Ils ont QUITTE LE CONFORT DU SALARIAT pour faire le «GRAND SAUT»
Sacrifices financiers, horaires démentiels... En quittant leur poste dans de grands groupes pour créer et développer leur entreprise, ils ont réussi leur défi, malgré les écueils.
Je m'abonneQuitter un poste à responsabilité chez Nike, Michael Page ou General Electric. . . Une folie? «Non, un challenge», répondent en choeur les anciens salariés de ces grands groupes, aujourd'hui à la tête de leur propre société. Le défi... C'est souvent ce qui a poussé ces nouveaux patrons à faire le «grand saut». L'envie de se prouver quelque chose aussi. Philippe Olivier, codirigeant d'Aralys, une société qui accompagne les entreprises dans la mise en oeuvre de systèmes d'informations décisionnels, est de cette graine-là: «fêtais en poste chez Business Objects (numéro un mondial du développement et de la commercialisation de logiciels d'aide à la décision, ndlr) depuis cinq ans lorsque f ai commencé à avoir peur de me complaire dans cette situation, certes confortable, mais qui me donnait le sentiment d'être passif. Pour devenir maître de la situation, il fallait que je monte quelque chose.» Un souhait que la plupart nourrissent secrètement depuis des années. Constance Rietzler, cofondatrice de l'école d'art de vivre à la française La Belle Ecole, est née avec la fibre entrepreneuriale. «Avec quatre générations de chefs d'entreprise dans ma famille, j'ai toujours baigné dans ce milieu. C'est tout naturellement que j'ai opté pour la filière HEC Entrepreneurs.» D'autres, comme Hugues Meili, le patron de Niji (socié té de conseil et d'intégration de solutions télécoms), se sont lancés au détour d'une opportunité. Au début des années 2000, alors directeur du développement de la société de services informatiques Communication et Systèmes, il perçoit une conjoncture favorable dans le marché des technologies de l'information. «La demande était en plein essor mais les grandes entreprises du secteur, qui avaient souffert de l'éclatement de la bulle Internet, n'étaient pas prêtes à investir à nouveau. C'était le moment de lancer mon propre projet!»
La ténacité, un atout indispensable.
D'autres montent leur entreprise pour fuir un statut de salarié qui ne leur convient plus: désaccord avec la direction, difficultés à trouver sa place... «Attention, cette motivation n'est pas la bonne», prévient Philippe Bazin, associé au sein du cabinet de consultants formateurs en management Krauthamer International. «Face aux obstacles rencontrés dans les premiers temps, seuls ceux qui ont un projet auxquels ils tiennent vraiment arrivent à passer le cap», note-t-il. En effet, les écueils sont multiples sur la route de la création d'entreprise. A commencer par la complexité des démarches administratives. «Ily a tellement de paperasses que je ne consacre, pour l'instant, que 50 % de mon temps à ma véritable activité professionnelle», déplore Etienne Marx, qui a fondé, il y a moins d'un an, Fairway Stratégie, une petite société spécialisée dans l'élaboration d'indicateurs de gestion et de tableaux de bord. Il s'est également frotté au scepticisme des banques: «Du statut de cadre, qui perçoit chaque mois un salaire confortable, vous passez à celui de chef d'entreprise. Et pour une banque, vous n'êtes plus rien. Du moins tant que vous n'avez pas deux bilans bénéficiaires à lui fournir.» Dans d'autres domaines, le changement peut s'avérer brutal: plus de secrétaire, plus de voyages en classe affaires... Du jour au lendemain, les créateurs voient fondre leurs revenus. . . et croître leurs heures de travail. «Je pensais que je travaillais énormément à l'époque où j'étais salariée dans de grands groupes, sourit Anne Saiït qui, en 2005, a créé son propre cabinet de conseil en ressources humaines, Diversity Conseil. Mais ce n'était rienpar rapport à mon emploi du temps actuel!»
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ANNE SAUT, directrie générale de Diversity Conseil
La satisfaction de voir grandir son «bébé» est immense.
Le jeu en vaut la chandelle.
En contre partie, bien des avantages justifient ces moments d'abnégation. «Lorsqu'on travaille pour soi, tempère Anne Saüt, c'est très différent. La satisfaction de voir grandir son '«bébé» est immense et compense tous les sacrifices.» La directrice générale de Diversity Conseil savoure sa liberté d'organisation: «Je peux prendre un week-end de trois jours, en sachant que je travaillerai plus à un autre moment pour compenser.» Au final, tous ces anciens salariés estiment avoir gagné en qualité de vie. Passionné de sports nautiques, Andy Gugenhei- mer, cofondateur de Sport Invest Search, un cabinet de recrutement spécialisé dans l'industrie du sport, a installé son bureau à Biarritz. «Monter mon entreprise correspondait aussi à un projet dévie», explique-t-il. D'autres problèmes apparaissent néanmoins. «C'est en devenant patron que j'ai réellement découvert ce qu'étaient le stress et les insomnies», confie Grégoire Gindre, qui dirige la société de gestion de patrimoine Firevia. «Vous ne vous inquiétez plus pour vous mais pour les dizaines de familles dont vous avez la responsabilité», ajoute Hugues Meili. Une charge qui influence le moral du dirigeant: «Tout va très bien un jour, explique Philippe Olivier, puis, le lendemain, une mauvaise nouvelle vous démoralise complètement.» Certains trouvent dans l'association une forme de réconfort: à deux ou trois, ils se remontent le moral ou partagent les prises de risques. «Dans tous les cas, il est primordial de bien s'entourer, conseille Philippe Bazin. D'un point de vue professionnel bien sûr, grâce à des réseaux, des clubs d'entreprises. . . Mais sur le plan privé également, il faut s'entendre avec son conjoint sur le fait que cette nouvelle aventure va prendre beaucoup de temps, sera certainement moins rémunératrice...» Grégoire Gindre a bénéficié du soutien de son épouse: «Elle me disait que, s'il le fallait, elle était prête à vivre dans un studio!» Sachant qu'ils vont momentanément restreindre leur train de vie, certains préfèrent se lancer assez jeunes, célibataires et sans enfants. D'autres attendent en mettant de l'argent de côté pour «voir venir». Dans tous les cas, ils sont ravis d'avoir d'abord connu le salariat: «Aujourd'hui, j'applique les méthodes de contrôle des coûts que j'utilisais chez General Electric, où j'étais analyste financier», explique Constance Rietzler (La Belle Epoque). Quant à Andy Gugenheimer, c'est en étant commercial puis responsable marketing dans de grands groupes tels que Nike qu'il s'est constitué son carnet d'adresses. Un «plus» pour son cabinet de recrutement spécialisé dans ce secteur. Anne Saiït (Diversity Conseil) a eu la chance d'être suivie par d'anciens clients: «Le fait de démarrer avec un certain nombre de missions assurées m'a permis de me lancer l'esprit plus tranquille», témoigne-t-elle. D'autant plus tranquille que, selon elle, «une expérience d'entrepreneuriat se revend toujours »
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FRANCOIS-XAVIER POELS, fondateur d'Approche Sur Mesure
TEMOIGNAGE
Habitué au confort des grandes entreprises, j'ai commis des erreurs
Transposer le fonctionnement d'une multinationale à la petite entreprise qu'il avait fondée. C'est l'erreur commise par François- Xavier Poels, lorsqu'il crée, en 1986, Concordance, une société qui produit et commercialise des produits de beauté sur mesure. L'ancien directeur général d'Estée Lauder pèche par ambition: «Je me suis offert de grands bureaux, du matériel haut de gamme, du papier à en-tête commandé par 10000 feuilles, des déjeuners dans de bons restaurants...» Les dépenses excèdent les recettes et, en 1989, c'est le redressement judiciaire et la fin de l'aventure. François-Xavier Poels redevient salarié. Mais le virus d'entreprendre le reprend en 1998. Il crée Approche Sur Mesure (ASM), un centre d'appels destiné aux clients des grandes marques de luxe, en retenant les leçons du passé. «J'ai été beaucoup plus modeste: dans les premiers temps, je ne me suis pas rémunéré et, pour l'entreprise, je ne dépensais que ce que l'avais déjà gagné.» La méthode fonctionne: «A l'inverse de Concordance, ASM est parti de très bas pour aller de mieux en mieux.» Aujourd'hui, l'entreprise compte parmi ses références les plus grandes marques de luxe et François-Xavier Poels a retrouvé le niveau de rémunération qu'il avait dans les grands groupes de cosmétiques.
APPROCHE SUR MESURE - Repères
- ACTIVITE: centre d'appels
- VILLE: Levallois-Perret (Hauts-de-Seine)
- FORME JURIDIQUE: SA à conseil d'administration
- NOM ET AGE DU DIRIGEANT: François- Xavier Poels (59 ans)
- DATE DE CREATION: 1998
- EFFECTIF: 60 salariés
- CA 2005: 3 millions Euros
COMPRENDRE
Protéger sa famille et préparer sa retraite
Quand on monte son entreprise, on pense plus à développer son activité et son chiffre d'affaires qu'à se prémunir contre le chômage ou à cotiser pour sa retraite. Pourtant, c'est dès le début qu'il faut se pencher sur ces questions. Les conseils d'Hervé Tisserand, cofondateur d'Altaprofits, société de courtage en produits d'assurances.
1 PENSEZ AUX ARRETS DE TRAVAIL
Pensez, avant tout, à la prévoyance car en cas d'arrêt de travail ou d'invalidité vous n'êtes plus couvert. Inutile, pour autant, de vous surassurer: pour que cette protection ne vous coûte pas trop cher, optez pour des délais de franchise relativement élevés. Mais attention, dans le cadre de la loi Madelin, en cas d'arrêt de travail, d'invalidité ou de décès, les indemnités sont versées sous forme de rente et non de capitaux. Pensez donc à mener une étude approfondie de vos besoins professionnels et personnels.
2 UNE ASSURANCE-VIE PROTEGE VOTRE FAMILLE
N'oubliez pas non plus votre famille: vous pouvez la protéger en souscrivant une assurance-vie.
3 AMELIOREZ VOTRE RETRAITE EN CAPITALISANT
Pensez enfin à capitaliser pour votre retraite. Mais sur ce point, si vous êtes un jeune créateur d'entreprise et que vos revenus sont très modestes, vous pouvez attendre quelques années afin d'être plus à l'aise financièrement.
A SAVOIR
- PROFITEZ DES DEDUCTIONS FISCALES
Surtout, n'oubliez pas que la loi Madelin vous permet de déduire du bénéfice imposable les sommes versées dans le cadre de la prévoyance et de la retraite.