Maty maitrise le temps et les tendances
Publié par Céline Tridon le - mis à jour à
Spécialiste du bijou et de la montre en vente à distance, Maty compte aussi un réseau d'une trentaine de magasins. Et son ambition est d'en ouvrir encore bien plus ! Du haut de ses 70 ans, l'entreprise familiale est fière d'afficher son indépendance et sa liberté de choix.
Besançon, ville de 118 000 habitants, compte quelques institutions, parmi lesquelles son horloge astronomique, sa citadelle... et le bijoutier Maty. Cette entreprise créée par Gérard Mantion en 1951 n'ouvre presque jamais ses portes au public. Ici, Besançon est un écrin, Maty un joyau qui traverse les décennies. Après tout, les diamants sont éternels...
Si l'entreprise a connu la croissance, elle a aussi eu ses périodes de crise, la plus récente datant de 2020 avec la fermeture de huit magasins et une vingtaine de suppression de postes au siège. Aujourd'hui, le fils de Gérard Mantion, Frédéric, préside le conseil de surveillance mais tout l'exécutif est entre les mains d'André Ségura, le p-dg à la tête de l'entreprise depuis un an et demi. « En arrivant, j'ai pris le temps d'observer. Les années précédentes, il y avait eu beaucoup de changements de stratégie. Alors je me suis renseigné sur les bonnes pratiques dans le secteur de la bijouterie et de l'horlogerie, j'ai écouté les membres du UBH (Union de la Bijouterie Horlogerie). Il fallait comprendre ce qui n'avait pas marché », se souvient celui qui est auparavant passé par Marionnaud et Go Sport. Et aujourd'hui, sa feuille de route est claire : l'heure est au redéploiement de la marque Maty.
Recyclage
« L'image de la marque est déjà bien ancrée. Maty se distingue de ses concurrents par son leitmotiv : rendre le précieux accessible, ajoute le dirigeant. C'est la marque de moments forts en famille (anniversaire, mariage, baptêmes) et de ceux qui veulent se faire plaisir, tout simplement ». Ou plutôt de « celles » qui veulent se faire plaisir... le profil type des clients Maty restant une femme de 46 ans, grande adepte de la vente à distance. Maty fait en effet partie de ses marques dont le catalogue de produits, renouvelé chaque année, est attendu avec impatience par sa fidèle clientèle.
Bien sûr, l'entreprise a aussi pris le virage du digital avec un site web lancé en 2000 et même, depuis 2018, une market place qui comprend 67 vendeurs. En tout, 50 % du chiffre d'affaires de Maty est réalisé hors magasins. C'est pourtant sur ces derniers qu'André Ségura concentre ses efforts. « Le panier moyen chez Maty s'élève à 146 euros, mais parfois, les clients s'offrent de très belles pièces. Ils veulent alors pouvoir l'essayer. Il y a un besoin de proximité », justifie-t-il. Maty veut capitaliser sur une présence physique dans les villes moyennes de France.
L'enseigne compte 32 magasins intégrés. Un 33e a été inauguré en avril à Pontarlier (Haut-Doubs). Non seulement cette adresse adopte le nouveau logo de la marque (un monogramme designé par l'agence Carré Noir), mais elle s'appuie sur une nouvelle forme de partenariat pour Maty : la commission d'affiliation. Maty compte d'ailleurs doubler la taille de son réseau par ce biais, à hauteur de cinq ouvertures par an en moyenne. « Dans cette démarche, nous portons le stock Maty, c'est-à-dire que nous en restons propriétaires. A chaque vente, l'affilié touche une commission », rappelle André Ségura.
L'autre atout de ce modèle ? Il permet de mieux gérer les invendus. L'affilié a besoin d'un produit ? Il peut en faire la demande à Maty. A contrario, il lui reste un certain nombre de pièces sur les bras ? Si elles sont en or 18 carats (ce qui représente 70 % du catalogue bijoux de Maty), il peut les confier au siège qui se chargera de leur recyclage dans la confection de nouveaux bijoux. A l'heure des problématiques de matières premières et de surconsommation, la démarche a de quoi séduire.
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Expertise
En matière de seconde vie, Maty n'en est pas à son coup d'essai. En 2021, l'entreprise lance son offre de bijoux d'occasion, s'inscrivant ainsi dans les nouveaux courants de consommation. Maty s'approvisionne depuis les salles de vente aux enchères ou depuis son réseau de magasins qui rachètent les bijoux de clients qui souhaitent s'en désister.
Dans les deux cas, un important travail d'expertise et de remise à neuf est réalisé au siège afin d'accorder la juste estimation à ces produits pour leur revente. Cette dernière représente 10 % du chiffre d'affaires des magasins, 5 % du site e-commerce.
De même, Maty a signé un partenariat avec Cresus, spécialiste de la montre de luxe d'occasion pour revendre une partie de son catalogue. Après un essai avec le magasin de Nantes qui s'est avéré concluant, l'initiative sera étendue dans une dizaine de magasins Maty. Avoir sa Rolex avant 50 ans ? Le projet devient encore plus réaliste avec l'entreprise bisontine. D'autant plus qu'elle tient à rajeunir sa clientèle. Cap alors sur les réseaux sociaux, avec une présence accrue qui sera travaillée avec l'aide d'une agence spécialisée. « Même si nous continuons de fidéliser notre clientèle historique avec notre catalogue papier, nous voulons aussi séduire de nouveaux consommateurs. Cela passe par une présence accrue sur des plateformes comme Facebook ou Instagram », confirme André Ségura. Une démarche qui lui permettra aussi de charmer une nouvelle main d'oeuvre ?
Sertir des diamants, graver des métaux, polir des bagues, créer une pièce unique à partir d'une pierre précieuse, rajuster un maillon de chaîne, régler le mécanisme d'une montre... Ce ne sont que quelques uns des savoir-faire de l'atelier Maty. « En cas de départ, il devient compliqué de les remplacer, convient le p-dg. Les profils sont peu nombreux et souvent attirés par les avantages qu'offre la Suisse... ».
Pourtant, en matière d'expertise, l'entreprise n'a pas à rougir. Depuis 1978, elle fournit les plus grandes maisons d'horlogerie en pièces assemblées. C'est l'activité B to B, réalisée sous l'enseigne SFM (Société Française de Manufacture) dont l'activité compose 40 % du chiffre d'affaires du groupe.
L'entreprise, qui vient de fêter ses 70 ans tient donc, plus que jamais, à faire parler d'elle. Nulle envie d'être une belle endormie. Maty s'ouvre à tous. Pour preuve, le musée Maty, une collection unique de montres et bijoux des années 1950 à 2010, gardé jalousement au sein du siège social, se refera bientôt une beauté pour accueillir le public.
Bijouterie, horlogerie
Besançon (Doubs)
André Ségura, président, 57 ans
Création en 1951
SA à directoire
530 salariés
CA 2021 : 120 M€