PLFR 2015 : du bon et du moins bon pour les entreprises
Publié par Mallory Lalanne le | Mis à jour le
Le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2015 comporte plusieurs nouveautés fiscales. La réforme du dispositif ISF PME va en surprendre plus d'un. Elle prévoit notamment d'interdire les possibilités d'investissement des chefs d'entreprise dans leur propre société.
Recentrage du dispositif de l'ISF PME sur les jeunes entreprises, 'rétropédalage' sur la prise en charge des indemnités kilométriques vélo... Le projet de loi de finances rectificative pour 2015 (PLFR 2015), examiné à partir du jeudi 10 décembre 2015 par le Sénat, introduit plusieurs nouvelles mesures marquantes pour les entreprises. Pour être définitivement adoptées, ces dispositions doivent être examinées par l'Assemblée nationale, qui a constitutionnellement le dernier mot, jeudi 17 décembre 2015.
L'ISF PME réservé aux entreprises de moins de 7 ans
Le PLFR 2015 prévoit, à compter du 1er janvier 2016, deux nouveautés pour le dispositif ISF PME. Il souhaite en premier lieu mettre fin à la possibilité d'investir directement dans sa propre société. Cette opération facile à mettre en oeuvre pour payer moins d'impôt de solidarité sur la fortune tout en renforçant les fonds propres de sa société pourrait donc être bientôt illégale.
Deuxième modification envisagée : le gouvernement souhaite recentrer le dispositif de l'ISF PME vers les entreprises en phase d'amorçage de moins de 50 salariés et dont le chiffre d'affaires est inférieur à 10 millions d'euros. Et ce, afin de se mettre en conformité avec un règlement européen datant de juin 2014 qui restreint le cadre des aides au financement pour les PME. L'ISF PME ne concernerait plus que les entreprises de moins de 7 ans.
"Ces jeunes entreprises ne doivent pas avoir débuté d'activité sur un marché ou doivent être présentes sur un marché depuis moins de sept ans à compter de la première vente commerciale. Ces précisions vont être définies par décret", commente Mathieu Le Tacon, associé chez Delsol avocats, lors d'une conférence sur le PLFR 2015 organisée par l'AJPME et animée par la rédaction de Chef d'entreprise.
Le gouvernement souhaite par ailleurs aligner le régime de l'IR Madelin, qui offre une réduction d'impôt sur le revenu de 18 % sur les investissements dans des TPE, sur le dispositif de l'ISF PME. "Les députés ont voté un amendement permettant à cet avantage fiscal de s'appliquer aux investissements dans les entreprises de moins de 7 ans, contre 5 ans actuellement. Ces deux outils obligeant les souscripteurs à conserver les titres reçus pendant cinq ans, poursuit Mathieu Le Tacon. L'harmonisation des deux dispositifs va renforcer la lisibilité du dispositif global de soutien aux PME".
Les indemnités kilométriques vélo plafonnées
Introduite par la loi de transition énergétique, l'exonération fiscale des indemnités kilométriques domicile-travail à vélo pourrait ne pas être si incitative. Le PLFR 2015 prévoit de plafonner à 200 euros par an (soit 17 euros par mois) le montant des indemnités exonérées d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales. Il rend par ailleurs le dispositif facultatif pour l'employeur. "Reste à savoir si l'employeur devra aussi prendre en charge à hauteur de 50% les frais de transports publics", poursuit Mathieu Le Tacon.
Le PEA PME renforcé
Opérationnel depuis le 1er janvier 2014, le PEA PME, destiné à encourager l'investissement dans les petites entreprises, ne décolle toujours pas. Pour renforcer l'attractivité du dispositif, les critères d'éligibilité sont simplifiés : le chiffre d'affaires doit être inférieur à 1 milliard et l'entreprise ne doit pas être détenue à plus de 25 % par un actionnaire unique.
Mise en conformité du régime des sociétés mères et des filiales
Les dividendes reçus par les sociétés mères de leurs filiales, françaises ou européennes, sont exonérés d'impôt sur les sociétés, à l'exception d'une quote-part de 5 % représentative des frais et charges.
Le régime de l'intégration fiscale offre quant à lui la possibilité pour une société mère d'intégrer ses filiales, françaises seulement, qu'elle détient à plus de 95 % et ainsi d'être seule redevable de l'impôt sur les sociétés sur le résultat d'ensemble du groupe. Les dividendes sont dans ce cas exonérés à 100%. "Le droit communautaire considère qu'il s'agit là d'une restriction illégale puisqu'il est moins avantageux de posséder une filiale en Espagne qu'en France par exemple", commente Mathieu Le Tacon.
Le PLFR souhaite donc modifier le régime d'intégration fiscale pour le rendre compatible avec le droit communautaire. À l'avenir dans le cadre de l'intégration fiscale, la quote-part de frais et charges serait réduite de 5 à 1%. "Cette opération va être intéressante pour les grands groupes qui possèdent beaucoup de filiales européennes, mais elle le sera moins pour les PME, qui vont désormais être imposées à hauteur de 1% de leurs dividendes alors qu'auparavant elles bénéficiaient d'une exonération fiscale totale", analyse Mathieu Le Tacon.
Zones de revitalisation rurale
Les entreprises créées ou reprises dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) peuvent bénéficier d'une exonération en matière d'impôt sur les bénéfices et d'impôts locaux (taxe foncière, CFE...). Cet avantage fiscal, au lieu de prendre fin au 31 décembre 2015, serait prorogé jusqu'en 2020.
Les critères de classement des ZRR vont être par ailleurs revus à compter du 1er juillet 2017.
Un comité dédié aux litiges liés au CIR et au CII
Il est proposé de créer une instance de conciliation pour le crédit d'impôt recherche (CIR) et le crédit d'impôt innovation (CII). Cette instance intervient, avant la fin d'un contrôle fiscal, sur les désaccords portant sur la réalité de l'affectation à la recherche ou à l'innovation des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR et du CII.
Le comité consultatif, présidé par un Conseiller d'État, comprendra notamment un expert disposant des compétences techniques adaptées à la spécificité des crédits d'impôts. "Ce comité pourra seulement rendre un avis. Un dirigeant qui décide de le saisir pourrait perdre beaucoup de temps", prévient Mathieu Le Tacon.
Réforme du dispositif de financement des exportations
Les garanties publiques à l'export sont un des piliers de la politique de soutien au développement des entreprises françaises. Le Gouvernement propose de renforcer l'efficacité de cette politique en transférant la gestion de ces garanties à Bpifrance.
Le choix de Bpifrance répond à la volonté de l'État de regrouper au sein du même établissement l'ensemble des dispositifs publics financiers de soutien au développement des entreprises, en France et à l'étranger.