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Loi Pacte et raison d'être, il est temps de passer à l'action !

Publié par Guillaume Dolidon, avocat chez Dolidon Partners le - mis à jour à

La raison d'être, notion récemment consacrée par la loi Pacte, n'est plus seulement un slogan. Considérée comme intrinsèquement liée à la réalisation de profits par Larry Fink, président de la puissante société de gestion BlackRock, la raison d'être devient un réel levier de performance.

La raison d'être n'est pas un simple slogan pour l'entreprise. La citation prêtée à Carlos Ghosn selon laquelle " maximiser le profit est l'unique raison d'être d'une entreprise " est aujourd'hui périmée. Ces dernières années, de nombreuses réflexions et initiatives ont en effet été menées sur la finalité de l'entreprise, notamment autour de la responsabilité sociale et environnementale (RSE), pour mettre en avant des objectifs plus nobles que la simple recherche de profits.

Les aficionados du conférencier britannique Simon Sinek s'accordent tous autour de l'idée suivant laquelle ce qui est le plus important, ce n'est pas ce que vous faites, mais bien " pourquoi " vous le faites. Pour l'entreprise qui assume son rôle sociétal et qui souhaite marquer son utilité, le " pourquoi ", c'est sa finalité, sa cause, autrement dit, sa raison d'être.

En s'inscrivant dans ce mouvement, la loi Pacte, promulguée en mai 2019, a fait entrer la raison d'être dans le droit des sociétés. Dorénavant, l'article 1835 du code civil dispose que " les statuts peuvent préciser une raison d'être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité. " Si cette stipulation statutaire reste optionnelle, on remarquera que la plupart des sociétés du CAC 40 ont déjà modifié leurs statuts pour adopter une raison d'être. De plus, le gouvernement a expressément demandé aux entreprises dans lesquelles l'Etat est actionnaire de suivre cette voie, et à la BPI d'inviter les sociétés dans lesquelles elle détient une participation de définir une raison d'être au cours de l'année 2020.

Les effets juridiques de la raison d'être demeurent, comme sa définition, assez flous. Néanmoins, il faut rester prudent car la méconnaissance de la raison d'être, qui caractérisera dès lors - si elle est formalisée - une violation des statuts, ne manquera pas de servir de fondement à des actions en responsabilité, et ce d'autant plus lorsqu'elle est définie de manière précise et illustrée, voire chiffrée.

La raison d'être, un outil de lecture stratégique pour les investisseurs

Pour autant, la raison d'être ne peut se résumer à une simple recherche de respectabilité ou à un caractère promotionnel. Si elle est déjà valorisée par les collaborateurs de l'entreprise, comme par ses futurs talents, la raison d'être peut aussi devenir une formidable boussole pour les investisseurs en ce qu'elle leur apporte de la prévisibilité sur la façon dont l'entreprise entend se comporter pour réaliser ses objectifs.

La raison d'être, définie de manière précise et exprimant clairement les orientations stratégiques et opérationnelles qui unissent le management, les employés et les actionnaires, sera demain une donnée de lecture aussi importante pour les investisseurs que les rapports annuels, qui couvrent essentiellement la situation économique et financière des sociétés. Cette tendance de fond s'identifie au travers du développement du reporting " intégré " qui est en passe de devenir une norme pour les grandes entreprises. D'origine anglo-saxonne, le " rapport intégré " est un moyen pour l'entreprise de synthétiser sa stratégie et son utilité pour l'économie et la société, selon les recommandations et principes définis par le Global Reporting Initiative (GRI) et l'International Integrated Reporting Council (IIRC).

Les dirigeants et les organes sociaux ont donc tout intérêt à entrer dans l'action, pour définir clairement la raison d'être comme un cadre stratégique de l'entreprise, véritable guide de la conduite de ses activités, révélateur de sa différenciation et donc stimulateur de rentabilité. De cette manière, il ne fait pas de doute qu'elle sera valorisée par les investisseurs.

Pour en savoir plus

Guillaume Dolidon est avocat au barreau de Paris. Il a fondé la société d'avocats Dolidon Partners en 2012. Il conseille des sociétés, entrepreneurs, investisseurs ou dirigeants, à l'occasion d'opérations transactionnelles (corporate finance, fusions et acquisitions, droit boursier) et dans le cadre des contentieux qui s'y rapportent.


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