Ces PME REGIONALES qui rayonnent dans le MONDE ENTIER
Biscuits bretons, pastilles de Flavigny en Bourgogne, Verrerie de Biot ou Dentelle de Calais : ces produits portent en eux les gènes d'une région mais sont vendus bien au-delà de leurs «frontières». Quatre exemples de PME qui exportent leur identité régionale et font un tabac avec leur produit «made in...».
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LE CONSULTANT
Georges Lewi, directeur général de BEC Institute, est un expert en marketing de la marque. Il porte un regard sur les stratégies commerciales et marketing de ces quatre PME.
1 CAS
Codentel s'appuie sur un savoir-faire unique
Grâce à l'innovation et une organisation souple, la PME commercialise ses dentelles de Calais partout dans le monde. Et perpétue un savoir-faire français dans le secteur du luxe.
Dans l'atelier de Calais, le bruit des machines est assourdissant. 300 tonnes de fonte et de cuivre sont en action. Derrière leurs métiers (dont le plus récent a ... 80 ans), les dentelliers demeurent imperturbables, concentrés sur leur tâche. Nous ne sommes pas en 1910, mais bel et bien en 2010. Chez Codentel, une trentaine de «petites mains» fabriquent un textile de grande qualité, celui qui a fait la réputation du port depuis l'arrivée des machines anglaises au XIXe siècle. Si l'entreprise a connu un revers avec la crise (- 20 % l'an passé), 2010 s'annonce sous de meilleurs auspices. «Ce n'était qu'une parenthèse dans notre développement», assure Antoine Poitau, le gérant, qui croit en l'avenir d'une dentelle française haut de gamme. Loin du redressement judiciaire qui frappe actuellement son principal concurrent, Codentel a décroché, au cours du premier trimestre de l'exercice en cours, des contrats avec deux nouveaux clients prestigieux : les spécialistes de la lingerie Lejaby et Lise Charmel. De quoi inciter le dirigeant à tabler sur une croissance du chiffre d'affaires de quelque 6 % en 2010.
Une fusion de raison. La société réalise 75 % de ses recettes auprès de grands noms de la lingerie comme Aubade, Barbara, Nina Ricci, Dior, Chantal Thomass ou Chantelle. La couture (Chanel), le prêt-à-porter (Zadig et Voltaire, Comptoir des cotonniers) et la mode enfantine (Jacadi) assurent les 25 % restants. En France, où la PME réalise 50 % de son chiffre d'affaires, Antoine Poitau traite en direct avec les confectionneurs. A l'export, il fonctionne avec des agents commerciaux multicartes implantés aux Etats-Unis, en Australie, en Italie, en Allemagne et au Japon. C'est d'ailleurs le pays du Soleil Levant qui, voici plus de trente ans, se montrait le plus friand de ce textile. L'engouement international pour la dentelle date, en effet, des années soixante-dix. Le chef d'entreprise s'en rappelle bien. A l'époque, il travaillait déjà dans le secteur et l'export représentait la moitié des revenus de Peeters et Perrin, son entreprise d'alors. Conscient du poids de l'international dans la croissance de ce business, Antoine Poitau n'a pas hésité à fusionner son entreprise avec une autre PME aux compétences complémentaires. C'est ainsi qu'en 1999, Codentel est née de l'union de Peeters et Perrin (spécialiste de la dentelle large de Valenciennes) avec Aubert (spécialiste des finitions). «Nous avons acquis une taille critique rassurante pour nos clients - notamment étrangers - et particulièrement adaptée à la structure du marché», explique le quinquagénaire.
Un maître-mot : adaptabilité. Ce qui différencie Codentel de ses concurrents ? Son savoir-faire d'abord : l'expérience des collaborateurs issus des deux maisons assure, en effet, une production dont la qualité est reconnue à travers le label «Dentelle de Calais». Sa souplesse, ensuite, car l'entreprise n'impose pas de quantité minimale de pièces à commander, à l'inverse de sociétés plus grandes. L'innovation, enfin, avec la création, deux fois par an, d'une quinzaine de dessins par une esquisseuse. Les clients peuvent ainsi faire leur choix parmi une collection centenaire et des modèles plus modernes. Des atouts qui ont permis à la PME de surfer avec succès sur le retour en grâce de la dentelle entre 2005 et 2008. Ces années-là en effet, le prêt-à-porter haut de gamme redécouvre la beauté de ce textile. Princesse Tam.tam et Zadig & Voltaire, par exemple, passent commande pour des quantités phénoménales (800 000 mètres, rien que pour le spécialiste de la lingerie sur une année). Codentel, qui dispose d'une capacité de production pouvant varier du simple au double sur une journée, embauche quelques intérimaires et le tour est joué. Sur l'ensemble de la période, le chiffre d'affaires connaît une hausse de 50 %. Une fois la mode passée et la crise arrivée, Antoine Poitau parvient encore à s'adapter. Comment ? «En faisant bon usage d'un budget formation inutilisé», indique l'intéressé. Dès mai 2009, neuf salariés suivent des cours de secrétariat, soudure, chauffage, etc. Objectif : leur assurer une reconversion si 2010 s'avère catastrophique. Compte tenu de la reprise amorcée depuis quelques mois, la plupart devraient finalement retourner derrière leur métier.
L'OEIL DU CONSULTANT
Un vrai courage industriel et civique : bravo !
GEORGES LEWI, spécialiste du marketing de la marque
«Je tire mon chapeau à Antoine Poitau !» Georges Lewi, directeur général de BEC Institute, est admiratif du travail accompli par le dirigeant de Codentel : « Il sauve un patrimoine et assure le maintien, voire le renouveau du «made in France» de luxe en faisant montre d'un courage industriel et civique qui suscite le respect. » Pour cet expert, le chef d'entreprise devrait tout de même réfléchir à la création d'un produit à sa propre marque, d'une ligne, voire d'une gamme, par exemple des gants en dentelle. Objectif : sortir de la case sous-traitant pour s'adresser directement au consommateur final. « Certes, cela représente un changement de métier, reconnaît Georges Lewi, mais cette diversification permettrait de compenser la perte d'un donneur d'ordres et d'optimiser le temps de travail des salariés durant les périodes creuses. »
CODNTEL Repères
- ACTIVITÉ: Fabrication de dentelles de Calais
- VILLE: Calais (Pas-de-Calais)
- FORME JURIDIQUE: SARL
- DIRIGEANT: Antoine Poitau, 55 ans
- ANNEE DECREATION: 1999
- EFFECTIF: 63 salariés
- CA 2009: 3,3 MEuros
2 CAS
La Verrerie de Biot mise sur le Web pour élargir sa clientèle
Si l'ouverture de son atelier aux touristes - principalement étrangers reste son premier débouché, le fabricant de verre mise désormais sur son site marchand pour briller hors des frontières.
Emerveillés, les visiteurs admirent l'artisan au travail. D'un geste sûr, le verrier puise la matière vive dans le feu, souffle, puis façonne une pièce unique sous les yeux d'un groupe de touristes conquis. Britanniques, Américains, Néerlandais, ils sont venus tout spécialement à Biot, petit village des Alpes-Maritimes situé à quelques kilomètres d'Antibes, pour admirer ce savoir-faire récemment distingué par le label «Entreprise du patrimoine vivant» (voir encadré ci-dessous). Conquis, ils effectueront un passage par la boutique. Tous, ou presque, repartiront avec des verres, des pichets, des coupes, des vases, des photophores en verre bullé, caractéristique de la Verrerie de Biot. A l'instar des 700 000 visiteurs annuels du site, ils ramèneront chez eux pour 80 euros en moyenne de marchandises par famille. Et auront, pour la plupart, déboursé 3 euros pour écouter les commentaires du conférencier de l'écomusée voisin sur les outils anciens, le vieux four, les différentes techniques et le secret des fameuses bulles.
Depuis 1956, année de la création de la verrerie, l'atelier est ouvert au public. Mais c'est surtout depuis 1973, année du rachat de l'entreprise par les parents de l'actuelle dirigeante, que la verrerie est devenue un véritable site touristique (lire encadré page 57). Les lieux sont composés aujourd'hui de la Halle des verriers (pour les démonstrations des 15 artisans), d'une boutique, d'un restaurant, d'une galerie (où sont exposées des oeuvres en verre d'artistes internationaux) et d'un écomusée (géré par une association dont l'entreprise est le premier donateur à raison de plusieurs dizaines de milliers d'euros par an). En 2009, le site a généré 75 % du chiffre d'affaires global, qui s'est établi à 3,5 Me. «Nous avons inventé le tourisme industriel», se félicite Anne Lechaczynski, la p-dg. Un canal de vente et de promotion qui a porté le développement de la marque bien au-delà des frontières du département. Les clients étrangers (Britanniques, Américains et Européens du Nord essentiellement) représentent 80 % des ventes et ce, depuis les années soixante-dix. Mais la direction sait qu'elle ne peut plus miser sur ce seul canal.
Accent sur le Web. Simple vitrine à son lancement en 1998, le site web de la marque, www.verreriebiot.com, est devenu, huit ans plus tard, un canal de vente à part entière. En 2009, il a généré 3 % des recettes. « C'est encore peu », reconnaît la chef d'entreprise, qui nourrit pourtant l'espoir que ce chiffre atteigne 10 % dans deux ans. Mais l'affaire est compliquée. Le nombre de références alourdit l'ergonomie du site et la gestion des frais de port dans les différents pays du monde relève du casse-tête. Résultat, seuls les Français et les Américains peuvent, à ce jour, commander les produits. Cette année, Anne Lechaczynski se l'est promis, elle trouvera la solution. Il faut dire que les débouchés ne sont pas négligeables. Sur le site, le panier moyen tourne autour de 180 euros. Mais surtout, il génère des ventes toute l'année, tandis que la boutique réalise l'essentiel de son chiffre d'affaires durant la haute saison touristique. Le reste du chiffre d'affaires - un petit quart - provient du réseau de revendeurs. Car les vases, verres, pichets et autres produits de la Verrerie de Biot sont également disponibles dans une soixantaine de magasins de décoration en France, près de 200 aux Etats-Unis et plus de 300 dans le reste du monde. De plus, la PME a les faveurs de grands noms de la cuisine française, comme Alain Ducasse, mais aussi du Moyen-Orient, notamment. Pour cette clientèle, la dirigeante conçoit des lignes spécifiques. D'ailleurs, cette année, elle compte développer ses relations commerciales avec des chefs étoilés en dessinant de nouvelles collections.
A SAVOIR
Protéger son savoir-faire
Le label Entreprise du patrimoine vivant est attribué pour cinq ans à toute entreprise qui détient un patrimoine économique, composé en particulier d'un savoir-faire rare, renommé ou ancestral, reposant sur la maîtrise de techniques traditionnelles ou de haute technicité et circonscrit à un territoire. Cette marque du ministère de l'Economie, de l'industrie et de l'Emploi a été mise en place en 2006. Plus d'informations sur www.patrimoine-vivant.com.
VERRERIE DE BIOT REPERES
ACTIVITE : Fabrication de verre
VILLE : Biot (Alpes Maritimes)
FORME JURIDIQUE : SA
DIRIGEANT : Anne lechaczynski, 47 ans
ANNEE DE CREATION : 1956
EFFECTIF : 30 salariés
CA 2009 : 3,5 MEuros
ANNE LE CHACZNSKI, dirigeante de la verrerie de Biot
« Nous avons inventé le tourisme industriel»
L'OEIL DU CONSULTANT
La verrerie doit assurer une montée en gamme de ses produits
GOERGES LEWI, spécialiste du marketin de la marque
Comment changer de métier en gardant la même industrie, voilà la problématique à laquelle répond parfaitement la verrerie de Biot, selon Georges lewi, directeur général de BEC Institute. Pour cet expert en marketing de la marque, la PME est parvenue, en ouvrant ses portes au public, à sauver son industrie. «Mais cibler les touristes ne suffit pas pour donner une nouvelle dimension à l'entreprise», affirme-t-il. Afin de ne plus dépendre des vacanciers, la dirigeante développe ses ventes via internet. Mais elle devrait aussi, selon lui, mettre l'accent sur les boutiques d'art et de design, «là où se trouvent les relais de croissance». Pour ce faire, Georges lewi conseille de faire appel à des créateurs externes et d'assurer une montée en gamme des produits : «Fini le métier de verrier artisan, il faut devenir verrier créateur. »
ZOOM
> CULTURE «PUB»
Dès les années soixante-dix, Jean et Danielle Lechaczynski, précurseurs pour leur époque, ont fait appel à une agence de communication qui a notamment créé le logo de leur société, la Verrerie Biot. en digne héritière, leur fille continue à miser sur les relations presse et la publicité. Le budget alloué aux achats d'espaces dans la presse «déco» (Elle Décoration ou Marie Claire Maison) et l'affichage local l'été se situe entre 100 000 et 300 000 euros par an.
3 CAS
Les Anis de Flavigny adoptent une stratégie commerciale multicanal
Tout comme son père et son grand-père, Catherine Troubat impose sur les marchés français et étrangers ses confiseries traditionnelles produites en Bourgogne.
Dans le duty-free des aéroports de Johannesburg et du Cap, elles trônent depuis quelques semaines aux côtés des produits haut de gamme français comme le foie gras ou le vin. Les amateurs de football qui viendront du monde entier pour assister à la Coupe du monde ne devraient donc pas les rater. Elles, ce sont les Anis de l'Abbaye de Flavigny. De charmantes boîtes métalliques ovales à l'effigie d'un jeune couple de bergers. A l'intérieur : des confiseries à l'anis, déclinées en sept arômes, produites à 10 heures de vol de là. Les Anis de l'Abbaye de Flavigny sont en effet fabriqués au coeur de la Bourgogne, dans le village où les moines bénédictins les confectionnaient déjà au XVIe siècle. Catherine Troubat, la gérante, compte profiter de l'événement sportif pour s'assurer une belle vitrine et affirmer sa stratégie de développement à l'export.
Déjà présentes dans une trentaine de pays (Italie, Royaume-Uni, EtatsUnis, Chine, Emirats arabes unis, etc.), les graines d'anis enrobées devraient faire fondre davantage de gourmands étrangers dans les deux à trois ans à venir. Car pour faire passer la part du chiffre d'affaires à l'export de 30 % à 45 %, la dirigeante met toutes les chances de son côté et multiplie les déplacements sur les salons professionnels comme le Foodex au Japon.
Soutenue par une responsable export engagée en 2006, la quadragénaire a également lancé, en janvier 2009, un site marchand traduit en cinq langues. Les internautes (issus de 180 pays) commandent, pour le moment, un panier moyen de 60 euros. Cette année, Catherine Troubat compte se concentrer sur le développement commercial du site. L'accent sera mis sur l'échange de liens avec le comité régional du tourisme et d'autres fleurons régionaux comme la moutarderie Fallot.
Multiplier les points de vente en
France. Le succès à l'export et la montée en puissance du site internet ne font pas oublier son pays à Catherine Troubat. Elle y réalise 70 % de ses ventes (10 % en Bourgogne). Sa stratégie de développement national ? La multiplication des points de vente. « Je reproduis le modèle économique de mon grand-père et de mon père », confie-t-elle. Au début du siècle dernier, Jean Troubat a conquis la clientèle parisienne en proposant ses confiseries dans les grands magasins, aux forains et surtout dans les distributeurs automatiques des métros. Nicolas Troubat, son fils, a démarché les stations services. Catherine Troubat, elle, mise sur les relais des gares, les jardineries comme Botanic et Jardiland ainsi que sur les magasins bio tels Naturalia ou La Vie Claire pour lesquels une gamme dédiée a vu la jour voici cinq ans. Depuis la fin 2009, les Anis de Flavigny sont référencés par le grossiste alimentaire Métro, ce qui permet à la PME de pénétrer le marché de l'hôtellerie-restauration. Le distributeur de sachets individuels a tout de suite séduit l'établissement Bernard Loiseau ainsi qu'une dizaine de relais châteaux. Sur le site de l'entreprise, les internautes n'hésitent pas à faire des suggestions de nouveaux arômes. La dirigeante veille d'ailleurs à ne pas se couper du consommateur final. Ainsi, depuis trois ans, une boutique a ouvert ses portes dans l'enceinte de l'entreprise. Les 30 000 visiteurs annuels représentent déjà 5 % du chiffre d'affaires.
Une croissance toute en sécurité. Boutique, site web, restauration hors foyer, magasins de détail, relais de gare, aucun de ces réseaux de distribution ne génère plus de 10 % du chiffre d'affaires. Pourquoi ? « La diversification est, à mon sens, seul gage de pérennité », explique Catherine Troubat. Cette dernière souhaite en effet transmettre à ses neveux une affaire solide. Et l'entreprise se structure. Depuis le milieu des années 2000, une dizaine de collaborateurs (chef de production, qualiticien, responsable commercial, etc.) venus de toute la France ont rejoint la quinzaine de salariés locaux. L'entreprise a vu, en effet, son chiffre d'affaires augmenter de 60 % en dix ans. « Nous allons à notre rythme, doucement mais sûrement », commente la dirigeante, qui produit 220 tonnes d'anis par an. Un rythme qui devrait s'accélérer à moyen terme. L'entreprise a acquis, récemment, un terrain situé à quelques centaines de mètres de l'usine. Il devrait accueillir un second site de production d'ici deux ou trois ans.
L'OEIL DU CONSULTANT
Il faut se focaliser sur le marché national
GEORGES LEWI, spécialiste du marketing de la marque
Selon Georges Lewi, directeur général de BEC Institute, la croissance des Anis de Flavigny se fait de manière intelligente en s'appuyant sur des atouts avérés : l'ancrage local, un produit atypique et des codes packaging revisités mais d'origine. Petit bémol toutefois : «Attention à ne pas se disperser », met en garde l'expert. «La dirigeante aurait intérêt à se focaliser sur le marché français, notamment en poursuivant sa conquête de l'hôtellerie-restauration, un segment prometteur, avant de s'attaquer à la grande distribution. » Une fois cette tâche sur le territoire national accomplie, l'entreprise pourrait alors se développer à l'export. Georges Lewi suggère de travailler à l'étranger méthodiquement, «par cercles concentriques» sans nécessairement chercher «les coups» comme la Coupe du Monde de football.
LES ANIS DE FLAVIGNY Repères
- ACTIVITE : Fabrication de confiseries à l'anis
- VILLE : Flavigny-sur-Ozerain (Côte d'or)
- FORME JURIDIQUE : SARL
- DIRIGEANTE : Catherine Troubat, 47 ans
- ANNEE DE CREATION : 1790
- EFFECTIF : 26 salariés
- CA 2009 : 3 MEuros
- RESULTAT NET 2009 : NC
EN BREF
Variations autour des parfums
Ces quatre dernières années, Catherine Troubat a créé des variations adaptées aux papilles étrangères : des bonbons à la réglisse pour les Italiens, d'autres à la violette pour les Américains. Les arômes qui étaient boudés, comme le jasmin ou la vanille, ont par ailleurs été sortis du catalogue, composé en tout d'une centaine de références.
4 CAS
La Biscuiterie Terre et Soleil parie sur le bio et ses propres magasins
En huit ans, Séverine Pallu a séduit plus de 150 magasins bio avec ses biscuits bretons. Depuis 2006, elle a également ouvert 12 magasins dans sa région et lorgne déjà sur Paris.
La perle rare, voilà ce que recherche, depuis la fin 2009, Séverine Pallu, gérante de la Biscuiterie Terre et Soleil. Sa treizième «Biscuiterie de Saint-Brieuc», une boutique de biscuits et spécialités bretonnes, la trentenaire souhaite l'ouvrir à Paris. Séverine Pallu compte y proposer des produits traditionnels fabriqués artisanalement. Seulement, les emplacements dans les quartiers touristiques, près de la Tour Eiffel ou à Montmartre, sont rares et chers. Alors son projet avance doucement. D'autant plus doucement que pour faire face à la croissance de la société ( + 40 % en 2008 et + 25 % en 2009, 15 recrutements ces trois dernières années), elle compte augmenter son outil de production à l'horizon 2012 ou 2013. «Pour cela, je dois conserver une capacité d'endettement», explique la dirigeante, encore incertaine quant à sa décision finale. Pourtant, le marché existe dans la capitale, elle le sait : les Bretons «exilés» y sont nombreux et les touristes étrangers, notamment, adorent les produits «made in Brittany», comme les palets. Cerise sur le kouign amann : la Biscuiterie Terre et Soleil collabore déjà avec un livreur basé en Ile-de-France, ce qui faciliterait la logistique. Alors si ce n'est pas cette année, ce sera après l'emménagement dans sa nouvelle usine.
70 % des ventes réalisées l'été.
Ses «Biscuiterie de Saint-Brieuc» - 12 boutiques entre Saint-Brieuc et Saint-Malo - sont stratégiquement implantées. Chacune est située au centre d'une ville touristique, dans une rue passante. 70 % des ventes sont d'ailleurs réalisées entre juillet et septembre. Ses clients ? D'un côté, les vacanciers. De l'autre, les Bretons exilés qui font le plein de produits régionaux avant de repartir chez eux. Les boutiques accueillent aussi des étrangers de pays limitrophes comme la Suisse ou la Belgique. A la demande de clients fidèles en manque de douceurs entre deux passages en boutique, la chef d'entreprise a créé en 2009 le site Biscuiteriedesaintbrieuc.fr qui assure des livraisons partout en France et à l'étranger. Il ne génère aujourd'hui que 1 % des ventes. «Ce n'est pas encore un véritable levier de croissance», reconnaît Séverine Pallu. Le panier moyen, de 25 euros, aurait pourtant de quoi l'inciter à le développer. Mais la dirigeante préfère se focaliser, cette année encore, sur l'activité initiale de la Biscuiterie Terre et Soleil : les biscuits bretons bio distribués dans des magasins spécialisés.
A l'origine, le bio. Car, quand elle crée sa société, en 2002, cette ancienne responsable marketing d'une grande entreprise d'agroalimentaire mise tout sur le bio. Fine connaisseuse de ce secteur, de ses producteurs et de son circuit de distribution, en Bretagne comme dans le reste du pays, la jeune femme lance sa marque, Graine d'enVie. Son credo : proposer des gâteaux bretons riches en beurre, et non pas diététiques comme la plupart des références bio disponibles à l'époque. Une excellente idée : aujourd'hui, la marque Graine d'enVie et ses 30 produits (fars, crumbles aux pommes, palets, etc.) ont leur place dans les rayons de 150 points de vente (dont 40 en Bretagne). Cette branche bio génère 40 % des ventes globales de la Biscuiterie Terre et Soleil. Les 60 % restants sont assurés par les 12 boutiques «Biscuiterie de Saint-Brieuc», dont la première a vu le jour en 2006.
Cette année, la dirigeante espère faire passer son chiffre d'affaires de 1,8 à 2,4 MEuros. Elle compte notamment sur son nouveau commercial - le 6e de son équipe - pour conquérir des points de vente bio et faire référencer les deux ou trois produits en cours de développement, «des produits à la frontière de la confiserie», soufflet-elle. Séverine Pallu ne relâche pas non plus ses efforts en matière de prospection. Sa responsable «salon» sillonne la France tous les week-ends pour promouvoir la marque Graine d'enVie auprès des consommateurs et professionnels présents sur les foires et les salons bio. La vente directe lors de ces événements représente 8 % du chiffre d'affaires de cette branche. C'est à l'occasion de rencontres comme celles-ci que des petits contrats ont été signés avec des grossistes belges ou chinois. Alors cap sur l'export avec la gamme bio ? «A moyen terme, c'est possible», lance la chef d'entreprise.
L'OEIL DU CONSULTANT
On retrouve le savoir-faire des marketeurs de la grande distribution
GERGES LEWI, spécialiste du marketing de la marque
Selon Georges lewi, directeur général de BEC Institute, Séverine Pallu a adopté une stratégie de rétro marketing : elle joue sur la nostalgie des bons produits que l'on mangeait enfant. «La marque «Biscuiterie de Saint-Brieuc" est nouvelle mais fait référence à des valeurs traditionnelles dont les consommateurs sont friands», analyse l'expert. Pour lui, on retrouve ici tout le savoir-faire des marketeurs de la grande distribution. la logique de marque suiveur (stratégie appelée «Me too») est parfaitement mise en place. En effet, la Biscuiterie Terre et Soleil n'invente rien. Elle s'inscrit dans la lignée de nombreuses enseignes de gâteaux bretons déjà existantes comme les Galettes Saint-Michel. Pour ce faire, elle utilise - et c'est malin - une ville encore sous-exploitée dans une optique marketing, à savoir Saint-Brieuc. Georges lewi conseille à la gérante d'acquérir une boutique à Paris afin de renforcer sa visibilité et d'asseoir son statut de «grande» marque. Enfin, il convient de réfléchir à la suppression de la marque bio Graine d'envie au profit de la marque Biscuiterie de Saint-Brieuc. « Une marque unique et forte est plus facile à gérer», justifie l'expert
BISCUITERIE TERRE ET SOLEIL
repères
ACTIVITE : Fabrication de biscuits et produits régionaux
VILLE : Saint-Brieuc (Côte d'Armor)
FORME JURIDIQUE : SARL
DIRIGEANT : Séverine Pallu, 39 ans
ANNEE DE CREATION: 2002
EFFECTIF : 25 salariés
CA 2009 : 1,8 MEuros
RÉSULTAT NET 2009 : NC