NE PERDEZ PLUS D'ARGENT AVEC VOS CLIENTS NON RENTABLES
Parce qu'ils vous coûtent plus qu'ils ne vous rapportent, les «mauvais clients» doivent faire l'objet d'une stratégie particulière. Voici les différentes mesures à mettre en place pour tirer un plus grand profit de la situation.
Je m'abonne1IDENTIFIER LES CLIENTS NON RENTABLES
Qu'est-ce qu'un client non rentable (CNR)? Stricto sensu, c'est un client dont l'ensemble des coûts de gestion, d'animation commerciale, de relance d'impayés, etc., est supérieur à la marge qu'il génère. « Naturellement, la profitabilité est relative, indique Patrice Bégoc, senior manager de BearingPoint, cabinet conseil en organisation, gestion et management. Chaque entreprise se fixe un seuil de rentabilité à partir de sa propre analyse du coût/bénéfice par client. » Entrent ainsi en ligne de compte: le montant, la fréquence et le contenu des commandes, les incidents de paiement ou encore les réclamations. Le directeur commercial doit mettre en place et vérifier tous les ans ces indicateurs. Partant du principe que certains «mauvais clients» actuels pourraient devenir des clients intéressants à l'avenir, certains dirigeants ajoutent un autre critère à leurs analyses, celui de la valeur future estimée. C'est le cas, par exemple, des banques qui parient sur les étudiants, les cadres de demain.
2 EN PARLER OUVERTEMENT AVEC EUX
Une fois les «mauvais clients» identifiés, vos commerciaux doivent passer outre les liens affectifs qu'ils ont pu créer au fil du temps pour évoquer les tenants et les aboutissants de la relation. « Transparence et pédagogie sont de mise au moment de l'annonce au client », prévient Michael Haenlein, professeur de marketing au sein de la Business School ESCP Europe. L'absence de rentabilité est à présenter chiffres à l'appui et accompagnée de solutions.
Par exemple, il convient d'expliquer au client que la multiplication des petites commandes engendre un coût logistique qui pèse sur vos bénéfices. Ou encore, indiquez-lui que vous ne pouvez plus vous permettre d'accepter un montant d'achats inférieur à «X» euros et invitez-le à regrouper ses demandes. « Si vous avez des éléments pour prouver que votre entreprise ne peut supporter la charge de ce client, il ne pourra vous objecter un refus de vente », rassure Michael Haenlein.
MICHAEL HAENLEIN, professeur de marketing à l'ESCP Europe
Les clients non rentables ne signifient pas «petits clients», mais ceux avec lesquels vous travaillez à perte.
3 MENER DES ACTIONS COMMERCIALES SPECIFIQUES
Si vous êtes confronté à un nombre important de CNR, il est judicieux d'adopter une stratégie commerciale différenciée. « Il s'agit alors de mettre en place des actions spécifiques à destination de ce segment dont vous avez établi un profil », souligne Patrice Bégoc (BearingPoint). Objectif: assurer un accroissement du volume des ventes et/ou de la marge dégagée. Plusieurs options s'offrent à vous pour booster la profitabilité. Vous pouvez développer une offre ciblée (par exemple une formule light de votre abonnement avec moins de services à la clé) ou modifier une prestation existante pour mieux répondre aux attentes de cette clientèle.
4 REDUIRE LEURS COUTS COMMERCIAUX
Pour «faire leur chiffre» et maintenir un bon contact avec leurs interlocuteurs, les commerciaux ont tendance à multiplier les visites et les remises. Ce qui alourdit le «coût» du client. Revoyez donc votre politique commerciale. Supprimez par exemple toute forme de ristourne ou de cadeau. Finis aussi les relances et les déplacements chez eux. Puis, réservez les mailings (catalogue, brochure, etc.) aux gros acheteurs. Patrice Bégoc (BearingPoint) suggère, en effet, d'utiliser un canal de relation adapté à la valeur du client. La hot line et le courrier papier pour les VIP, le suivi par Internet et les e-mails pour les CNR. Il s'agit ici de mêler incitation, en communiquant sur les atouts du Web, et dissuasion, en évitant de communiquer par téléphone. Quels résultats escompter? Soit, c'est gagné: le client vous revient finalement moins cher en termes de relations commerciales et génère enfin de la marge. Soit, il se détourne de votre entreprise car il se sent laissé pour compte. Dans ce dernier cas, le risque du bouche à oreille négatif s'en trouve limité, selon Michael Haenlein (ESCP Europe): « L'approche indirecte donnera l'impression au CNR de prendre lui-même la décision de partir et vous dédouane totalement. »
5 CESSER TOUTES RELATIONS COMMERCIALES
Si les méthodes directes (point 2) et indirectes (points 3 et 4) n'ont pas eu les effets escomptés, il est temps de songer à opter pour un abandon pur et simple. « Gardez en tête, martèle Michael Haenlein (ESCP Europe), qu'on parle ici non pas de tous vos «petits clients» mais des rares avec lesquels vous travaillez à perte. » Attention toutefois à les ménager. Votre commercial peut tenir un discours argumenté se concluant ainsi: vous n'êtes clairement pas le meilleur partenaire pour eux ; telle autre entreprise conviendrait mieux. Un moyen de « conserver une bonne image auprès de votre client puisque vous lui avez trouvé une alternative crédible », commente l'expert. Autre méthode, plus radicale: invoquez des raisons externes (la conjoncture) pour demander une rupture de vos relations commerciales.
6 UN OUTIL POUR FIDELISER SES BONS CLIENTS
Si vous choisissez de vous séparer de quelques clients, faites-le savoir à ceux qui ne sont pas concernés! Dans un mailing, expliquez que vous menez un travail sur votre portefeuille clients qui vous amène à mettre un terme à certains contrats. « Implicitement, vos bons clients comprendront que, eux, méritent votre attention », explique Michael Haenlein (ESCP Europe). Intérêt de la manoeuvre: ainsi valorisés, ils vous resteront fidèles. C'est aussi l'occasion d'exploiter cette annonce pour leur proposer dans ce même courrier une offre commerciale qui assoit, à leurs yeux, leur position dans la hiérarchie de votre clientèle.
ZOOM SUR
En profi ter pour détecter des sources d'amélioration globales
L'absence de rentabilité de certains clients de votre portefeuille est peut-être due à un défaut d'organisation au niveau de votre force de vente, de vos distributeurs, de votre SAV ou de votre système de livraison. Ou encore à l'inadaptation de votre gamme au marché actuel. « C'est l'analyse des causes qui permet de prendre les bonnes actions correctives », estime Patrice Bégoc, senior manager de Bearing-Point, cabinet conseil en organisation. Un travail sur ce segment peut être une opportunité d'amélioration à tous les étages de l'entreprise.