Apprentissage : comment éviter les erreurs de casting
Publié par Benjamin Edgard le | Mis à jour le
Miser sur les jeunes pour former la relève et pérenniser son entreprise. C'est le but de l'apprentissage. Reste qu'une bonne organisation entre l'entreprise, le jeune et le CFA sont nécessaire si vous souhaitez que la greffe prenne et embaucher, à terme, l'apprenti formé.
L'apprentissage, une voie royale pour recruter vos futurs collaborateurs ? C'est probable à en croire l'enquête réalisée par l'Association de la fondation étudiante pour la ville (Afev) entre avril et juin 2013. En effet, deux tiers des jeunes interrogés considèrent avoir choisi un métier artisanal par goût personnel. Mais pour recruter des jeunes motivés, vous devez être scrupuleux. Surtout si votre but consiste à recruter des apprentis qui vous permettront, à terme, de pérenniser votre activité. C'est par exemple le cas de Philippe Vignola, peintre en bâtiment à Mantes-la-Jolie, dans les Yvelines : "L'objectif majeur est de renouveler mon personnel. Certains de mes compagnons prendront bientôt leur retraite, et il faut que je pense d'ores et déjà à la relève", explique-t-il.
Un son de cloche partagé par Patrick Pousset, dirigeant d'une entreprise de plomberie à Aubergenville, et dont presque la moitié de son personnel est composée d'apprentis : "Sur mes dix salariés, huit proviennent de l'apprentissage. Quand je prends un jeune, mon but, c'est avant tout l'embauche !", affirme-t-il. Il faut dire que, par ce biais, l'entreprise s'assure d'avoir de futurs salariés formés à ses propres canons. "En les intégrant au plus jeune âge, nous les formons à notre culture, nos méthodes et notre savoir-faire", raconte Alain Laporte, dirigeant de l'entreprise Joly SAS Electricité.
Face à cette exigence, le recrutement demeure scrupuleux. "J'ai vu une centaine de jeunes défilés depuis près de 35 ans. Et la motivation demeure pour moi le critère fondamental à un bon apprentissage", souligne Patrick Pousset. Souvent formés dès l'âge de 16 ans, les jeunes ont accès à une formation plus ou moins longue, comprenant cours à l'école et mise en oeuvre pratique en entreprise. "Je recherche avant tout l'excellence. Je ne peux pas me permettre d'avoir un apprenti moyen, voire médiocre, tout au long de la formation", poursuit-il.
Le CFA, un gage de sûreté
Pour éviter les erreurs de casting, les dirigeants ne lésinent pas sur les moyens. D'abord, certains maîtres d'apprentissage entretiennent des liens privilégiés avec les Centres de formation d'apprentis (CFA) pour éviter le moindre écueil. "J'ai un partenariat avec le CFA d'Aubergenville qui possède une classe Dispositif d'initiative au métier de l'alternance (Dima)", dévoile Patrick Pousset. Grâce à ce mécanisme, il pioche dans ce réservoir où, dès l'âge de 15 ans, les jeunes combinent l'apprentissage de plusieurs métiers et des stages en entreprise, "avant de choisir vraiment leur formation", précise l'artisan.
Ensuite, plusieurs fois par an, le dirigeant contacte les formateurs du CFA pour anticiper les éventuelles difficultés avec un jeune ou faire un point sur sa progression en cours. Car l'apprentissage, "c'est de l'investissement non rentable à court terme", avoue-t-il. En témoigne en premier lieu l'obligation légale de rémunérer le jeune apprenti en un certain pourcentage du SMIC, variable selon l'année d'apprentissage et la branche de métier. "Il faut dire la vérité. Au début, un jeune, c'est une dépense. Car, et c'est normal, il ne connaît pas grand-chose à son métier. Souvent, nous devons repasser derrière lui pour vérifier ou amender son travail", explique le peintre en bâtiment Philippe Vignola. En outre, plusieurs compagnons sont mobilisés pour aider l'apprenti dans son travail au quotidien. Soit une charge de travail supplémentaire pour ces derniers.
Enfin, tout au long de la formation, le maître d'apprentissage doit veiller au grain, c'est-à-dire à la bonne évolution du jeune apprenti. Pour l'y aider, il remplit un livret d'apprentissage à l'intérieur duquel l'apprenti et le dirigeant exposent les progrès notables, ainsi que les points à améliorer. Cet outil permet au CFA de vérifier la bonne relation entre le jeune et son maître d'apprentissage.
L'importance des maîtres d'apprentissage
Malgré tout, cette relation idéale entre l'apprenti et le maître d'apprentissage dépend aussi de la manière dont s'organisent les CFA. "Les dirigeants sont des gens très occupés. Pour cette raison, nous organisons à chaque rentrée une réunion d'information avec les maîtres d'apprentissage. Ils se rendent compte ainsi que nous sommes soucieux du travail appris par l'apprenti", souligne Marie Waltzer, directrice du CFA du Conservatoire nationale des arts et métiers.
Ce travail de reconnaissance et de balisage est très important pour le CFA. Car il s'agit de mobiliser davantage le maître d'apprentissage dans la formation du jeune. La conseillère Jeune entreprise du CFA de la Marne précise que l'objectif reste l'insertion professionnelle du jeune : "Il est essentiel de mieux relier formation scolaire et formation en entreprise, explique-t-elle. Car ce qui est appris dans l'entreprise se ressent à l'école." Mais comment ? En aidant les maîtres d'apprentissage. "Nous les accompagnons tout au long de la formation avec des conseillers. Le but, c'est de leur expliquer qu'ils ne sont pas seulement des artisans mais aussi des formateurs", décrit-elle.
De cette façon, le parcours du jeune est sécurisé et le maître d'apprentissage dispose des moyens pour mener à bien sa formation. "À tout moment du parcours, chaque acteur du CFA va contacter l'entreprise. Cette coconstruction de la formation permet aux jeunes de ne pas décrocher", assure la conseillère Jeune entreprise du CFA de la Marne. Ainsi, le maître d'apprentissage, en plus de son métier, doit être accompagné pour réaliser une bonne formation. Un point essentiel. Avant de penser qu'un apprenti est mauvais, demandez-vous si son formateur est à la hauteur de sa mission.