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ISF et biens professionnels : les écueils à éviter

Publié par Frédérique Perrotin le | Mis à jour le

Le statut des biens professionnels exonérés d'ISF peut être remis en cause par l'administration fiscale. Le point sur les zones de fragilité et les précautions à prendre.

Outre les oeuvres d'art et autres objets de collection, les biens professionnels échappent à l'ISF (impôt de solidarité sur la fortune). Un principe général très encadré par le législateur qui l'a soumis à conditions. " Il s'agit d'une présomption simple. L'administration a la possibilité de réintégrer un bien si elle estime qu'il ne réunit pas toutes les conditions pour entrer dans la catégorie des biens professionnels ", explique Étienne Guérin, directeur du pôle Ingénierie patrimoniale de l'étude notariale VH 15 Notaires. " Bercy se montre désormais particulièrement vigilant sur ce point. Et le contrôle de la réalité des situations déclarées se fait plus rigoureux ", signale Pascale Pellarin, responsable de l'ingénierie patrimoniale de la Banque Palatine.

Des conditions très contrôlées

Pour les entrepreneurs individuels, les biens nécessaires à l'exercice de leur activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et affectés à celle-ci, sont exonérés d'ISF, à la condition que cette activité soit exercée par le propriétaire des biens ou par son conjoint, son partenaire lié par un Pacs ou encore son concubin. Cette activité doit constituer sa profession principale. Les associés de personnes exerçant une telle activité, non soumise à l'impôt sur les sociétés sont, quant à eux, automatiquement exonérés d'ISF sur leurs parts sociales, dès lors qu'ils exercent leur activité professionnelle principale dans cette société.

Pour les parts ou actions de sociétés soumises à IS, l'exonération est soumise, là encore, à des conditions particulières. Le propriétaire des titres (ou un membre de son foyer) doit exercer une fonction de direction. Et celle-ci doit être effective. Un président de conseil de surveillance, qui se contenterait de mener les débats sans y participer activement, risque de voir la qualification de ses actions remise en cause avec succès par l'ad­­­­­ministration fiscale. " La rému­­nération versée doit être normale et en rapport avec les services rendus, avertit Pascale Pellarin. Une société qui privilégierait la distribution de dividendes pour son dirigeant et lui verserait donc une rémunération inférieure à celles des cadres supérieurs de l'entreprise court le risque que cette rémunération soit considérée comme anormale. "

Dernière condition : détenir a minima 25 % des droits de vote, individuellement ou grâce au groupe familial, en direct ou via une société interposée. Une condition qui n'est pas requise si les titres détenus par le dirigeant représentent plus de 50 % de la valeur brute de son patrimoine. Dans certains cas, la qualification de biens professionnels s'avère particulièrement délicate à démontrer.

Des frontières poreuses pour certains biens

Lorsque les biens professionnels sont constitués par des titres de holding, cette dernière doit exercer une fonction d'animation au sein du groupe, pour que l'exonération d'ISF s'applique. De nouveau, les preuves d'une telle animation devront être documentées. " Cette documentation ne peut se résumer à un contrat de prestations de services facturées par la holding à ses filiales, commente Étienne Guérin (VH 15 Notaires). Il faut apporter des preuves concrètes que la direction s'opère au niveau de la holding. "

Autre difficulté : " Lorsque la holding détient à la fois des sociétés opérationnelles et des sociétés immobilières dans lesquelles est logé l'outil professionnel, la qualification de la holding au regard de l'ISF devient plus compliquée ", signale Pascale Pellarin (Banque Palatine). En outre, la trésorerie de l'entreprise constitue un cheval de bataille de l'administration. Les liquidités et titres de placement inscrits au bilan d'une société sont certes présumés constituer des actifs nécessaires à l'activité professionnelle, mais l'administration fiscale conserve la possibilité de démontrer qu'ils ne sont pas nécessaires à l'accomplissement de l'objet social. En conséquence de quoi elle peut les réintégrer dans l'assiette de l'ISF sauf si la société parvient à justifier cette trésorerie pléthorique : un projet d'investissement par exemple, dont elle devra apporter la preuve (devis pour un agrandissement, décision de commandes de nouvelles machines, etc.).

C'est la disproportion marquée entre, d'une part, les liquidités et les placements financiers et, d'autre part, la progression de la valeur nette comptable et du chiffre d'affaires de la société qui attire l'attention de l'administration fiscale. " Une société qui a récemment vendu une filiale ne sera pas inquiétée, explique Pascale Pellarin. En revanche, si la situation perdure sur deux à trois exercices sans projets d'investissement à l'horizon, vous entrez dans une zone de risque. "

Enfin, si vos titres ne peuvent être considérés comme des biens professionnels, vous pouvez bénéficier d'une exonération de 75 % à condition de souscrire un engagement collectif de conservation (pacte Dutreil ISF). L'exonération de l'ISF n'est acquise qu'à l'issue d'une durée de six ans (engagement collectif de deux ans, puis un engagement individuel de quatre ans). Enfin, " les titres reçus en contrepartie de souscription au capital de PME restent totalement exonérés, même si l'éligibilité à ce dispositif a été récemment revue à la baisse ", conclut Pascale Pellarin.

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