Comment gérer le décès d'un associé actif ?
Publié par Patrick Prugnaud le - mis à jour à
Sujet régulièrement occulté, le décès ou l'incapacité d'un associé sont à envisager dès la constitution de la société pour assurer la survie de l'entreprise. Quelles sont donc les dispositions à prendre et comment réagir face à cette situation ?
Si la synergie entre les associés d'une société est souvent la clé de la réussite d'une entreprise, elle peut devenir sa pire faiblesse. En effet, le départ brutal d'un des associés ou dirigeants peut entraîner des pertes significatives de revenus, voire mettre en péril l'entreprise. Et, cela très rapidement. Quelles sont les solutions existantes pour protéger les associés survivants ? Comment gérer la succession et la pérennité de l'entreprise ?
Anticiper la représentation de la société
Ainsi, dès la création de la société, chaque associé ou dirigeant doit s'interroger sur, ce qu'il adviendra si un accident de la vie venait à le toucher : quels seront les nouveaux associés ; leurs décisions pourront-elles compromettre l'avenir de la société ; comment le ou les associés pourront-ils continuer à garder le contrôle. Autant de questions auxquelles il est nécessaire d'apporter des réponses personnalisées.
Mais, la question qui demeure la plus primordiale, dès les premiers instants, est celle du représentant légal. Car, sans représentant, il est impossible de réaliser les actes les plus courants, nécessaires au bon fonctionnement quotidien de l'entreprise. Si, de prime abord, on croit qu'un pacte d'associés puisse suffire, cette solution est généralement illusoire car il n'est pas opposable aux tiers. Aussi, faut-il lui préférer d'autres dispositifs.
Par exemple, dans le cas d'une SAS, on oublie souvent que le seul représentant légal naturel est le Président. Or, en cas d'empêchement ou de décès, il aurait été opportun d'avoir prévu dans les statuts un directeur général, quitte à ne lui offrir qu'un droit de représentation en cas d'empêchement du Président, et en attendant la nomination d'un nouveau Président.
Pour une autre forme juridique de société, il sera nécessaire d'anticiper dès la rédaction des statuts une clause prévoyant la création d'un dirigeant ad hoc à l'annonce du décès.
Lire aussi : Pensez aux associations !
Garantir la succession de l'entreprise
Outre la nomination d'un nouveau dirigeant de droit, il est aussi nécessaire d'anticiper la charge que représente le montant des droits de succession sur les parts détenues par l'associé-fondateur décédé et/ou l'acquisition de ces mêmes parts par les associés restants. En effet, pour un enfant et un neveu/nièce, le montant des droits de succession s'élève respectivement à 45 % et à 55 %, et jusqu'à 60 % pour un tiers. Des frais qu'ils ne pourront peut-être pas assumer d'autant plus, que bien souvent le patrimoine financier du défunt est souvent constitué en majorité de sa participation dans la société.
Pour les héritiers n'ayant aucun intérêt dans l'entreprise, la cession des actifs, le plus rapidement possible - qui est souvent réalisé à un prix en-dessous du marché - s'avère la solution la plus envisageable. Mais, dans ces conditions se pose la question de la continuité de l'entreprise, notamment pour les associés restants, qui se voient imposer la présence de nouveaux associés, pas toujours désirés, et pouvant entraver la bonne marche de l'entreprise.
Démembrement de titres et création d'une holding
Dès lors, il existe des solutions pour les associés restants pour racheter les titres de l'entreprise ou continuer à garder le contrôle. Certains prévoient des pactes d'associés, mais une mauvaise rédaction peut engendrer une prohibition des tribunaux comme pacte sur succession future. D'autres prévoient des clauses d'agréments dans les statuts, mais cela ne prémunit pas de la capacité d'emprunt ou de la trésorerie suffisante au rachat des titres.
Ces montages nécessitent donc de prévoir une assurance-décès soit pour racheter les titres, soit à minima permettre aux héritiers de payer les droits de succession pour les dissuader de vendre à un tiers. Mais, ce dispositif peut s'avérer rapidement très onéreux.
Dans ces conditions, l'échange du vivant des associés de la nue-propriété du minimum de titres garantissant aux associés fondateurs survivants la conservation de la majorité décisionnelle en cas de décès prématuré de l'un d'eux constitue une solution efficace et peu coûteuse. Elle nécessitera de s'assurer de la bonne adéquation des statuts en matière de droit de vote lors du démembrement de titres. Ainsi, les associés restants pourront agir et prendre les décisions nécessaires pour préserver la viabilité de l'entreprise.
Dans le même esprit, une autre solution serait la constitution d'une ou plusieurs holdings mais ici en tenant compte des contingences nécessaires à ce genre de structure.
Patrick Prugnaud
Assistant notaire pendant 10 ans au sein de plusieurs études, il rejoint en 2014 la Financière d'Uzès en tant que Family officer - ingénieur patrimonial. Patrick Prugnaud est double diplômé d'un master Assurance et gestion de patrimoine de l'ESG Management School de Paris et d'un DEA en histoire du droit obtenu en 2002, qui fait suite à l'obtention de deux maîtrises en droit notarial et en droit des sociétés. Il a également reçu son diplôme d'Aptitude aux fonctions notariales passées au CFPN de Paris en 2006.
Dans le cadre de ses missions, Patrick Prugnaud accompagne près d'une centaine de clients, de la famille à l'entrepreneur, dans la gestion de leurs problématiques patrimoniales et financières, ainsi que sur les aspects juridiques et fiscaux liés à l'activité de Family Office.