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L'employeur doit-il encourager ses salariés à faire une RQTH ?

Publié par Stéphane Duplan, cabinet ORVA Avocats le - mis à jour à

La Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé d'un salarié est souvent perçue par l'employeur comme une contrainte de gestion des ressources humaines. Changeons cependant le prisme et engageons la réflexion : la RQTH peut-elle devenir un atout pour l'employeur ?

La prise en compte de la qualité de travailleur handicapé par l'employeur ne doit pas se résumer à une donnée chiffrée. Elle doit être réelle et effective et l'employeur doit le cas échéant aménager l'accessibilité, le poste et les conditions de travail du salarié travailleur handicapé et veiller à sa formation, sa réadaptation ou sa rééducation, sous peine de voir sa responsabilité éventuellement engagée au titre du manquement à son obligation de sécurité.

RQTH : Contrainte ou avantage ? Charge ou bénéfice ?

Rappelons que l'employeur peut bénéficier des Aides à l'Emploi des Travailleurs Handicapés pour prendre financièrement en charge les coûts générés par l'adaptation du poste au handicap du salarié. Il existe également d'autres aides de l'Association de Gestion du Fonds pour l'Insertion des Personnes Handicapées (AGEFIPH) spécifiques à l'embauche, la formation ou le maintien dans l'emploi.

Attention, si l'obligation d'emploi de travailleurs handicapés à hauteur de 6% de l'effectif n'est pas respectée, l'employeur de 20 salariés et plus peut être financièrement sanctionné par le versement d'une contribution à l'AGEFIPH (selon les manquements constatés et recouvrée par l'URSSAF ou la MSA).

Enfin, il faut bien garder à l'esprit que la question du handicap figure parmi les thèmes de la négociation annuelle obligatoire sur l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, et la qualité de vie et des conditions de travail. Dans les entreprises d'au moins 250 salariés, un référent chargé d'orienter, d'informer et d'accompagner les personnes en situation de handicap, doit être désigné.

Si la jurisprudence considère que le salarié n'a pas l'obligation d'informer l'employeur de sa RQTH et que cette absence d'information ne peut constituer une faute(1), l'employeur peut toutefois trouver un intérêt propre à encourager les salariés concernés à entreprendre une RQTH et à se faire connaître, outre naturellement l'insertion des travailleurs handicapés dans le monde du travail.

Qu'importe la cause nationale ou l'obligation légale d'emploi, force est de constater que la question de la RQTH des salariés est très rarement mise en avant. Peu d'entreprises communiquent en effet sur les mesures prises pour favoriser l'emploi des travailleurs handicapés alors que la communication sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) et les mesures environnementales sont désormais des thèmes incontournables de communication des entreprises.

La RQTH comme atout pour l'image et la réputation de l'entreprise

Le constat est unanime, quel que soit le secteur d'activité, recruter et fidéliser ses salariés est aujourd'hui une préoccupation majeure du chef d'entreprise et pose de réelles difficultés tant dans les fonctions supports que dans la production.

La donne change, la génération actuelle est en quête de sens dans l'activité de l'entreprise et dans les conditions de travail.

Sans naturellement minorer les autres aspects de la RSE, l'entreprise qui favorise l'emploi des travailleurs handicapés ne démontre-t-elle pas que la ressource humaine n'est pas qu'une simple notion de gestion, mais bien une prise en compte réelle et concrète de la situation particulière d'un salarié pour qu'il puisse travailler avec les autres au sein d'une même structure ?

La réponse est évidement positive, mais encore faut-il le faire savoir à l'extérieur et la mise en place d'une communication sur le sujet est opportune. Si désormais, les entreprises d'au moins 50 salariés et plus sont tenues de rendre public leur index sur l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, les employeurs pourraient également décider de communiquer sur leur politique interne vis-à-vis des travailleurs handicapés.

Une réelle politique de favorisation de l'emploi et des conditions de travail du travailleur handicapé est un gage de respect et de prise en considération des valeurs humaines au sein d'une entreprise et cela correspond au sens actuellement recherché par les candidats potentiels à une offre d'emploi.

En cela, la présence de travailleurs handicapés au sein d'une structure qui le fait savoir, peut permettre de faciliter le recrutement externe et peut être, de faire la différence avec les offres concurrentes.

Outre les difficultés de recrutement, l'employeur doit aussi gérer la mobilité de son personnel. A l'heure où les cabinets de recrutement, faute de candidatures, pratiquent les tentatives de débauchage des salariés déjà en poste, il est aujourd'hui prioritaire pour l'employeur de travailler sur la fidélisation de ses équipes.

Il en effet plus difficile d'envisager un changement de situation professionnelle au sein d'une autre entreprise quand son poste actuel et son environnement ont été adaptés à sa situation personnelle pour tenir compte de son handicap et que l'on bénéficie d'un accompagnement spécifique.

A ce titre, l'engagement d'un travailleur handicapé parfaitement intégré dans l'entreprise et dont le poste est adapté à ses besoins sera, encore plus que d'autres salariés, gage d'une stabilité certaine.

Encourager ses salariés à entreprendre une RQTH présente donc un intérêt, à plus d'un titre :

  • En termes de RH, outre respecter les obligations légales et favoriser le dialogue social avec les représentants du personnel, fidéliser les collaborateurs concernés et stabiliser les postes dans l'entreprise
  • En termes de notoriété, développer sa notoriété et son image de marque employeur, améliorer sa réputation
  • Pour aller plus loin

    Stéphane Duplan est Avocat en droit social au sein du cabinet ORVA Avocats à Orléans. Il assiste et défend les entreprises au quotidien.

    (1)Cass. soc. 6 mai 2003, n°01-41370 ; 7 novembre 2006, n°05-41380 ; 18 septembre 2013, n°12-17159