[Édito] Paradise Papers, la remise en cause du principe de concurrence
Publié par Julien van der Feer le - mis à jour à
Les "Paradise Papers" mettent en lumière de nombreux dysfonctionnements. Le plus préoccupant : les pays européens se livrent une guerre fiscale féroce, remettant en cause les principes même de concurrence entre les entreprises, notamment entre les PME et les grands groupes.
Apple, Nike, Facebook, Whirlpool... Voici quelques-unes des grandes entreprises éclaboussées, pour l'heure, par l'affaire des "Paradise Papers". Cette enquête internationale, menée conjointement par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), met en lumière, une nouvelle fois, les montages financiers pratiqués par de nombreuses entreprises mondialisées pour payer moins d'impôts. Une pratique, rappelons-le, totalement légale. Une pratique, cependant, amorale. Mais le sujet, dans le fond, n'est pas là.
Cette enquête rappelle, tout d'abord, que les pays européens se livrent une guerre économique féroce. Comme, par exemple, la législation permettant d'exonérer d'impôts sur les bénéfices les filiales irlandaises qui se trouvent en dehors de l'État d'Irlande. Un dispositif voué à disparaître... mais pas avant 2020. À ce jeu, la France fait partie des grandes perdantes.
Autre point notable : l'évasion fiscale renforce le déséquilibre entre les PME et les grands groupes. De fait, même si elles le voulaient, les petites entreprises n'ont pas les moyens de faire de l'optimisation fiscale. Se battre sur son marché contre un leader mondial n'est pas chose aisée. Se battre contre Nike, qui paye moins de 2 % d'impôts sur les bénéfices, remet en question le principe même de concurrence, nécessaire au bon fonctionnement de l'économie.
Selon Gabriel Zucman, économiste français et spécialiste de l'évasion fiscale, à l'échelle mondiale, "plus de 40 % des profits réalisés par les multinationales sont délocalisés artificiellement dans les paradis fiscaux". Une véritable hémorragie, symptôme des dérives d'un système financier devant être repensé en profondeur.