Est-ce intéressant de mettre en place un accord d'intéressement ?
Publié par Marie-Pascale Piot, Avosial le - mis à jour à
Dispositif flexible de partage de la valeur, l'intéressement permet de verser une prime exonérée de cotisations, basée sur des critères choisis de résultats et/ou de performance adaptés aux objectifs de l'entreprise.
L'intéressement est le dispositif d'épargne salariale facultatif qui permet, pour les salariés, d'être associés aux résultats et performances de l'entreprise, et pour l'employeur, de verser des sommes exonérées d'impôt et de cotisations sous certaines conditions.
Outil d'attractivité et de fidélisation, mais aussi outil permettant de renforcer une stratégie d'entreprise ou d'encourager certains comportements, sa mise en place est facilitée depuis plusieurs années par les gouvernements successifs et, en dernier lieu, par la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat.
Qui est concerné ?
Tous les employeurs de droit privé, quel que soient leur forme juridique, leur taille, leur secteur d'activité, leur structure, peuvent choisir de mettre en place un accord d'intéressement dès lors qu'ils satisfont à leurs obligations en matière de représentation du personnel. Il peut également être mis en place au niveau d'un groupe ou d'une partie d'un groupe, d'une unité économique et sociale, voire d'un projet.
L'intéressement est mis en place par accord collectif avec les organisations syndicales représentatives, le comité social et économique (CSE) ou par référendum selon la structure du dialogue social. Il peut également être mis en place par décision unilatérale dans les entreprises de moins de 50 salariés.
D'une durée de 1 à 5 ans dorénavant, l'intéressement peut s'articuler avec la participation, dans les entreprises qui sont soumises à ce dispositif.
Un intérêt stratégique à la mise en place d'un accord d'intéressement
L'intéressement est un outil qui peut être totalement adapté à la stratégie de l'entreprise. Sa formule de calcul peut ainsi être basée sur des critères de résultats classiques de l'entreprise (ou, sous conditions, de résultats des filiales de l'entreprise) et/ou sur des critères de performance très variés et sur une période annuelle ou infra-annuelle.
Le choix des critères, notamment de performance, est très large et peut permettre ainsi d'orienter collectivement les comportements : on peut par exemple définir des critères liés à l'environnement (réduction des déplacements), à la sécurité (réduction du nombre d'accidents liés à l'absence de port d'EPI), à l'organisation du travail (nombre de jours de télétravail) ou à des performances professionnelles (réduction du taux d'insatisfaction client, diminution des délais de livraison, etc.).
La formule peut définir des périmètres d'application au sein de l'entreprise (tel critère applicable à telle unité de travail ou à tel projet) ou s'appliquer globalement.
Enfin, l'entreprise a le choix entre une répartition des primes uniforme entre chaque salarié ou proportionnelle aux salaires ou encore une combinaison de ces deux critères.
Si la formule est relativement libre, elle doit rester lisible pour les salariés et surtout respecter le principe de l'aléa : le montant de la prime ne doit pas être déterminable à l'avance.
En revanche, si à l'issue de l'année l'employeur constate que la prime d'intéressement n'est pas à la hauteur de ce qu'il envisageait de verser, il peut décider de verser un supplément d'intéressement dont il fixe librement le montant (l'addition de ce supplément et de la prime d'intéressement ne devant toutefois pas dépasser les plafonds légaux).
Un intérêt financier à la mise en place d'un accord d'intéressement
Pour les employeurs de moins de 250 salariés, les sommes versées au titre de l'intéressement sont exonérées de cotisations sociales et des taxes sur les salaires dès lors qu'elles ne dépassent pas un plafond global (20 % de la masse salariale) et un plafond individuel (la prime perçue, par salarié et par an, ne peut pas dépasser 75 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 30.852 € en 2022). Elles sont également déductibles du bénéfice imposable. Les employeurs de 250 salariés et plus sont soumis au forfait social de 20 % sur les primes versées.
Pour les salariés, les primes plafonnées sont exonérées de cotisations salariales mais soumises à CSG et CRDS. Elles sont également exonérées d'impôt sur le revenu si elles sont investies et bloquées pour une certaine période sur un plan d'épargne salariale (PEE, plan d'épargne retraite, etc.). Des cas de déblocage anticipé sont prévus par la loi et, dans le cadre des mesures facilitant le pouvoir d'achat, un nouveau cas de déblocage a été créé : les sommes épargnées peuvent, sous certaines conditions, être débloquées, jusqu'au 31 décembre 2022 et dans la limite de 10.000 €, « sur demande du bénéficiaire pour financer l'achat d'un ou de plusieurs biens ou la fourniture d'une ou de plusieurs prestations de services ».
En cette période où les entreprises font face à l'inflation, au changement des aspirations des salariés au sortir de la crise sanitaire et à des difficultés de recrutement, l'intéressement peut être un véritable atout s'il est correctement piloté et fait l'objet d'une bonne communication.
Pour aller plus loin
Marie-Pascale Piot, avocate, est spécialisée en droit du travail et droit de la sécurité sociale au sein du Cabinet EY Société d'Avocats