Alternance : quels avantages pour les PME ?

Former des apprentis, cela n'a rien de bien nouveau. Pourtant, depuis la crise sanitaire et l'élargissement des incitations (notamment financières) à l'alternance, la pratique a été totalement repensée. Elle s'inscrit désormais comme un levier majeur des RH.

Plus encore que les grands groupes, les PME sont confrontées à un défi de taille : attirer et retenir les talents. Les difficultés de recrutement sont particulièrement marquées dans certains secteurs clés, comme l'industrie, où 60 % des chefs d'entreprise font état de telles difficultés, et la construction, où ce taux grimpe même à 79 % (selon l'étude La situation du marché du travail au 3e trimestre 2023 de la Dares). Face à cette problématique, l'alternance apparaît comme une solution avantageuse pour les PME.

Le succès de ce dispositif est marqué par un taux de satisfaction élevé. Selon les chiffres de la 3e édition de l'Observatoire de l'Alternance, ce taux s'établit à 90 % dans les entreprises qui y ont eu recours. Le taux de recommandation de l'alternance a atteint un niveau record de 8,3 sur 10 en 2023. 78 % des entreprises lui attribuent même une note supérieure à 8. Cette satisfaction est partagée par les alternants eux-mêmes, qui sont 91 % à se déclarer satisfaits ou très satisfaits de leur parcours en alternance. Ce chiffre est en constante progression, avec une augmentation de 4 points par rapport à l'année précédente et de 9 points par rapport à 2021. L'alternance se révèle donc être un outil efficace pour les PME. À cela, plusieurs raisons !

Un dispositif gagnant-gagnant

En intégrant un alternant, les TPE et PME accueillent souvent un regard neuf, des compétences actualisées et un soutien opérationnel précieux. Pour l'alternant, c'est l'opportunité d'acquérir une expérience professionnelle concrète, de développer un réseau et de faciliter son insertion sur le marché du travail. Les contrats d'apprentissage ou de professionnalisation, d'une durée de 6 mois à 3 ans, permettent une immersion progressive dans l'entreprise, avec un rythme alternant entre formation théorique et mise en pratique. « Il faut bien comprendre que l'alternance n'est pas un monolithe, il existe des alternances, en fonction du niveau (BTS, Licence, Mastère...), du profil de l'entreprise, des attentes des apprentis », explique Nizarr Bourchada, directeur national délégué aux partenariats entreprise et directeur du pôle Alternance Groupe IGS.

Au-delà de l'expérience professionnelle, l'alternance offre aux jeunes de nombreux avantages : une rémunération progressive en fonction de l'âge et de l'avancement dans le contrat, un prise en charge des frais de scolarité, et la possibilité d'obtenir un diplôme reconnu sans s'endetter. « Sur le plan sociétal, l'alternance est une chance, pour des jeunes qui n'auraient pas pu faire d'études pour des raisons financières, d'accéder aux études supérieures », indique Carole Faure, directrice et responsable des relations entreprises pour Normandie Web School.

Pour encourager le recours à l'alternance, de nombreuses aides financières sont accessibles aux TPE et PME. Par exemple, pour les contrats signés jusqu'à fin 2024, une aide unique de 6 000 euros est versée la première année, quel que soit l'âge de l'apprenti. D'autres dispositifs, comme l'aide TPE jeunes apprentis, peuvent compléter ce soutien financier. Toutefois, il est important de noter que ces aides sont susceptibles d'évoluer à partir de la fin de l'année 2024. Un suivi attentif des annonces gouvernementales est donc recommandé pour les entreprises souhaitant recruter en alternance. « Ces incitations financières ont agi comme un véritable accélérateur pour l'alternance, mais il est probable que ces aides soient réduites dans les mois qui viennent », commente Carole Faure.

Les bonnes raisons de se lancer

Attirer les énergies et les talents mais, surtout, les fidéliser et les retenir... Un enjeu stratégique majeur pour les PME qui font face non seulement à une pénurie de main-d'oeuvre mais surtout à un bouleversement du rapport au travail. Alors que les chiffres du chômage restent au plus bas ( NDLR : le taux de chômage en France s'est stabilisé à 7,5 % de la population active au premier trimestre 2024 par rapport au trimestre précédent, selon les derniers chiffres de l'INSEE publiés en mai ), l'alternance se révèle être une solution pertinente pour les PME.

En ouvrant leurs portes à de jeunes apprenants, elles renforcent leur attractivité et se positionnent comme des acteurs dynamiques et engagés dans la formation des jeunes générations. L'intégration d'alternants au sein des PME est une opportunité de transmettre des savoir-faire, des valeurs et une culture d'entreprise. Cette immersion favorise l'émergence d'une véritable communauté de travail et renforce le sentiment d'appartenance. « L'enjeu de pré-embauche est central dans la démarche de l'alternance. Elle est plébiscitée dans les secteurs que l'on dit en tension car, plus un alternant est intégré tôt dans la structure, plus il est opérationnel et imprégné de la culture de l'entreprise », souligne Nizarr Bourchada. Former des collaborateurs experts des process internes est un autre avantage clé de l'alternance.

Les alternants, en étant impliqués dans les projets de l'entreprise, acquièrent une connaissance approfondie de son fonctionnement et de ses spécificités. Enfin, l'alternance est un levier puissant pour travailler la marque employeur. En s'engageant dans la formation des jeunes, les PME témoignent de leur volonté de transmettre leur savoir-faire et de contribuer à l'insertion professionnelle des jeunes générations. Pour Carole Faure, le constat est sans appel : « L'alternance est un élément clé pour bâtir une marque employeur. L'intégration de jeunes amène du sang neuf dans les PME. Les jeunes aspirent à donner du sens à leur alternance et, souvent, ils s'impliquent et amènent un renouveau dans les pratiques des entreprises ».

Écoles, alternants, PME : le triptyque gagnant ?

Au coeur du dispositif de l'alternance, on trouve le tuteur qui joue un rôle déterminant dans les ambitions et dans la concrétisation d'une réelle politique d'alternance pour les PME. « On ne peut pas s'improviser tuteur, observe Nizarr Bourchada. Au-delà des contraintes réglementaires à respecter pour endosser cette responsabilité, il faut disposer d'une vraie appétence à la transmission, il faut connaître le dispositif de l'alternance ». Pour ce faire, le Groupe IGS a développé un module de formation spécifique de deux jours. Une formation financée par les OPCO (Opérateurs de compétences) qui permet non seulement de mieux "onboarder" les alternants mais permet de créer des conditions du succès pour le jeune autant que pour l'entreprise. « Lorsque des missions leur sont confiées, les alternants les prennent à coeur et s'investissent avec beaucoup d'énergie », conclut Carole Faure.

« J'ai tout de suite apprécié l'immersion en entreprise » Floriant Meilhon, d'alternant à chef d'entreprise...

« J'ai mis un terme à mes études après l'obtention d'une licence en école de commerce et j'ai tout de suite commencé à travailler. » Une expérience dans le secteur immobilier, une autre dans le secteur bancaire. Après ces premières confrontations avec le monde du travail, Floriant Meilhon prend conscience qu'il ne peut pas se réaliser pleinement sur ces filières. « J'étais vraiment passionné par le digital et j'ai décidé de reprendre mes études, mais il m'était impossible de le faire en perdant le contact avec une activité professionnelle. »

Alors âgé de 25 ans, le choix de l'alternance s'est imposé comme une évidence. L'école vers laquelle il s'oriente ne prend pas en charge la recherche d'entreprises accueillant les alternants. Son profil est finalement retenu par Actinuum, une PME spécialisée dans la formation professionnelle. « Ce que j'ai tout de suite apprécié, c'est l'immersion dans la réalité de l'entreprise », explique Floriant Meilhon. « J'ai été d'emblée considéré comme un collaborateur à part entière. Cela m'a placé dans une dynamique de montée en compétences très forte et je me suis pleinement impliqué. »

L'une des clés de cette collaboration fructueuse : la connivence qui s'est immédiatement instaurée entre l'alternant et son tuteur. « Cela a été une vraie rencontre. Nous partagions la même vision du marketing digital, des valeurs communes. Il m'a véritablement pris sous son aile et nous avons avancé main dans la main. » Ce que Floriant Meilhon retient de cette aventure : la mise en pratique immédiate de théories abordées à l'école et la sensation d'être porté par l'action.

Au terme de son alternance, l'entreprise lui propose d'emblée un CDI. « Ce n'était pas mon choix, il me tenait à coeur de créer ma propre entreprise. » Mais le lien avec Actinuum était trop fort et la PME compte aujourd'hui parmi les premiers clients de Floriant Meilhon. « Je voulais conserver une certaine liberté dans mon exercice professionnel et me confronter à différents univers, mais Actinuum garde une place particulière dans mon activité comme dans mon coeur. »