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L'actionnariat salarié, ou l'art de fidéliser vos collaborateurs-clés

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Peu répandu dans les PME, l'actionnariat salarié est la forme la plus aboutie de la gestion participative. En associant vos collaborateurs au capital, vous cultivez leur fidélité.

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@ GETTYIMAGES

Distribuer à vos salariés une part, même infime, du capital de votre entreprise est une idée qui vous laisse de marbre? Vous n'êtes certainement pas le seul. Car si le général De Gaulle a tenté de réconcilier travail et capital en fixant, en 1967, les premières règles de l'actionnariat salarié, le dispositif n'a pas connu, à ce jour, le succès escompté. Et les PME y sont particulièrement réticentes, comme le révèle le dernier baromètre de l'Ordre des experts-comptables de Paris Ile-de-France, paru en novembre 2006. Selon cette enquête, 73% des dirigeants de PME sont opposés à la distribution d'actions à leurs salariés. Pourtant, 59% reconnaissent que le dispositif pourrait avoir une incidence sur le rapport au travail de leurs collaborateurs. Une contradiction due à deux principaux facteurs, selon André-Paul Bahuon, président de l'Ordre. Primo, «la crainte du partage du pouvoir». Secundo, une méconnaissance des mécanismes de l'actionnariat salarie: «La plupart des patrons entrevoient la formule sous sa forme mercantile, comme s'il s'agissait d'un simple produit bancaire. Ils mésestiment son rôle en termes de ressources humaines.» Pourtant, l'actionnariat salarié est d'abord un outil de redistribution des fruits de la croissance. En tant que tel, il permet à de petites structures d'attirer de bons profils, en comblant l'écart de rémunération qui les sépare des grandes entreprises. Outre les aspects patrimoniaux et financiers, il permet de fidéliser des cadres dirigeants. Par ailleurs, comme l'explique Cyrille Meunier, consultant au sein du cabinet de conseil en rémunération MCR Consultants, le rapport du salarié à l'entreprise a beaucoup changé: «Le collaborateur a un rapport consumériste à l'entreprise. Il cherche à vivre, tous les quatre ans environ, une nouvelle aventure professionnelle.» Comment, dans ces conditions, fidéliser vos collaborateurs-clés? «Au-delà du salaire, ce que veulent aujourd'hui les salariés, répond l'expert, c'est donner un sens à ce qu'ils font.» L'actionnariat salarié - et les risques de pertes financières associées - suppose alors une forte implication du collaborateur. Autre facteur de motivation: le passage du statut de salarié à celui de salarié actionnaire. Comme le précise Lionel Tourtier, délégué général de Fondact, association de promotion de la gestion participative, «le salarié actionnaire est, en quelque sorte, copropriétaire de son outil de travail, ce qui lui donne le droit d'être informé des résultats de l'entreprise et de voter en assemblée générale. C'est un élément de cohésion indéniable». Impliqué dans la vie de son entreprise, il prend plus facilement conscience des contraintes qui pèsent sur elle et des enjeux à venir.

JURIDIQUE

- NOUVELLE LOI
La loi pour le «développement de la participation et de l'actionnariat salarié», qui devrait entrer en vigueur au plus tôt à la fin du premier semestre 2007, vise à étendre la participation dans les PME et à faciliter l'accès des salariés au capital de leur entreprise. Les sociétés pourront ainsi verser à leurs salariés un «dividende du travail» sous la forme d'actions gratuites. Placées sur un PEE (plan d'épargne entreprise) au minimum pendant cinq ans, ces actions seront exonérées d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les plus-values. Le texte encourage aussi la reprise d'entreprise par les salariés, avec la création d'un FCPE (Fonds commun de placement d'entreprises) dédié à la transmission, auquel le salarié pourra souscrire en bénéficiant d'un crédit d'impôt.

Les différents modes d'actionnariat.

Pour associer vos collaborateurs à votre affaire, plusieurs formules existent: rachat des titres à un autre actionnaire, acquisition dans le cadre d'un plan d'épargne d'entreprise (PEE), augmentation du capital réservé aux salariés... En outre, le projet de loi, adopté définitivement en décembre par le Parlement, encourage les salariés de PME à investir dans des actions de leur entreprise (voir l'encadré p. 58) . Autre nouveauté: depuis le 1er janvier 2005, les dirigeants de sociétés par actions peuvent inviter au capital leurs salariés et mandataires sociaux, sans avoir à payer de cotisations patronales ni salariales. Les actions étant gratuites, le collaborateur ne prend aucun risque. Seule contrainte: il lui faudra patienter quatre ans avant de pouvoir les monnayer (deux ans avant l'acquisition et deux ans après) . Si le porteur des titres les revend avant le terme, les sommes seront soumises à cotisations. En contrepartie, il bénéficie de conditions fiscales avantageuses. Lors de l'attribution des titres, le taux maximal d'imposition s'élève à 30% de leur valeur (auxquels s'ajoutent 11% de CSG et de CRDS) . La plus-value éventuelle réalisée entre la date d'acquisition et la date de cession est, quant à elle, imposée à 16% (plus 11% de CSG et de CRDS). Le cas échéant, la moins-value est directement déductible du revenu imposable. Intéressés aux bénéfices, les salariés actionnaires seront donc, a priori, moins sensibles aux sollicitations extérieures. Et pour cause: leur rémunération, perçue sous forme de dividendes ou de plus-values de cession, est directement liée à leur présence dans l'entreprise. Ce levier permet au dirigeant de conditionner l'offre d'actions à l'atteinte d'objectifs individuels ou collectifs. «Le cadre, qui bénéficiera personnellement des retombées de son travail quotidien, sera forcément gagnant», plaide Lionel Tourtier (Fondact). Mais que les chefs d'entreprise se rassurent: le salarié actionnaire, par nature minoritaire, a peu de poids dans les décisions du conseil d'administration. «Au fond, analyse André-Paul Bahuon (Ordre des experts-comptables d'Ile-de-France), son pouvoir est limité. Pour le motiver, pourquoi, par exemple, ne pas lier sa rémunération à la performance de l'entreprise

Autre possibilité, la mise en place d'un PEE. Votre salarié actionnaire profitera alors d'un cadre fiscal et social extrêmement avantageux. Grâce aux sommes versées sur le PEE dans le cadre de l'intéressement ou de la participation (voir l'encadré ci-dessus), votre salarié pourra acquérir des actions de votre entreprise ou acheter des parts détenues par un fonds commun de placement d'entreprise (FCPE). Avantages? En cas d'achat d'actions, l'entreprise peut verser jusqu'à 4 140 Euros par an et par salarié au titre de l'abondement. Les actions gratuites versées sur le PEE sont exonérées d'impôt sur le revenu, à condition d'avoir été attribuées à l'ensemble des salariés.

@ DR

CYRILLE MEUNIER, consultant chez MCR Consultants

«Le collaborateur a un rapport consumérista à l'entreprise.

Et les stock-options?

Si vous souhaitez cibler votre effort de récompense sur des collaborateurs-clés, vous pouvez aussi opter pour les stock-options. Contrairement aux actions gratuites, ils correspondent à un achat différé d'actions, vendues à un prix déterminé et préférentiel (décote de 20%) . Transformés en actions, les stocks constituent un complément de rémunération appréciable, mais le salarié peut aussi ne rien gagner. Le principe? Pendant quatre ans (trois si l'entreprise a moins de quinze ans), il a le droit d'acquérir, par souscription ou achat, un certain nombre d'actions dont le prix a été fixé à l'avance. Il peut donc réaliser des plus-values sans prendre, au départ, le risque de l'actionnaire. «Détenteur de stock-options, le salarié, et actionnaire potentiel, est étroitement associé à la performance de l'entreprise, puisqu'il ne reçoit rien si l'entreprise ne se valorise pas», explique Cyrille Meunier (MCR Consultants). C'est ce qui a incité Sandrine T., p-dg d'une entreprise de négoce de consommables informatiques de 43 salariés, à ouvrir, en l'an 2000, un plan de stock-options à ses quatre principaux collaborateurs. «Les stock-options ne conduisent pas forcément à une entrée des salariés au capital, précise-t-elle. En cas de plus-values, ils ont plutôt intérêt à lever leurs options et à les revendre. S'ils restent propriétaires, ils risquent, au contraire, de perdre leur mise.» Là encore, la rémunération est conditionnée par la présence des collaborateurs dans l'entreprise. Les stock-options incitent donc à la fidélité. L'an dernier, Sandrine T. a ainsi distribué à ses quatre collaborateurs 15% de la masse salariale brute.

PHILIPPE DETRIE, p-dg d'Inergie, cabinet de conseil en management

@ DR

PHILIPPE DETRIE, p-dg d'Inergie, cabinet de conseil en management

TEMOIGNAGE
L'actionnariat salarié améliore la compréhension des enjeux de l'entreprise

Philippe Détrie est un fervent partisan de l'actionnariat salarié. Son ambition? Faire d'Inergie une entreprise où il fait bon travailler. Rien ne lui semble donc plus naturel que d'associer ses collaborateurs aux performances de l'entreprise et de leur céder, pour cela, une partie du capital. «Dans le milieu du conseil, où chacun peut s'installer à son compte, il est important de fidéliser les bons consultants. Le meilleur moyen que j'ai trouvé a été de les faire entrer au tour de table afin qu'ils conservent leur fibre entrepreneuriale.» Chaque année, Philippe Détrie offre ainsi à ses salariés en CDI ayant un an d'ancienneté la possibilité d'acquérir le nombre d'actions qu'ils souhaitent. L'achat se fait sur la base du volontariat et par vente directe. En 2006, 13 des 25 salariés «ayants droit» d'Inergie (c'est-à-dire les collaborateurs en CDI depuis le 1er janvier 2005) détenaient des actions de l'entreprise, la souscription moyenne s'élevant à 4 200 euros. «L'actionnariat salarié améliore la compréhension des enjeux de l'entreprise, remarque le p-dg. Il renforce l'implication et la cohésion des équipes.» Pourtant, avec seulement 5% des actions, les salariés d'Inergie ne détiennent pas de réel pouvoir de gestion, même s'ils participent aux décisions en assemblée générale. «Je conserve la majorité, reconnaît le p-dg, mais j'écoute toujours avec attention l'avis de mes actionnaires, car ce sont des gens du métier et qui prennent des risques financiers.» Seules difficultés rencontrées? Les modalités d'évaluation des titres au départ et de liquidation en cas de cession, l'entreprise devant assurer à ses salariés actionnaires la possibilité de revendre leurs actions quand ils le désirent. Toutefois, Philippe Détrie le répète: «Si c'était à refaire, je le referais!»


INERGIE - Repères


- ACTIVITE: Conseil en management et en communication
- VILLE: Vanves (Hauts-de-Seine)
- FORME JURIDIQUE: SAS
- DIRIGEANT: Philippe Détrie, 55 ans
- ANNEE DE CREATION: 1986
- EFFECTIF: 42 salariés
- CA 2006: 4 MEuros

A SAVOIR
Trois formes d'épargne salariale

Outre l'actionnariat salarié, vous disposez de multiples outils pour motiver et fidéliser vos salariés. Parmi eux, l'épargne salariale offre le choix entre trois dispositifs distincts.


1 L'INTERESSEMENT
Il doit être collectif, présenter un caractère aléatoire et être lié aux résultats de l'entreprise. Il résulte d'un accord d'entreprise et sa formule de calcul est librement définie par les partenaires sociaux. Tous les critères qui concourent au bénéfice ou à la performance de l'entreprise peuvent être pris en compte. Principal avantage de ce dispositif d'épargne salariale: les primes d'intéressement sont exonérées de charges sociales (hors CSG-CRDS).


2 L'ABONDEMENT
L'entreprise qui le souhaite peut compléter les versements des salaries sur le plan d'épargne entreprise (PEE ou Perco), soit au titre des primes d'intéressement, soit au titre des versements volontaires. Ce complément facultatif, appelé abondement, est limité à 2 300 euros par salarié et par an. Il est majoré si les versements sont consacrés à l'acquisition d'actions émises par l'entreprise. Disponible au bout de cinq ans, il est exonéré de charges sociales et d'impôt sur le revenu.


3 LA PARTICIPATION
C'est un système de distribution aux salariés d'une partie des bénéfices. La participation est obligatoire dans les sociétés de plus de 50 salariés. Son montant de la participation est déterminé après clôture des comptes de l'exercice. Il est réparti entre tous les salariés selon les modalités prévues par l'accord et uniquement si l'entreprise réalise des bénéfices. En échange d'une exonération sociale et fiscale, l'épargne constituée est bloquée pendant cinq ans (sauf événement exceptionnel: démission, retraite...).

 
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Hélène Duvigneau

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