La Cour de cassation n'invalide pas le forfait-jours
Un cadre au forfait-jours a attaqué son ex-employeur pour non-paiement de ses heures supplémentaires. La Cour de cassation lui a donné raison, à titre individuel.
Je m'abonneLe 29 juin 2011, la Cour de cassation donne raison au salarié cadre commercial autonome dans une société de biotechnologie normande. Celui-ci, démissionnaire, réclamait le paiement de ses heures supplémentaires sur la base du forfait-jours. Ce dispositif introduit par la loi Aubry en 2000, au moment du passage aux 35 heures, autorise les salariés concernés à travailler jusqu'à 78 heures par semaine (lire l'encadré ci-dessous). En revanche, cette décision ne concernera que ce cas précis et « ne remet pas en cause la validité du système du forfait-jours et donne toute sa place aux accords collectifs », précise par voie de presse la Cour de cassation.
Pour Me Christine Hillig-Poudevigne, avocate associée spécialisée en droit social au sein du cabinet Moisand Boutin et Associés, « cette décision est spécifique à l'accord de branche métallurgie dont relève la société de biotechnologie à laquelle appartenait l'ex-salarié. » Cette décision, précise-t-elle, met seulement en lumière le fait que « l'employeur a été défaillant car il n'a pas suivi l'accord en termes de jours de repos et de durée du travail effective ». Le salarié de la société de biotechnologie normande devrait donc percevoir le paiement de ses heures supplémentaires sur une durée rétroactive de cinq ans (délai de prescription prévu par la loi).
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Le forfait-jours en détail
Pour rappel, le forfait-jours est dédié aux cadres qui n'entrent ni dans la catégorie des cadres dirigeants, ni dans celle des cadres astreints à l'horaire collectif de travail et aux salariés non cadres qui disposent d'une autonomie dans leur organisation. C'est un mode de décompte du temps de travail qui prévoit que les salariés peuvent être soumis à un forfait en jours travaillés à l'année dès lors qu'un accord collectif étendu, ou un accord d'entreprise ou d'établissement, en permet la mise en oeuvre et à condition qu'une convention individuelle, conclue avec le cadre concerné, constate l'acceptation de ce dernier.
Apprécier le risque juridique, branche par branche
Il convient donc, selon Me Hillig-Poudevigne, que « les syndicats patronaux étudient branche d'activité par branche d'activité les problèmes juridiques potentiels en lien avec cette problématique ».
Autre préconisation de l'experte, à destination des dirigeants cette fois: mettre en place un système d'autodéclaration du nombre de jours travaillés de ses salariés en forfait-jours, via un format choisi par l'employeur (type tableau Excel ou éventuellement CRM), afin d'éviter tout effet d'aubaine. Une précaution efficace mais difficile et lourde à mettre en oeuvre dans une PME. Néanmoins, cela vous permettra de contrôler le nombre de jours travaillés, les demi-journées et journées de repos prises par les salariés concernés.
Le but étant de s'assurer que la durée de travail et de repos quotidienne et hebdomadaire maximale (48 heures de travail maximum par semaine et 11 heures de repos consécutif selon le droit européen), est respectée.
Christine Hillig-Poudevigne, avocate, cabinet Moisand Boutin et associés.
« Dans ce cas, l'employeur a été défaillant car il n'a pas suivi l'accord en termes de jours de repos et de durée du travail effective. »