n'atteint pas tous ses objectifs n'a pas pour autant démérité sur toute l'année. Reste que cette pondération doit être faible, « de l'ordre de plus ou moins 10 % de son variable », conseille l'expert. Elle doit également être justifiée de façon objective, pour éviter toute forme de favoritisme.
Inclure des objectifs collectifs. Vous pouvez aussi inclure des objectifs collectifs dans la rémunération variable de vos vendeurs. Une nouvelle fois, cette part ne doit pas être très élevée. En clair, elle ne doit pas dépasser 15 % du variable total versé aux commerciaux. L'intérêt d'une telle démarche est de favoriser le travail en équipe. Attention toutefois: « Les objectifs collectifs n'ont de sens que si vos vendeurs sont bel et bien amenés à travailler ensemble sur certains projets », prévient Thierry Magin (MCR Consultants).
Enfin, si le système de primes sur objectifs possède de nombreux avantages, il peut avoir un effet pervers. Vos vendeurs seront tentés de négocier des objectifs faibles en début d'année, afin d'être certains de les réaliser, voire de les dépasser. A vous de faire la part des choses et de fixer des objectifs réalistes et motivants.
JURIDIQUE
> CHANGER LA RÉMUNÉRATION D'UN COMMERCIAL
Modifier le mode de calcul des primes de votre force de vente revient à changer sa rémunération. Ce changement est encadré par le droit du travail. Si le mode de calcul de la part variable du salaire est inclus dans une annexe au contrat travail, vous devrez modifier ledit contrat dans sa totalité. En revanche, si le mode de calcul fait partie d'un avenant - ce qui est conseillé, vous pouvez modifier uniquement ce document. Dans les deux cas, le contrat de travail devra être paraphé-et signé par vos commerciaux. Si un salarié refuse de s'y plier, vous pouvez le licencier.