[Tribune] Holding animatrice : la prudence reste de mise
Publié par Géraldine Vuillermet-Huon le - mis à jour à
Le ministre des Finances a annoncé début juin 2014 le retrait de l'instruction devant clarifier les conditions d'octroi du statut de holding animatrice. Est-ce réellement une bonne nouvelle pour les actionnaires de holdings ?
Lorsqu'on sait que l'administration fiscale accorde aux détenteurs de holdings animatrices une exonération totale d'ISF au titre des biens professionnels, on comprend aisément l'attrait de cette qualification pour un investisseur et, de fait, les intentions de l'administration de restreindre l'accès à ce sésame.
La jurisprudence a entériné la définition édictée par la doctrine administrative, laquelle précise "qu'une société holding animatrice s'entend d'une société qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, participe activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers" (BOI-PAT-ISF-30-30-40-10 n°140).
Cependant, le manque de critère objectif d'une définition si générale a favorisé une jurisprudence abondante, rendant cette notion clé ambigüe.
Il ressort de contentieux fiscaux que l'administration :
- procède à un contrôle rigoureux de la réalité et de l'effectivité de l'animation. A cet égard, la définition de la politique du groupe, sa mise en oeuvre et le suivi de sa stratégie par la holding peuvent être établis par tous moyens de preuve : procès-verbaux des conseils d'administration, rapports de l'exécution du plan stratégique remis par les filiales à la holding (etc.) et à titre subsidiaire, conventions d'animation et de prestations de services entre la holding et les filiales
- exige un contrôle exclusif des filiales
- considère que seule serait animatrice la holding qui détiendrait des participations, toutes dirigées et contrôlées exclusivement par elle.
Bercy a souhaité clarifier sa doctrine sur la holding animatrice en reprenant dans un projet de circulaire, mot pour mot, la définition traditionnelle, mais en précisant deux notions essentielles :
- "participation au contrôle des filiales" : la holding doit contrôler toutes ses filiales. Serait néanmoins admis le caractère animateur, si les filiales animées et contrôlées représentent plus de 50% de l'actif brut de la holding. Serait également recevable une présomption de contrôle, en cas de détention directe ou indirecte d'au moins 25% des droits de vote, à condition qu'aucun autre actionnaire ne détienne une fraction supérieure
- "participation active à la politique du groupe" : la holding doit définir la politique du groupe et en déterminer les décisions stratégiques.
Ce projet mentionnait également le refus de la co-animation d'un groupe par plusieurs holdings et ce point a provoqué une levée de boucliers de la part des entrepreneurs et investisseurs qui, à l'identique des Pigeons, ont lancé une pétition "Non à la circulaire de Bercy anti-entrepreneurs".
Début juin, le ministre des Finances déclarait qu'il ne publierait pas cette circulaire.
Les contrôles fiscaux risquent donc de continuer bon train pour n'aboutir qu'à des solutions au cas par cas. Restent également sans réponse les questions essentielles du traitement à réserver aux autres actifs : filiales non animées, immobilier professionnel et patrimonial ou trésorerie excédentaire. Les actionnaires seront-ils contraints de faire face à une déqualification totale de holding animatrice en holding simple ou pourront-ils bénéficier du maintien de la qualification de holding animatrice, mais avec imposition à l'ISF, des actifs non nécessaires à l'exercice à titre principal d'une activité professionnelle ?
Le flou juridique reste entier.
Précédemment avocat en droit des affaires pendant 8 ans au sein de cabinets américains, Géraldine Vuillermet-Huon a rejoint en 2007, l'équipe en charge du développement des activités de Family Office d'Aforge Degroof, où elle accompagne des actionnaires dirigeants d'entreprises et leurs familles dans la protection, le développement et la transmission de leur patrimoine privé et professionnel, en qualité de Conseil en stratégie patrimoniale et Conseil en investissements.
Rens. : www.degroof.fr