Discriminations liées à l'apparence : un enjeu sous-estimé ?
Publié par Linda Labidi le - mis à jour à
70 % des salariés français estiment que leur entreprise ne lutte pas assez contre les discriminations physiques. Pourtant, celles-ci ont un impact réel sur les carrières. Alors que l'inclusion s'impose comme un impératif sociétal, les dirigeants de PME et start-up ont un rôle clé à jouer pour transformer la donne.
Le Groupe APICIL a récemment publié la 5ème édition de son baromètre « Les Français et l'inclusion », réalisé avec OpinionWay. Cette année, l'accent est mis sur un angle encore trop peu exploré : l'apparence physique en entreprise. Poids, style vestimentaire, tatouages, maquillage... autant de critères qui influencent, consciemment ou non, le parcours professionnel. Un signal d'alerte pour les employeurs.
L'inclusion perçue en recul : un signal à ne pas négliger
Alors que 58 % des Français considèrent vivre dans une société inclusive - un chiffre en baisse de 5 points par rapport à 2024 -, les discriminations, elles, sont perçues comme omniprésentes. Les trois plus citées sont celles liées à l'origine, au handicap et à l'apparence physique (83 % chacune). Chez les moins de 35 ans, cette perception est encore plus marquée.
Les entreprises sont directement interpellées. Si 87 % des Français estiment qu'elles ont un rôle à jouer en matière d'inclusion, seuls 51 % jugent leurs actions suffisantes. Une attente forte s'exprime, notamment chez les jeunes actifs, particulièrement sensibles à ces enjeux.
L'apparence : un filtre invisible mais puissant
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 97 % des Français pensent que l'apparence influe sur au moins une étape d'une carrière. Le recrutement est le moment le plus cité (77 %), suivi de l'onboarding, des promotions et des missions confiées. Pourtant, dans un contexte où 64 % des entreprises ne fixent pas de code vestimentaire, 70 % des salariés considèrent que leur entreprise ne fait pas assez pour lutter contre les biais liés à l'apparence.
Paradoxalement, 75 % des salariés se disent à l'aise avec leur physique au travail, mais 59 % surveillent activement leur apparence. Près d'un tiers (31 %) a même déjà modifié son apparence à la suite d'une remarque. Et chez les jeunes, cette proportion grimpe à 44 %.
Une pression sociale forte, aux effets bien réels
Piercings, tatouages visibles, cheveux colorés ou attitude corporelle sont encore largement jugés comme « non professionnels ». Ces stéréotypes ont un coût : un salarié sur trois a été témoin de discriminations liées à l'apparence, un sur quatre en a été victime. Et dans plus d'un cas sur deux, ces comportements proviennent de collègues.
L'impact est tel que 57 % des actifs seraient prêts à changer quelque chose dans leur apparence pour des raisons professionnelles : tenue, coiffure, voire chirurgie esthétique. Une tendance encore plus prononcée chez les 18-24 ans, dont 29 % envisageraient un acte de médecine esthétique.
Dirigeants : comment transformer cette pression en levier d'action ?
Pour les dirigeants de PME et start-up, ces résultats sont un appel à l'action. Car si l'apparence est un critère interdit par la loi dans toute forme de discrimination, elle reste peu traitée dans les politiques DEI (diversité, équité, inclusion).
Voici quelques pistes concrètes à explorer :
L'inclusion ne peut plus être une façade. Elle doit devenir un projet d'entreprise, porté au plus haut niveau. Comme le souligne Philippe Barret, DG du Groupe APICIL : « En montrant l'exemple, les entreprises ouvriront la voie à une société plus inclusive. » Et ce sont bien souvent les plus petites structures, agiles et proches de leurs collaborateurs, qui sont les mieux placées pour initier ce changement.
Méthodologie : Le baromètre « Inclusion - Le regard des Français sur les discriminations liées à l'apparence physique en entreprise » a été réalisé auprès d'un échantillon représentatif de 1043 Français âgés de 18 ans et plus. L'échantillon a été constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d'âge, de catégorie socioprofessionnelle, de catégorie d'agglomération et de région de résidence. L'échantillon a été interrogé par questionnaire auto-administré en ligne sur système CAWI (Computer Assisted Web Interview). Les interviews ont été réalisées du 19 au 21 février 2025.